De fait, la Haute représentante s'est surtout donné des marges de manoeuvre pour la gestion futur du Service, lui conférant une certaine "possibilité d'autonomie". Et s'il y avait un mot qui transcende tout le texte, c'est ce mot là : autonomie budgétaire, autonomie juridique, autonomie dans la gestion du personnel, autonomie des règles de sécurité, etc.
Définition du SEAE. Le SEAE est « un bureau autonome de l'UE, séparé de la Commission et du secrétariat général avec la capacité juridique nécessaire pour accomplir ses tâches et atteindre ses objectifs. » est-il écrit. Il a son siège à Bruxelles et comprend une « administration centrale » et les délégations de l'Union dans les pays tiers et auprès des organisations internationales (NB : les représentations dans les Etats membres restent rattachés à la Direction générale de la communication de la Commission). Le service soutiendra bien entendu le travail de la Haute représentante. Mais il pourra aussi « assister le président de la Commission, la Commission et le président du Conseil européen ».
Autonomie de gestion du personnel. C'est la Haute représentante qui sera l'autorité investie du pouvoir de nomination (et non la Commission ou le Conseil). Ce qui a deux conséquences : sur le choix des personnes recrutées au SEAE et leur statut.
• « Toutes les nominations seront faites sur la base du mérite et une base géographique la plus large possible. » On peut remarquer qu'il n'y a pas donc d'engagement à une égalité entre Etats membres, et encore moins de quotas. Une notion réprouvée par Cathy Ashton (2).
• La HR entend rester, d'une certaine manière libre de définir certaines procédures de sélection. Ce sera ainsi à la Haute représentante de « définir les procédures de sélection ». Tout comme ce sera à elle de définir les règles de mobilité et de rotation à l'intérieur du service. Les agents du siège devront périodiquement servir dans les délégations, et vice-versa (comme dans tout service diplomatique classique).
• De façon générale, le statut du personnel de l'UE (fonctionnaires, contractuels et autres contrats) sera pleinement applicable. Tous les agents temporaires seront traités sur le même pied « d'égalité » quelle que soit leur provenance (services diplomatiques des Etats membres ou personnel de l'UE), ce qui implique un aligement non seulement des salaires et des primes (autrement dit un diplomate français ou suédois ne devra pas toucher plus, sous forme d'indemnité diverses, qu'un diplomate bulgare ou letton).
Spécificité des structures de gestion de crise. Les structures civilo-militaires de gestion de crise voient leur autonomie largement confortée. La CMPD (cellule civilo-militaire de planification), le CPCC (Etat-major civil de crise, l'Etat-Major militaire et le Centre de situation (centre d'analyse et de renseignement) sont placés sous l'autorité directe et la responsabilité du Haut représentant ». Il n'est pas mentionné de façon expresse un rattachement au secrétaire général du SEAE. « Les spécificités de ces structures, aussi bien que les particularités de leurs fonctions, recrutement et statut du personnel sont respectées ». La gestion quotidienne restera faite soit au sein de chaque DG, soit par le secrétariat général.
Partage budgétaire avec la Commission et contrôle du Parlement assuré
Elément clé de cette proposition, le SEAE devra avoir l'autonomie budgétaire nécessaire et considéré comme une "institution", avec une "section spécifique dans le budget de l'UE". Il sera ainsi soumis aux conditions de décharge habituelle. Ce qui, au passage, règle les problèmes antérieurs qui ont opposé le Parlement européen au Haut représentant, Javier Solana, sur certains budgets PESC (3). Pour les instruments financiers, un partage subtil est effectué selon la nature des fonds, diplomatique (PESC...) ou mixte : extérieur/développement/voisinage...).
• Les fonds "diplomatiques" sont sous la haute main de la Haute représentante, mais en tant que vice-présidente de la Commission. Ils sont donc gérés, classiquement, sous le contrôle budgétaire et les procédures "ordinaires" de la Commission. Mais la Vice-présidente en est seule responsable de A à Z (de la programmation générale à l'usage opérationnel). Il s'agit du : budget PESC, de l'instrument de Stabilité, de l'instrument pour la Coopération avec les pays industrialisés, de la Communication et diplomatie publique et des missions d'observation électorales.
• Les fonds "mixtes", le SEAE a une compétence partagée avec les commissaires compétents (élargissement ou développement ou autre) pour la programmation des autres fonds extérieurs : Fonds européen du développement (FED) et Instrument de Coopération développement (DCI), Instrument européen de Partenariat et de Voisinage (ENPI), Démocratie et droits de l'homme (EIDHR), Coopération avec les pays industrialisés (ICIC), Coopération pour la sûreté nucléaire.
Le SEAE assure ainsi la programmation des trois premières étapes : enveloppes financières globales pour chaque région, "country and regional strategic papers" (CSP/RSP) et "national and regional indicative programmes" (NIP/RIP). Tandis que les deux dernières étapes (allocations nationales et mise en oeuvre) reste de la responsabilité du commissaire. La programmation sera plus étroitement faite en commun avec le commissaire concerné — Développement pour le FED et le DCI, Elargissement pour le INPI — et la proposition budgétaire sera faite "conjointement" au collège des commissaires.
(1) Les grandes lignes du service diplomatique de l'UE approuvées
(2) Le PE dicte ses trois volontés à Cathy Ashton
(3) Le Parlement mécontent du manque de transparence du budget PESC Télécharger le texte de la proposition
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