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18 mai 2009 1 18 /05 /mai /2009 01:30

Pour le Rear-admiral Phil Jones, c’était la dernière… des conférences de presse - en tant que commandant de l’opération européenne anti-pirates EUNAVFOR Atalanta, mercredi 15 mai à Bruxelles. L’homme a été promu à un poste gratifiant à la Navy… et a choisi de quitter son poste, avant terme, laissant son ancien adjoint de la Navy, reprendre le relais (nous l'annoncions il y a déjà quelques semaines, lire ici).

Très politique, restant évasif sur certains points, allusifs sur d’autres, Phil Jones qui a été à la tête de Atalanta durant ces six premiers mois, s’est bien gardé de tout triomphalisme, pour ce bilan à mi-mandat de l’opération anti-pirates de l’UE. Mais il a confirmé une évolution tactique : l'opération va s'étendre à une partie de l'Océan indien, dans la zone des Seychelles, en coopération avec les autorités de ces îles (perdues) dans l'Océan indien. Car les pirates utilisent "des bases dans ces îles". Mais la tactique ne pourra pas être la même que dans le Golfe d'Aden. Il n'a rien voulu détailler. On sait que les avions et le renforcement des gardes côtes des Seychelles sont au rang de priorités. Mais on peut deviner aussi un nouvel axe d'action : la détection et la destruction les bateaux mères. Quant aux fuites d'informations vers les pirates (révélées par la presse espagnole, lire ici), le chef d'Atalanta a démenti que cela puisse venir des militaires à Northwood. Mais il a indiqué avoir des contacts avec la diaspora somalienne à Londres.

L’extension aux Seychelles est confirmée. Mais cela oblige à « revoir les tactiques. On ne peut pas utiliser les mêmes moyens dans les Seychelles que pour le Golfe d’Aden ». Effectivement, le commandant d'Atalanta a confirmé que des « pirates peuvent utiliser des bases plus isolées dans la région ». Un travail « est engagé avec les Seychelles pour détecter ses bases, comment les arrêter, permettre aux forces locales de travailler avec Atalanta et élargir la couverture

Nouvel axe d'action : les bateaux mères. Le Contre-amiral a reconnu que, récemment, les forces anti-pirates avaient détecté un plus intense « degré de coordination entre les bateaux-mères qui échangent des informations sur les navires qu’ils ont vus ou attaqués ». Ce devrait d'ailleurs un des axes d'action futurs des forces anti-pirates : les bateaux mères. « C'est le pivot de l'activité. Nous avons saisi 4 bateaux-mères cette semaine. Saisir ces navires mères est une stratégie très efficace », a-t-il expliqué.

D’autres Etats (que le Kenya) pour traiter les suspects ? L'accord signé avec le Kenya pour juger les pirates est « un élément-clé de l’opération au niveau de la dissuasion. C'est d'ailleurs un des grands avantages de UE - a souligné Jones - : on peut avoir recours à différents instruments de l’Union». Pour autant, il faut « diversifier les Etats qui pourraient nous aider. Certains pays ont des défis à résoudre, d’autres sont plus ouverts. » (NB : Il ne les a pas cités. Mais on sait que des négociations sont entamées avec la Tanzanie, les Seychelles, Djibouti – pour le transfert rapide -). « Une solution à long terme est nécessaire. Nous ne pourrons pas venir pendant des décennies avoir des navires qui viennent dans le monde. Il faut passer par une réponse régionale. » a-t-il ajouté.

Les possibles fuites vers les pirates : la diaspora somalienne à Londres
. « Nous n’en savons pas grand chose. Nous sommes persuadés que nous ne sommes pas à l’origine de ces fuites » a expliqué. Ce qui n'empêche que : « nous redoublons d’effort pour sécuriser les informations transmises aux navires marchands ou qu’ils nous transmettent ». Pour lui, ces informations pourraient venir « des éléments de la diaspora somalienne, très présente, à Londres qui seraient à l’origine de ces informations ».

Au bilan, une réduction du nombre d’attaques pirates dans le secteur « particulièrement dans les premiers mois 2009 grâce à la présence internationale ET aux mesures prises par la communauté maritime internationale » (NB : mais pas dans les mois qui suivent). C’est un des « acquis d’Atalanta : le dialogue avec la marine marchande. Nous avons pu discuter de nos préoccupations, leur donner des conseils pour contrer des attaques ». La diminution de l’efficacité de l’action des pirates est également remarquée notamment grâce à la mise en place des transits de groupe. «  Certaines des attaques sont des gestes désespérés ». Autre point : l'accompagnement des bateaux du PAM (sans incident). « Ce qui a permis d'acheminer 120 000 tonnes de nourriture, soit de quoi nourrir environ 1,5 millions de Somaliens chaque jour ».

Autres éléments intéressants

La présence de gardes armés sur les bateaux marchands : c'est clairement non. « Dans la communauté des navires marchands, les avis sont unanimes. Aucun ne veut pas de çà, ce serait un élément d’escalade de la violence. Et ce n’est pas une solution face aux pirates ». Si on recourt « aux gardes armés (solution prônée aux Etats-Unis), il nous faudrait 1200-1500 hommes armés dans le Golfe. Ce qui n’est pas souhaitable. Pour certains cas, comme le programme de ravitaillement des ports somaliens par le PAM, nous proposons nos services. (Mais)  Il faut (aussi) que la communauté des navires marchands prenne ses responsabilités.»

La coordination avec l’Otan : tout va très bien. « Elle est plus simple qu’il n’y paraît ». Et « lorsqu’on parle de commandement unique, on ne peut pas se dire qu’une organisation va commander l’autre. Ce qui compte est les réseaux d’information, permettant à chacun de d’être au courant. » (NB : au passage, une confirmation. La bataille en coulisses pour prendre le leadership de l'opération "anti-pirates" entre les deux organisations européennes de défense ne s'est pas terminé en novembre 2008 avec le lancement de l'opération Atalanta par l'Union européenne. Elle continue. L'organisation du bd Leopold ne s'avoue pas vaincue...).

Et la petite phrase... anti-critiques. Répondant à quelques critiques voyant un commandement surtout britannique, Jones n'a pu s'empêcher de saluer la visite de Javier Solana (qui était jeudi au quartier général de Northwood), pour lui « montrer combien nos troupes sont multinationales ».

(crédit photo : Conseil de l'Union européenne)

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logo_ouestfrancefr.pngL'éditeur : Nicolas Gros-Verheyde. Journaliste, correspondant "Affaires européennes" du premier quotidien régional français Ouest-France après avoir été celui de France-Soir. Spécialiste "défense-sécurité". Quelques détails bios et sources.