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19 décembre 2008 5 19 /12 /décembre /2008 19:40
Au terme de ce reportage, on peut voir à quels obstacles, quels enjeux, est confrontée et surtout peut être confrontée demain la mission des observateurs européens en Géorgie, "EUMM Georgia".

1. L’enjeu de la visibilité.


C’est un des premiers soucis des observateurs. 
A défaut d’avoir tous le même uniforme – les unités préconstituées (policiers, gendarmes, carabinieri) conservent leur uniforme national – il a été décidé que tout observateur aurait une chasuble bleue et un béret bleu, ainsi qu'un brassard, qu'ils mettent dès qu'ils sont en mission - ou du moins en approche de check-point ou de personnel civil… Le kaki a, normalement, été prescrit, pour éviter toute confusion. Afin d’identifier les véhicules de EUMM Georgia, des stickers bleus ont été collés de chaque coté, et des bandes bleues et jaunes fluos, ainsi qu’un drapeau sur un mat éclairé, ont fait leur apparition afin d’éviter toute méprise. Une nécessité ! Les patrouilles circulent de jour comme de nuit, 7 jours sur 7. Et à la nuit tombée ou en demi-teinte, il s'agit d'éviter toute méprise. Ce qui n'est pas évident !
Le AMZ polonais sur la route © NGV

Les  véhicules européens sont en effet très dissemblables. Entre le Hummer italien revenu d’Afghanistan, les Mercedes classiques des Allemands, et les Panhard français, il y a là un assemblage hétéroclite de matériels, à la fois difficile à entretenir au niveau logistique (allez trouver un pneu de Panhard ici me dit un technicien...). Mais surtout qui ne facilite pas la visibilité sur le terrain. Couleurs, formats différents, ne facilitent pas le travail. Et je dirai même est dangereux pour les observateurs. Certes des véhicules de couleur militaire ont été repeints à leur arrivée, comme les véhicules italiens qui sont passés de la version sable Iraq en blanc. De même les véhicules utilisés par les gendarmes français ont été repeints en bleu avant le départ, la couleur habituelle de la gendarmerie. Mais il reste encore quelques véhicules blindés – en kaki - les AMZ polonais notamment.
Les Hummer italiens repeints en blanc sur le parking de Tbilissi © NGV

Dilemme : avoir un abord pacifique ou protéger les observateurs. De plus ils ne sont pas adaptés au caractère de la mission. On a l’impression à les voir qu’il y a une opération de maintien de l’ordre importante. Même si les équipements sont neutralisés. Les véhicules tout blindés ou équipés de lance grenades lacrymogènes sont un peu trop « offensifs ». En même temps, il faut le reconnaître, le danger n’est pas absent. Et il est difficile de mettre des observateurs dans des véhicules légers qui ne soient pas blindés.

2. le défi de l'accessibilité.

La Géorgie est en bonne partie un pays de montagnes. La partie septentrionale de l’Abkhazie et de l’Ossétie sont bordées de montagnes de 2000  à 4000 mètres. Inatteignables en temps normal. Même aujourd’hui, les observateurs le reconnaissent. L’hélicoptère pourrait être une solution (la mission n’en est pas dotée – sauf pour les évacuations sanitaires où elle recourt à une société privée). Mais il se heurte à un sérieux risque de sécurité. "Je ne voudrais pas trop me balader en l'air à proximité de la frontière" explique un observateur pourtant habitué aux missions à risque. Il faut reconnaître que, mis à part quelques drones, (dont certains ont été abattus), l’activité aérienne est effectivement limitée à proximité de la frontière.

3. Le slalom de la communication.

La Communication est un axe important non pas de faire-valoir de la mission mais une condition du bon déroulement de l'opération. Cela est d'abord dû au contexte même de la guerre en Géorgie. En effet, outre les dégâts humains et matériels, cette guerre a été aussi médiatique, et l'est encore. Rien que sur l'étendue des pertes humaines, il y a encore une censure et la propagande joue des deux cotés. Encore plus depuis le cessez-le-feu car il s'agit maintenant d'examiner les conséquences de la guerre, et de déterminer les responsabilités. En cela, EUMM ressemble davantage à une mission d'interposition qu'à une classique mission d'interposition. D'autant que les attentes dans la population sont très fortes. Avec le risque d'être déçues. On attend des Observateurs qu'ils ramènent le calme et la tranquillité, qu'ils s'expriment sur tel ou tel incident, permettent de savoir la vérité. Même si ce n'est pas tout à fait dans leurs moyens, ni dans leurs compétences.
Confusion supplémentaire, la présence de plusieurs organismes internationaux, représentant le continent européen et la communauté internationale (OSCE, Onu, Conseil de l'Europe...), chargés de différentes missions : observation (UE, OSCE, ONU), humanitaires (PAM, HCR, CE...). Ce qui ajoute à la confusion d'autant que certains ont des sigles très équivalents (avec le bleu dominant), voire le même (Conseil de l'Europe, UE). Bref un véritable enjeu opérationnel.

4. La question de l’organisation.

Il ne faut pas se cacher. Cette mission a une caractéristique « militaire » ou au moins de « sécurité civile » très forte. Et les attitudes des observateurs sont très militaires ou policières. Il n'est que de voir les nombreuses interdictions de communication. Dans un certain sens heureusement. Refuser de le voir est à mon sens, nuisible pour l’efficacité de la mission. Car c’est une mission qui se déroule aussi dans un contexte risqué.

5. La gestion de la mission

Installée en un temps record, l'UE a dû faire très vite. Ainsi faute de cantine ou même de cafétéria, c'est la femme de ménage qui a fait office les premières semaines de cantinière et les écussons de l'EUMM ont été conçus en interne et... "cousus main" par son mari. Maintenant il faut tout mettre en ordre, au cordeau des règles habituelles de l'UE. Car cette mission reste en effet soumise à la plupart des règles en usage, notamment de marchés publics. La gestion des moyens arrivés très rapidement mais qui sont dissemblables est aussi nécessaire. Le tout représente une tâche certes discrète mais qui est sans doute un enjeu administratif majeur pour la bonne marche de la mission.
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logo_ouestfrancefr.pngL'éditeur : Nicolas Gros-Verheyde. Journaliste, correspondant "Affaires européennes" du premier quotidien régional français Ouest-France après avoir été celui de France-Soir. Spécialiste "défense-sécurité". Quelques détails bios et sources.