L'Europe fait beaucoup mais en ordre dispersé. « Chaque Etat membre envoie son propre personnel, ses propres chiens pisteurs, ses propres avions, etc. Or, l’addition des réponses individuelles organisées dans l’urgence ne sera jamais équivalente à une réponse européenne planifiée, organisée.» Et d'ajouter : « L’Union européenne, collectivement avec les 27 Etats membres, représente le premier donateur mondial pour l’aide humanitaire et l’aide au développement. Nous disposons d’une vaste panoplie de moyens d’instruments civils ou militaires pour répondre aux besoins d’urgence et à la reconstruction. Mais tant que perdureront les réflexes nationaux, nous ne serons malheureusement pas en mesure de tirer le bénéfice concret de ce statut virtuel de force collective. Seule une organisation commune des capacités de protection civile et de l’assistance consulaire des Etats membres permettrait de préparer une réponse efficace et à moindre coût pour l’Union européenne. Ce dont nous avons besoin, ce n’est pas d’une addition de plans nationaux de mobilisation des moyens comme B-FAST en Belgique ; mais d’un véritable EU-FAST.»
L'idée avait achoppé à plusieurs reprises. L'ancien Premier ministre belge nous rafraîchit la mémoire de ces dates où l'Europe a raté l'histoire... En 2002, le sommet européen avait prévu de créer un instrument communautaire de gestion des catastrophes. « La résistance de certains Etats membres avait été trop forte ». En 2003, avec le Président français Jacques Chirac, le Chancelier allemand Gerhard Schröder et le Premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker, cette idée est développée dans le cadre de la PESD. « Cette proposition a finalement échoué à cause du fait qu’un petit nombre d’Etats membres ne pouvait accepter que des moyens militaires soient utilisés pour des actions civiles et humanitaires ». En 2004, « la tragédie du tsunami nous avait une fois encore rappelé que le coût de la « non Europe » en matière de gestion de crise était très élevé, là où les forces envoyées par les Etats-Unis sauvaient des vies en masse et à moindre coût. En 2006, le Commissaire Barnier avait alors proposé la création d’une force commune d’intervention baptisée « Europe Aid », au plus tard à l’horizon de 2010. « Cette fois encore, le projet est resté lettre morte, torpillé par certains Etats membres, soucieux notamment de garder la visibilité de leurs actions de réaction. » Aujourd'hui, explique-t-il « Nous ne pouvons nous permettre de continuer à agir comme si le traité de Lisbonne n’existait pas. Il convient dès maintenant d’agir dans le sens où il a été conçu, c’est-à-dire « plus d’Europe » et cette responsabilité n’incombe pas simplement à « Bruxelles » mais tout autant aux Etats membres. »
Comment ? « En créant un centre permanent de coordination qui pourrait être activé dans les deux heures après une catastrophe humanitaire. En organisant des stocks permanents de matériel d’aide humanitaire à l’échelle européenne. Et en ressemblant des capacités de transport militaire mises à disposition par des Etats membres. »
NB : précisons que ce propos n'est pas isolé au sein du Parlement européen. Un député européen d'un autre groupe (le PPE), le Français Philippe Juvin, a proposé également, dans un communiqué publié vendredi, d'aller vers davantage de coordination europénne : « le drame d'Haïti, ce n'est pas le manque de moyens, c'est l'inorganisation qui accompagne la mise en oeuvre des aides apportées tant par les États que par les organisations humanitaires. Nous devons avoir une force permettant la coordination de ces moyens. L'Union européenne est en situation d'apporter une réponse cohérente. »