L'avion présidentiel polonais - un Tupolev Tu-154 M - s'est crashé en Russie, samedi matin, près de Smolensk, alors qu'il s'apprêtait à atterir sur l'aéroport de Siewiernyk. L'accident n'a pas fait de survivants. Il y a 96 tués (bilan revu à la baisse après les premières estimations qui parlaient de 130 morts). Elles se rendaient à Katyn, pour rendre hommage aux milliers de prisonniers polonais exécutés il y a 70 ans, au printemps 1940.
Appareil politique et militaire décapité
Aucun survivant. Le président Lech Kaczinski et sa femme étaient à bord, entourés de nombreuses personnalités de premier plan de la République de Pologne : le vice-président de la Diète, Jerzy SZMAJDZINSKI, candidat aux présidentielles pour la gauche SLD, et l'autre vice-président de la Diète (PiS) Krzysztof PUTRA ; le président de la Banque centrale, Sławomir SKRZYPEK ; le vice-ministre de la Défense, Stanislaw KOMOROWSKI ; le secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères, Andrzej KREMER ; le président de l'Institut de la mémoire nationale, Janusz KURTYKA ; le dernier président du gouvernement polonais en exil (1990!), Ryszard KACZOROWSKI,ainsi que de nombreux députés ou sénateurs, des proches des victimes de Katyn ainsi que des anciens de Solidarnosc, comme Anna WALENTYNOWICZ (militante des chantiers navals).
Etat-Major décapité. Le président était aussi accompagné d'une centaine d'officiers, dont le chef d'Etat-Major, Franciszek GĄGOR (membre du comité militaire de l'UE) ; le chef de la sécurité nationale, Alkesander SZCZYGŁO ; le général commandant des forces armées en opération, Bronislaw KWIATKOWSKI ; le commandant de la force aérienne, Andrzej BŁASIK ; le commandant de la Force terrestre, Maj.-Gen. Tadeusz BUK ; le commmandant des forces spéciales, Maj.-Gen. Włodzimierz POTASIŃSKI ; le vice-amiral de la marine, Andrzej KARWETA ; le directeur du centre de formation, Gen. bryg. Brig. Kazimierz GILARSKI. C'est une partie de la direction de l'armée polonaise qui se trouve ainsi décapitée. Une armée déjà endeuillée par la catastrophe du Casa C-295M, en janvier 2008, qui avait fait 20 morts, dont plusieurs responsables de l'armée de l'air.
La liste définitive des personnalités disparues
Le Conseil des ministres polonais s'est réuni en urgence samedi. Les drapeaux officiels ont été descendus dans toutes les casernes et mis en berne ainsi sur tous les batiments officiels. Les sites webs gouvernementaux et publics portent le signe du deuil. Les journaux s'affichent en noir & blanc. L'émotion est intense en Pologne, on parle d'un "nouveau drame de Katyn" 70 ans après le massacre d'officiers polonais par les troupes soviétiques. Au niveau des autorités européennes, le secrétaire général de l'OTAN, Anders Fogh Rassmussen, a été un des premiers à exprimer ses condoléances. A 15h, l'Union européenne a publié un communiqué officiel (télécharger). Selon nos informations, Cathy Ashton, diplomate en chef de l'UE, qui devait se rendre en visite en Pologne ces jours prochains, a décidé - en accord avec les autorités polonaises de reporter sa visite. Les drapeaux des institutions européennes seront mis en berne lundi.
NB : Gazeta Wyborcza sort une édition spéciale sur l'accident de l'avion présidentiel à Smolensk: télécharger
Les causes de l'accident
La météo. La météo était mauvaise avec beaucoup de brouillard. L'avion présidentiel a tenté à plusieurs reprises d'atterrir (4 fois selon la radio polonaise). La quatrième a été fatale. L'avion, volant très bas, et aurait accroché des arbres à 300-400 mètres de la piste de l'aéroport, aurait pris feu et se se serait désintégré.
Mais pas uniquement. Selon les informations recueillies par le quotidien polonais Gazeta auprès des sources militaires, les services du contrôle aérien russe ont déconseillé à tous les avions d'atterrir, proposé de se dérouter sur Minsk. L'aéroport de Smolensk n'a pas de système de guidage des avions par temps de brouillard (c'est un ancien aéroport militaire qui n'est que depuis peu ouvert au trafic civil). Mais la tour de contrôle russe ne pouvait interdire à l'avion présidentiel polonais qui, pour une raison inconnue, a persisté à vouloir atterrir sur l'aéroport. Ainsi, 30 minutes avant l'accident, un avion militaire russe Il-76, qui transportait les fonctionnaires russes de la sécurité nationale, a fait demi-tour pour aller atterrir ailleurs.
Ce n'est pas la première fois qu'un Tu-154 a un accident : on recense une soixantaine d'incidents de vols dont plus d'une trentaine mortels pour cet appareil conçu dans les années 1960, mis en service dans les années 1970 et qui a été produit à près de 1000 exemplaires.
(crédits photo : armée polonaise, télévision russe, télévision polonaise)