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15 janvier 2010 5 15 /01 /janvier /2010 20:31
Réunion de crise aujourd'hui à la Commission européenne. Comme tous les jours depuis mercredi, et le début de la mobilisation internationale face au séisme à Haïti, il y avait réunion de crise à la Commission européenne. Autour de la table: les principaux responsables de la gestion de crise: les humanitaires (Echo), les développement (DG dev), les sécurités civile (MIC DG Environnement), l'Etat major civil (CPCC Klompenhouwer) et militaire de l'UE (général Leakey), Etc. Objectif : faire le point de la situation, recenser les moyens et activer si nécessaire d'autres (1). Cette réunion est cependant un peu plus solennelle que les précédentes puisqu'était présente Catherine Ashton, la haute représentante de l'UE pour les Affaires étrangères.
HaitiReunionCriseChacon-Esp100125.jpgDans tous les pays les réunions de crise se succèdent, ici Carme Chacon la ministre espagnole de la défense, en réunion avec les responsables de l'Unité militaire d'urgence (UME) qui partent sur place. (crédit photo : ministerio de Defensa) (2)

Pas de nécessité d'un battle group. « Pour l'instant — résume un des participants — nous en sommes plutôt aux moyens de l'aide humanitaire (ECHO) et la  ensuite. L'option "Battlegroup" n'a pas été écartée. Mais elle n'est pas envisagée en l'état. Il en est de même d'une éventuelle mission de police ». Les conditions ne sont pas encore remplies (notamment l'invitation par l'Etat membre, préalable nécessaire à toute opération civile de défense).  « La priorité immédiate des opérations - explique-t-on à la Commission dans un communiqué à la presse - a été de livrer l'équipement nécessaire à l'enlèvement des débris, de répartir les équipes de recherche et de sauvetage ainsi que de fournir les secours d'urgence, l'eau, les hôpitaux de terrain, les tentes, les moyens de communication et les denrées alimentaires. » L'UE a cependant « indiqué également qu'elle est prête à apporter toute autre aide nécessaire dans d'autres secteurs. » Une phrase, explique un proche du dossier, qui signifie que "toutes les autres options (comme les missions de défense) sont envisagées". Mais à vrai dire, pour l'instant, l'attention de la diplomate en chef de l'UE se porte surtout sur la reconstruction. Catherine Ashton, qui répondait à la presse, hier, l'a d'ailleurs dit expressement l'aide européenne est menée « en étroite coordination avec les Nations-Unies. Et, pour l’instant, on ne nous a pas demandé de militaires sur place. ».

Priorité à la reconstruction. Lundi, est convoqué à Bruxelles, un conseil exceptionnel des ministres du Développement, pour faire le point sur les mesures à court terme. Cette réunion permettra, surtout d'envisager la deuxième phase : les efforts de reconstruction. Il sera présidé par Catherine Ashton (avec le concours du ministre Espagnole). Ce sera, en fait, son baptême du feu en quelque sorte en tant que président du Conseil des ministres. La Commission européenne sera représentée par Karel de Gucht, l'actuel commissaire au Développement.  

Commentaire : le baptême du feu d'Ashton. Haïti est ainsi la première crise internationale où le nouveau dispositif de l'UE - voulu par les 27 et écrit dans le Traité de Lisbonne - se met en place. Les différents services de l'action extérieure (humanitaire, développement, militaire, gestion de crises) se réunissent et se coordonnent sous l'autorité d'une seule personne.

(1) Une équipe de coordination est présente à Haïti, composée de sept personnes (Un Français en chef d'équipe assisté d'un Italien, Espagnol, Autrichien, Estonien, Britannique et un officier de liaison de la MIC)

(2) Il n'y a pas de photos disponibles de la réunion européenne
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15 janvier 2010 5 15 /01 /janvier /2010 08:05
HaitiRapatriementCasa2@Fr100115Cela peut paraître incongru qu'un groupement tactique militaire parte dans une opération de catastrophe naturelle. Certains esthètes pourront m'assurer que cela ne ressort pas des missions type d'un battlegroup ? Oui sans doute. Mais il faut faire preuve de souplesse. C'est le sens des dernières décisions prises à la fin de présidence suédoise (lire : Des battlegroups (un peu) plus souples d'emploi).

Il y a une situation très spécifique à Haïti. Avec le séisme, l'Etat est touché au coeur : plusieurs ministres sont morts, ainsi que de nombreux fonctionnaires ; des édifices publics se sont effrondrés à commencer par les hôpitaux. L'opération de secours et d'aide humanitaire devrait donc s'accompagner d'une mission de soutien à l'Etat (mission très proche d'une mission d'Etat de droit) et de soutien au maintien de l'ordre. Une mission limitée dans le temps (quelques semaines) et à portée d'avions (ce qui répond à certains des critères d'intervention d'un battle group)
. Une mission urgente ! A Catherine Ashton, la haute représentante de l'UE aux affaires étrangères et à Carme Chacon, la ministre espagnole de la Défense, de faire preuve de décision.

Que pourrait faire un battlegroup de l'UE ? Faire de l'aide humanitaire directement n'est pas du ressort des militaires, mais il y a de nombreuses missions de soutien à accomplir. Le premier objectif du battlegroup pourrait être de mettre à disposition ses moyens aéroportés (avions, hélicoptères ...) ainsi que médicaux (poste médical avancé...). Le deuxième sera de pouvoir assurer la protection des sauveteurs, ONGs, points de distribution, centres de soins et hôpitaux...  Dans une situation où les besoins primaires ne sont pas assurés et où l'ordre peut basculer dans le chaos en un rien de temps (Haïti n'a pas été épargné ces dernières années par les émeutes de la faim). Le troisième objectif sera de prêter assistance à l'Etat haïtien dans ses fonctions régaliennes. Enfin le battlegroup pourra assurer l'évacuation des Européens (ce qui est, là, une des fonctions structurelles d'un battlegroup)... Bref le travail ne manque pas.

Qui peut partir ? Ce semestre ce sont le battlegroup anglo-néerlandais et le battlegroup "central" (
Pologne, Allemagne, Lettonie, Lituanie, Slovaquie) qui sont de permanence. Mais auront-ils la volonté politique d'intervenir ? Et le sens de l'adaptation nécessaire ? Il faudra sans doute un peu d'innovation pour adapter dans l'urgence les missions du Battlegroup aux missions classiques...

Pourquoi partir ? Quand on voit la mobilisation américaine intense, les Européens ne peuvent rester les bras ballants avec leurs moyens classiques d'intervention (l'argent et le matériel). Il faut un corps constitué, organisé, prêt à intervenir, pour des missions mixtes entre le soutien aux actions humanitaires, le maintien de l'ordre et le soutien à l'Etat de droit. Les forces de l'ONU, un temps désorganisées, auront certainement besoin d'un renfort organisé et opérationnel rapidement, ce qui donne un cadre de légalité internationale à l'intervention du battlegroup. Le Traité de Lisbonne donne un nouveau cadre d'intervention : les clauses de solidarité, d'assistance mutuelles ainsi qu'une nouvelle compétence : la sécurité civile à la Commission européenne. Last but not least, cette mission limitée dans le temps ne pèserait pas trop en termes de baisse de capacité (et au niveau budgétaire). Elle constituerait également pour Catherine Ashton la haute représentante, une opportunité de montrer ses réelles capacités.

Un envoyé spécial de l'UE ? Indépendamment de cet envoi de troupes, l'UE devrait, à mon sens, étudier également la nomination d'un envoyé spécial
chargé de coordonner toute l'aide européenne à la fois au niveau humanitaire, mais aussi l'action politique, et le soutien à l'Etat haïtien.

(crédit photo : ministère français de la Défense/DICOD - rapatriement d'un blessé aux Antilles par un Casa de l'armée de l'air)
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14 janvier 2010 4 14 /01 /janvier /2010 23:25

C’est un sujet qu’on ne peut laisser de côté. Michel Barnier, qui a en son temps présidé le groupe de travail de la Convention européenne, est bien décidé à garder un œil sur l’évolution de l’Europe de la Défense. Il l'a confirmé lors de son audition au Parlement européen et ensuite de façon plus informelle.

Autonomie de la politique de défense. En tant que commissaire au marché intérieur, il aura la charge de faire appliquer la directive sur les marchés publics de défense. Et il entend bien faire usage de ce droit : « Nous ne sommes pas condamnés à être un sous traitant de la Chine ou des Etats-Unis, à être sous influence » a-t-il expliqué. « Avoir une politique étrangère et de défense est nécessaire.»

Les offets. Interrogé par un député, il a aussi condamné sans détour les procédés de compensations dits offsets. « Les offsets sont contraires au Traité et préservent la discrimination. Pourquoi se priver de la mise en concurrence pour les marchés publics. » « Tout en respectant la sensibilité qu'ont certains pays pour ce sujet, il faut mettre fin à ces pratiques » a-t-il conclu.

La défense un sujet à suivre. En devisant à la sortie de l'audition, le commissaire a confirmé qu'il entendait s'intéresser, de façon générale, à la politique de défense, et pas uniquement sous l'angle du marché intérieur. Je suis un commissaire membre du collège et peut donc m'intéresser à tous les sujets qui viennent sur la table. Et naturellement je suivrai la politique de défense avec une attention particulière.

 

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14 janvier 2010 4 14 /01 /janvier /2010 22:33
Rumiana Jeleva, la commissaire bulgare, pressentie pour prendre en charge l'Aide humanitaire et la réponse de crises continue d'être sur la sellette. La question ne semble plus être de savoir si elle part. Mais comment elle part et en compagnie de qui ? Même si la Commission Barroso II paraît assurée de son avenir, la crise est là et mine toutes les discussions.

Retour sur les derniers évènements.

- mardi, immédiatement après l'audition Jeleva se réfugie dans un salon VIP où, apparemment, elle s'effrondre moralement. En pleurs, elle explique qu'elle arrête tout et démissionne. Joseph Daul, le Français qui préside le PPE, la dissuade.

- mardi - mercredi, les coordinateurs de la commission développement se réunissent pour définir une demande précise : clarification du service juridique sur la valeur de la déclaration d'intérêts, niveau insuffisant de la commissaire

- mercredi, la contre-offensive des Chrétiens-démocrates du PPE se met en place. Tout d'abord, retarder au maximum toute prise de décision. Ensuite, tenter de prendre en otage un socialiste pour permettre un échange ou au moins une sortie honorable. La cible porte d'abord sur Ashton, trop haut, impossible d'autant qu'un avis passable a été donné. Ensuite, les regards se portent sur Sefcovic, le commissaire slovaque, une déclaration plutôt maladroite datant de 2005 sur les Roms et le fait qu'ils profitent du système social slovaque est porté en exergue. Un peu léger. On attend le prochain coup.

Jeudi, la situation s'envenime.

- Les
PPE boys insistent lourdement sur Sefcovic, envoyant toutes les 3 heures un communiqué de presse. Les S&D répliquent en estimant que plusieurs commissaires n'ont pas réussi leur examen de passage (outre Jeleva, le PPE Semeta et le libéral Rehn).

- A Sofia, le gouvernement tergiverse. D'abord il semble y avoir un plan B, Nikolai Mladenov, l'actuel ministre de la Défense, et ancien eurodéputé. "C'est le seul" aurait-il affirmé. Puis le Premier ministre se ravise et réaffirme qu'il n'a qu'un candidat, Jeleva. Mais il confie dans une interview à la télévision nationale que "there is nothing tragic if a commissioner is not endorsed, it is tragic that the previous government failed to construct our highways." ! Au passage, il accuse les socialistes et libéraux du Parlement européen d'en vouloir à la Bulgarie. Réplique des uns et des autres. La tension monte d'un cran supplémentaire : cette fois entre les eurodéputés et le Premier ministre bulgare.

- Cela prend une tournure de pugilat général. Et pour ceux qui ont connu (comme moi) une situation identique il y a cinq ans, avec l'affaire Buttiglione (1), à force de tergiverser, la Commission Barroso II semble prendre le même chemin que la Commission Barroso I avec l'affaire Buttiglione.

- Le président du Parlement européen Buzek signe, enfin, la lettre du Parlement à Barroso reprenant certains argumentaires de la Commission développement : 1° y-a-t-il dans les déclarations de la commissaire bulgare quelque chose de contraire au code de conduite des commissaires ? 2° Barroso est-il d'avis qu'elle a les compétences pour exercer les fonctions de commissaire à l'aide humanitaire et à la réponse de crises ?

- Jeleva n'a toujours pas été confirmée. Et plus les heures passent, plus c'est difficile. Même si un journal européen New Europe a publié une traduction (en anglais) de documents officiels bulgares qui tendent à clarifier la situation. Une deuxième audition de Jeleva pourrait être organisée. Martin Schulz, le leader S&D, explique qu'elle pourrait être "pire que la première".

- Du coté de José-Manuel Barroso, ce n'est pas le fait de maintenir Me Jeleva qui est en question. Mais par qui la remplacer. La proposition bulgare de N. Mladenov a plusieurs inconvénients dont celui d'avoir un homme de plus dans la Commission. Il faut aussi "sauver" la tête au PPE. Et avoir une espèce d'équilibre...

NB : L'avis du service juridique devrait être connu lundi. De même les coordinateurs de la commission développement du Parlement européen, responsables de l'audition de Me Jeleva se réunissent aussi lundi. Ce qui donne un peu plus de temps à la négociation politique.


(1) Il y a cinq ans : Le commissaire italien Buttiglione pressenti pour le poste de la Justice avait fait une déclaration inappropriée sur les homosexuels. Il ne s'était pas vraiment excusé. L'affaire avait monté. Et le Parlement voulait qu'un autre portefeuille lui soit attribué. Le gouvernement italien refusa, malgré la demande de J.-M. Barroso. Celui-ci tenta de sauver la mise en mettant en place un comité de commissaires autour de l'Italien chargé des Droits fondamentaux. Insuffisant, et trop tard. C'était le changement même du commissaire italien qui était nécessaire. Et même plus. Au fil des heures, l'adoubement de la Commission semblait être compromis. Il ne tenait en fait plus qu'à un fil: l'extrême droite. Martinez (Front national) donnait le baiser de la mort à la Commission en annonçant qu'il le soutiendrait. A la dernière minute, Barroso retirait la composition du collège puis le remaniait. Frattini remplaçait Buttiglione. Un autre commissaire était changé, la lettone Udre par Piebalgs (le gouvernement letton ayant été moins tetu que l'Italien, cela avait été moins médiatisé). Et le commissaire hongrois Kovacs, avait changé de portefeuille (avec Piebalgs, énergie contre fiscalité). Mais on n'a retenu que "l'affaire Buttiglione".
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14 janvier 2010 4 14 /01 /janvier /2010 19:42

Mitchell plus européen qu’Ashton. Le sénateur George Mitchell – l'envoyé spécial américain pour le Proche Orient – était au Parlement européen, mercredi, pour une rencontre informelle et discrète avec plusieurs députés européens spécialistes du sujet (les coordinateurs des principaux groupes et des délégations concernées). Un entretien qui a duré une heure. Mais le message de Mitchell était clair : les Américains « veulent travailler avec l'UE sur le Moyen-Orient ». « Nous ne pouvons pas faire cavalier seul » a-t-il expliqué, demandant ainsi aux Européens de s’impliquer.

La levée partielle du blocus sur Gaza. Sur Israël et la Palestine, le message des Américains semblait plus engagé. Bien entendu la « volonté de relancer » le processus de Paix est réaffirmée. La question de la paix au Proche-Orient ne concerne pas que les Israéliens et Palestiniens, « elle nous concerne aussi » a-t-il assuré. Mais sur Gaza, le message de Mitchell a été particulièrement ferme, m'ont expliqué des eurodéputés, appelant à la levée du blocus. « Le passage des frontières doit être assuré. Ce n'est pas une question politique, c'est une question de vie pour la population ». Mitchell a ainsi confirmé que les USA avaient débloqué 900 millions $ dont 58% (au prorata) consacrés à Gaza. Ce qui est un signe évident d'ouverture. « La reconstruction de Gaza doit être une priorité » a-t-il rappelé, en même temps que la nécessité d'assurer la sécurité d'Israël. Ce qui sous-entend clairement un changement de position puisque aujourd’hui les matériaux de construction sont interdits d’entrée dans la bande de Gaza.

 

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12 janvier 2010 2 12 /01 /janvier /2010 21:51
Finalement on a "pitié d'elle", c'est la phrase qui revenait le plus souvent dans la bouche des eurodéputés à la sortie de la salle. Ce qui au niveau politique signifie "halte au feu". (crédit photo : European Parliament/Pietro Naj-Oleari)

JelevaHearing-PE100113.jpgL'audition de Rumiana Jeleva, commissaire désigné à l'aide humanitaire et la réponse de crises (qui fait également partie du "team" d'Ashton) a, en effet, tourné au hallali. La Bulgare s'est enferrée dans une position indéfendable : 1) traiter de haut les députés qui lui demandaient des explications sur sa déclaration d'intérêts, souvent gentiment ; 2) croire que sa parole, sa bonne foi et son honnêteté suffiront et renvoyer les détails à plus tard ; 3) donner à la presse les réponses qu'elle a refusées aux députés. Résultat : un sentiment très général parmi les députés d'un ratage complet. La députée française Corinne Lepage (Modem), confie sa « gêne évidente sur la question des déclarations d'intérêt jointe a une compétence assez légère....». Elle n'est pas la seule. Peu la défendent, même au PPE, son groupe politique au Parlement européen...

Témoin du problème, la réunion entre coordinateurs a duré longtemps, plus longtemps que de coutume. Avec aucun avis donné. Les députés veulent, avant tout, une "clarification", la plus rapide possible, avant de se prononcer et se tournent vers le président de la Commission. « José-Manuel Barroso doit nous donner des éléments très rapidement, dans les 24 heures. On ne peut pas laisser pourrir la situation » confie Goerens, le coordinateur libéral luxembourgeois, à l'issue de l'audition, à quelques journalistes. Mais le mal semble être fait. Et, déjà, s'envisagent des hypothèses de rechange. La question est sur toutes les lèvres : qui pourrait remplacer Jeleva en cas de défection, si le Parlement européen décide de pousser son avantage? Parmi d'autres, le nom de Nikolaï Mladenov, ministre de la défense et ancien eurodéputé, est évoqué. A moins que le président Barroso n'apporte une preuve irréfutable. 

Retour sur une séance mouvementée, ou comment rater son audition...

Un bon début...

Pourtant l'audition avait bien commencé, avec une déclaration politique initiale, bien préparée, bien balancée, et applaudie par les eurodéputés.


Aide humanitaire : faire un distinguo avec le militaire. Dans une déclaration lue, avec conviction, Jeleva s'affirme défenseure du droit international humanitaire et des "acteurs humanitaires", pour qu'ils soient « en situation de travailler », affirme-t-elle,  alors que certains gouvernements « nient les besoins humanitaires ». Elle poursuit en  vouloir faire un « distinguo clair entre activités humanitaires et militaires. Car de plus en plus souvent il y a des acteurs militaires qui font certaines actions sur le terrain pour gagner le coeur de la population (...) Il faut
faire une différence entre les activités qui entretiennent certaines illusions. Car le risque est que les humanitaires soient la cible d'attaques. Il faut protéger les acteurs humanitaires sur le terrain ».

Une ambition sur la sécurité civile. Jeleva affirmait son ambition sur le dossier de la réponse de crises, la sécurité civile. « Je vais partir
du document Barnier de 2006, document qui prévoit un certain nombre d'actions » et estimant que l'Union européenne a une « valeur ajoutée » à apporter, en voulant « moderniser le mécanisme de protection civile, affirmant vouloir un QG et un centre opérationnel capable de coordonner l'aide en temps de crise pour les citoyens de l'UE, une approche globale venant de la prévention à la reconstruction ». Elle affirme, enfin, vouloir présenter une proposition sur un corps d'intervention civil européen.

Mais arrive une question prise de haut, de trop haut

La question était attendue, voire très attendue. Plusieurs rumeurs circulaient dans les rangs du parlementaires. Le point le plus sensible concernait sa déclaration d'intérêts, qui ne mentionnait pas sa qualité de propriétaire d'une société "Global Consult" mais seulement de "manager" alors que le registre du commerce montrerait (selon plusieurs députés) indiquait qu'elle était "manager et propriétaire" jusqu'en 2009 (avec des documents à l'appui qui le prouvent semble-t-il). Aussi Filip Kaczmarek, un député du PPE décide de vider l'abcès, répétant la question :
« Y-a-t-il des intérêts qui n'auraient pas été déclarés ? Auriez-vous quelque chose à ajouter ? » La commissaire répond, assez hautaine, très détachée : « En général, je ne réagis pas aux rumeurs colportées par la presse, portant sur ma vie privée. Nous sommes ici pour parler de choses sérieuses : aide humanitaire et réponse à la crise. (...) Je ne veux rien cacher. Toutes les rumeurs à mon égard et l'égard de mon époux sont totalement infondées ». C'est tout ! C'est peu. Première erreur. La future commissaire ne semble pas avoir compris que les questions de conflit d'intérêt ne sont pas des questions privées mais des questions publiques. Et que devant le Parlement européen, il est inutile de finasser avec le style "langue de bois", habituellement utile pour contourner les difficultés. Les députés européens à tour de rôle répètent donc la question.

Certains députés bulgares, socialistes et libéraux, sont bien décidés à régler leur compte avec la commissaire désignée (qui appartient au parti opposé, GERB, chrétien-démocrate). La députée libérale Parvanova - mise en cause directement par la commissaire (2e erreur) - insiste donc : « nous avons une législation en Bulgarie. Et les députés ne peuvent prendre cette position ». Jeleva dédaigne ce qui lui semble être une attaque partisane « Je ne suis pas juriste. J'ai un dossier avec toute la documentation nécessaire. Et cette documentation est conforme à la législation bulgare. Je demanderai à vos collaborateurs de vous les distribuer. » explique-t-elle. « J'espère que la commission va continuer à s'occuper de problèmes qui nous préoccupent. Cette société ne fonctionne plus depuis longtemps. Et cela a été déclaré. Je peux le prouver, documents à l'appui. Je ne pense pas nécessaire de répéter, répéter. Je vous demande de vous en tenir aux documents. » Et elle ajoute : « Si j'avais enfreint la législation, les autorités bulgares se seraient saisis de la question. Les institutions financières, les tribunaux de mon pays fonctionnent. Ils sont là pour statuer sur la véracité des documents. » 3e erreur : la Bulgarie est actuellement sous surveillance étroite pour son mauvais fonctionnement de la justice. Se prévaloir d'une absence de jugement est peu crédible... Il n'y a désormais plus seulement quelques députés à avoir des doutes. La déclaration de la commissaire n'a convaincu personne. Sa volonté d'enfouir le problème, de le reporter à plus tard soulève le soupçon et éveille la curiosité...

... et çà dérape


Le débat continue. Alors que le coordinateur du PPE tente de défendre "sa" commissaire, des documents sont distribués dans les travées des députés. Un point d'ordre est approuvé. Eva Joly demande aux huissiers de récupérer ces documents et renvoie à la réunion des coordinateurs pour arbitrer sur ce point. Mais le mal est fait... La commissaire paie "cash" son imprévoyance. Elle devient de plus en plus déstabilisée au fil de l'audition.

Les erreurs, les à-peu-près se succèdent. A une question sur l'aide humanitaire dans le Golfe d'Aden, elle se montre "prête à aller sur place..." sans mesurer qu'il s'agit de la Somalie, dont on parle, un Etat déliquescent, où le moindre occidental est aussitôt considéré comme une proie à ravir ou ... à tuer. A une autre question sur le Congo, et le rôle joué par les militaires dans le désastre humanitaire, elle avoue ne pas connaître la situation (alors que le Congo constitue un des plus lieux d'intervention de l'aide humanitaire européenne). Etc...Manifestement, Jeleva n'est plus dans la salle, et convaincue elle-même qu'elle ne sera pas confirmée.

Devant la situation, et l'atmosphère plus que lourde, quelques députés ont d'ailleurs écourté, voire renoncé à leur temps de parole, pour écouter le supplice.
"On a pitié pour elle" lâche une députée. C'est épuisée que Jeleva termine l'audition. Seuls un ou deux collègues, compatissants, viennent la réconforter, un peu comme on réconforte quelqu'un après un décès. La sortie de la salle s'effectue dans un silence plutôt lugubre. Chacun est conscient qu'il ne faut pas en faire plus. On sent Jeleva de plus au bord de la crise nerveuse, prête à craquer.

Dernière erreur : dire à la presse ce qu'on n'a pas voulu dire aux députés...

Jeleva doit encore se plier à l'exercice de questions-réponses devant la presse : limitée à deux questions. Elle ne veut pas y aller. Mais s'y force. A un collègue autrichien qui l'interroge sur ses intérêts passés, Jeleva lâche : « Oui » elle a bien « revendu (ses parts) dans sa société en 2009 ». Pour combien ? « Elle ne sait plus ». Ce qui prouve qu'elle était propriétaire de la société. Un point qu'elle n'a pas vraiment précisé aux députés qui seront heureux d'apprendre ainsi par la presse des réponses qu'ils n'ont pu obtenir...
Dernière erreur !

Jeleva s'en va. Elle se réfugie dans un bureau VIP pour une longue conversation avec l'ambassadeur bulgare à Bruxelles.
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12 janvier 2010 2 12 /01 /janvier /2010 21:00
Image 2-copie-1Lors de son audition, Catherine Ashton, la haute représentante aux Affaires étrangères, a légèrement éclairci sa future politique à la tête du service d'action extérieure et comme coordinateur du pôle "extérieur" à la Commission. Elle y a été plus précise que sur la politique de défense.

Priorité n°1 : mettre sur pied le service extérieur

Une occasion unique en une génération. Le service extérieur n'est pas "un simple exercice bureaucratique" a-t-elle assuré. C'est "un outil qui rassemble tous les éléments de notre engagement - politique, économique et militaire - pour mettre en œuvre une stratégie cohérente". Ce sera bien différent de ce que peuvent faire les ministères » a-t-elle estimé. Mais c'est "une occasion qui ne se présente qu'une fois en une génération" a-t-elle ajouté.

Un statut sui generis. « Nous avons deux options : au sein de la Commission, ou sui generis. Atitre personnel, je penche pour un statut "sui generis" ». Ce qui rejoint d'une certaine façon les opinions des eurodéputés. Le Parlement européen sera, de toute façon, consulté tout au long du processus, « avant la décision du Conseil en avril », a-t-elle précisé.

Total contrôle du Parlement sur le budget. Ashton a aussi rendu les armes au Parlement, estimant que le SEAE "ferait l'objet d'un droit de regard complet de la part du Parlement".

Mais pas d'audition des ambassdeurs de l'UE par le Parlement.
« Ambassadeurs ou chefs de délégation, appelez-les comme vous voulez », cela doit rester de ma compétence seule, a souligné Ashton. "Je ne suis pas convaincue par l'idée que des auditions doivent être organisées pour les plus hauts postes", a-t-elle expliqué répondant ainsi à la libérale belge Annemie Neyts. « Ce qui est important, c'est d'avoir une procédure de nomination, transparente ».
NB : cette position est parfaitement légitime pour les
ambassadeurs ou chefs de délégation. Si le Parlement européen commence à organiser des auditions à chaque nomination d'ambassadeur, cela semble difficile à justifier, peu d'Etats européens procédant ainsi (aucun à ma connaissance). En revanche, pour les représentants spéciaux, qui sont comme leur nom l'indique "spéciaux", en nombre beaucoup plus restreint, et surtout dont la présence et le rôle sont définis par le Traité européen, l'audition par la commission compétente du Parlement européen peut se justifier.

Mon rôle : discuter dans l'ombre

Fédérer, pas opposer. Au niveau de l'Union, Catherine Ashton définit ainsi son rôle : non « pas l'opposition. Mais plutôt fédérer les énergies, les volontés pour travailler ensemble ».  La recherche du résultat, du consensus, sont des mots qui reviennent souvent dans sa bouche de même que la discrétion, la discussion.

Discuter discrètement, leitmotiv. Manifestement
Ashton préfère d'ailleurs l'ombre à la lumière. « Diplomatie tranquille, cela ne veut pas dire que je suis tranquille. Mais quand je discute avec des personnes discrètement, cela permet souvent d'atteindre mieux ses objectifs. Et cela permet à d’autres de prendre le crédit d’idées qui lui sont suggérées. Parfois sortir en public ne permet pas d’atteindre un résultat. Il faut trouver la démarche efficace selon le pays avec qui nous discutons. »

Commissaire et haut représentant, un distinguo subtil. « Je serai commissaire quand je viendrai vous présenter les dossiers de la Commission. Je serai le représentant du Conseil quand je viendrai rendre compte des débats au Conseil. » « Maintenant - a-t-elle reconnu - il faudra d'un point de vue logistique régler la question », reconnaissant ainsi que le distinguo n'était pas facile à opérer

Conduire les autres commissaires dans le bon chemin. Le traité "est très clair", Ashton a "autorité" sur les autres commissaires. « A moi de créer le cadre stratégique, cela relève de ma compétence, et de demander à la Commission de me rejoindre" explique-t-elle. Pour autant l'autonomie de chacun sera préservée : "Je travaillerais avec un groupe de commissaires avec une division du travail claire qui mettrait notamment l'accent sur la mise en œuvre comme en matière de développement par exemple".

Une diplomate unilingue


Au niveau linguistique, on a pu constaté que Catherine Ashton n'a fait aucun effort. Même pas un petit mot en Français, en Allemand, en Espagnol ou en Polonais. Rien Nada. Anglais, anglais, anglais, de bout en bout. Un "sérieux" problème pour un diplomate en chef, ont estimé, après coup, plusieurs députés. Mais aucun d'entre eux n'a eu la présence d'esprit de lui demander pourquoi...
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12 janvier 2010 2 12 /01 /janvier /2010 02:06
Si Catherine Ashton, la haute représentante aux Affaires étrangères, a globalement bien passé la rampe de son grand oral auprès des députés européens ; en revanche, sur l'Europe de la Défense, cela ressemble plutôt à un désastre. Le "net progrès", constaté en général, ne l'est pas sur ce sujet. Un signe ?

A moins d'être un tory britannique, je n'ai trouvé aucun élu, spécialiste de ce dossier, qui n'ait pas été "étonné", "déçu", "alarmé", "catastrophé" par les réponses d'Ashton sur la question, son manque de connaissance et surtout d'appétence du sujet. En fait, à bien écouter Catherine Ashton, l'Europe de la Défense, ce sont avant tout les Etats-membres et, surtout, l'Otan et les Etats-Unis ! Une vision très british (1), en fait, de l'Europe de la Défense, qui ne me semble plus très adaptée aujourd'hui aux nouveaux enjeux mondiaux.

Une pensée guidée par le tropisme transatlantique. A plusieurs reprises, Catherine Ashton a ainsi mis en avant l'OTAN quand on lui parlait politique étrangère ou politique de sécurité et de défense commune.
« L'Afghanistan, le Pakistan, l'Iran, le Moyen-Orient, la Somalie, le Yemen sont clairement mes top priorités » a-t-elle précisé. Un catalogue très américain peut-on juger. Ni le Congo, ni le Tchad ou le Soudan, ni la Géorgie ou la Transnistrie, pourtant enjeux tout aussi importants pour l'Europe, ne sont cités, etc. Et d'ajouter comme preuve de son activité : « J’ai participé à la réunion de l’Otan qui m’a permis de rencontrer Rasmussen. Je dois me rendre à Washington pour rencontrer Hillary Clinton » (une référence qu'elle reprend plusieurs fois). Quant à Richard Holbrooke (2), il semble être devenu son mentor : elle s'est entretenue « à plusieurs reprises » avec lui au téléphone. Ce tropisme otanien et américain peut se comprendre. Il fallait donner quelques gages aux opposants tories et Ukip qui l'accusaient d'être à la solde de Moscou pour avoir milité - il y a 28 ans ! - à la CND, une organisation contre le désarmement. Et, après tout, Ashton est britannique jusqu'au bout des ongles (3). Elle reste toujours convaincue de l'efficacité de l'intervention en Irak (et l'a affirmé). Mais cela ne justifie pas pour autant une espèce de prudence voire de méfiance vis-à-vis de l'Europe de la défense.

L'OTAN a réponse à tout, Ashton n'a réponse à rien ...
Sur toutes sortes de questions, au lieu de mettre en avant les possibles développements de l'Europe de la défense, Catherine Ashton a paru promouvoir davantage la nécessité d'un « partenariat pragmatique (stratégique) avec l’OTAN » et la nécessité de renforcer le lien transatlantique. Ainsi à la question sur l'avenir de l'Agence européenne de défense et son rôle pour renforcer l'industrie européenne de défense, Catherine Ashton a répondu qu'il ne s'agissait pas de « retirer des tâches aux Etats membres ». Il y a également des compétences d’éducation et de recherche à la Commission européenne » a-t-elle ajouté. Et d'ajouter illico « qu'elle souhaitait développer des relations avec l’Otan et avec son secrétaire général pour voir comment aller de l’avant ». Ce n'était pas la question ! Sur l'existence d'un QG militaire européen ? cela a été encore plus clair: « elle n'en est pas convaincue ». Pourquoi ? La défense « c'est aussi le travail des Etats membres ». Et de préciser ensuite, citant l'exemple de l'opération anti-piraterie Atalanta dans l'Océan indien, « le QG à Northwood fonctionne bien ». Sur l'opération de formation des soldats somalis, elle n'a pas voulu se prononcer, préférant expliquer qu'il fallait « développer le pays »...

Une inculture de défense
. En matière de politique de défense, l'audition d'Ashton a aussi été un festival d'inculture. Sur le Livre blanc sur la défense, elle a affirmé qu'elle n'était pas au courant et se renseignerait !. Idem pour la présence au Conseil de sécurité de l'ONU, « vous m'avez pris par surprise, je ne sais pas » argue-t-elle. « pour être sincère, depuis 5 semaines que je suis nommée, je n'y ai même pas pensée » Décoiffant ! Son questionneur, Mauro, un PPE Italien lui répond d'ailleurs, dans sa barbe : « la prochaine fois je vous demanderai le nom de votre coiffeur ! ». Sur la clause de solidarité et d'assistance mutuelle, pas de réponse
. Sur le rôle de l'UE en Transnistrie, l'extension du mandat de l'opération antipiraterie Atalanta à la pêche illégale, idem, elle ne répond pas. Etc...

Au final, on ne peut que partager ce sentiment de quelques députés : de « graves lacunes »
, voire une sérieuse « inquiétude » sur sa volonté réelle d'avancer sur la PeSDC.

(1) Ce n'est pas un hasard si son chef de cabinet, James Morrison, est issu directement du Foreign office. Il a officé notamment à la Représentation permanente du Royaume-Uni à Bruxelles durant la dernière présidence britannique (2005) comme responsable du team présidence en charge des questions également de l'Asie, de l'ONU et du G8.

(2) Holbrooke, ambassadeur à l'ONU de 1999 à 2001, fut un des négociateurs du plan de paix de Dayton sur la Bosnie (1995). Il a été nommé par l'administration Obama, en janvier 2009, envoyé spécial pour l'Afghanistan et le Pakistan
.

(3) Ce rôle est confié, noir sur blanc, au Haut représentant dans le Traité. Lire:
le rôle du Haut représentant, d'après le Traité de Lisbonne
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11 janvier 2010 1 11 /01 /janvier /2010 23:01
Iran, la Bosnie-Herzégovine, la Somalie et (éventuellement) Afghanistan/Pakistan, Yemen et Ukraine figurent à l'agenda du premier Conseil des Affaires étrangères de l'année, le 25 janvier, premier également à être présidé par la Haute représentante des affaires étrangères de l'UE, Catherine Ashton. Un dialogue politique avec la Serbie est programmé le lendemain, le 26 janvier (ainsi qu'avec le Cap Verde et l'OSCE).

Pour le reste, dans son traditionnel agenda des Conseils de ministres, remis au début de chaque semestre aux diplomates européens, la présidence espagnole de l'UE n'a... rien prévu ! Et pour cause : l'agenda est désormais fixé par la Haute représentante. On attend que celle-ci reprenne la programmation semestrielle, voire pluri-mensuelles. Cinq autres réunions sont programmées : le 22 février, le 22 mars, le 26 avril, le 10 mai (conseil jumbo avec les Ministres de la Défense), le 14 juin.

Coté élargissement, la présidence espagnole qui "garde la main" a prévu : une première conférence intergouvernementale sur l'adhésion de l'Islande le 23 février, un conseil d'association et de stabilisation avec la Croatie, le 23 mars, un conseil d'association avec la Turquie le 11 mai, ainsi qu'une conférence intergouvernementale sur l'Islande, la Turquie, la Croatie voire Fyrom (Macédoine) le 15 juin. Ces réunions se déroulent en marge du Conseil des Affaires générales qui réunit, normalement, le
s ministres des affaires européennes.

A noter également : l'adoption de conclusions sur la politique maritime intégrée - sujet important - prévue pour le 22 février.
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11 janvier 2010 1 11 /01 /janvier /2010 22:00
Les coordinateurs "affaires étrangères" réunis autour du président de la commission des Affaires étrangères, Albertini, devraient, dans leur ensemble, décerner ce soir un "satisfecit" à Catherine Ashton, pressentie pour être la vice-présidente de la Commission chargée des Affaires étrangères (et Haut représentant aux Affaires étrangères). Les responsables des principaux groupes (PPE, PSE, Libéraux) sont d'accord sur ce point. Après son audition par le Parlement européen, ce lundi après-midi, la Britannique a rempli les critères suffisants et donné des gages sérieux pour ses nouvelles fonctions. Les sceptiques de Ashton sont minoritaires ou doivent se taire (solidarité de groupe oblige)...
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Honorable... sans mention. Lors de son audition Catherine Ashton sans être enthousiasmante n'a, en effet, commis aucun impair. Mieux ! Sur certains dossiers (Iran, Moyen-Orient, prévention des conflits, désarmement...), elle a montré qu'en quelques semaines (1), elle avait pu appréhendé suffisamment le contenu de ceux-ci pour être assez crédible (post à suivre). Très tendue au départ, mélangeant ses papiers, oubliant des questions, ne sachant pas vers qui se tourner pour répondre, elle a pris peu à peu d'assurance, au point de se détendre dans la dernière heure de l'audition, et dans les dernières 15 minutes se laisser aller à plaisanter avec les eurodéputés, en se moquant un peu d'elle-même. « Je sais, ce n'est pas facile de répondre par oui ou non ». Je serai plus réservé voire très réservé sur son positionnement dans le domaine de l'Europe de la défense (lire plus loin : la vision très british de Catherine Ashton).

L'Edith Piaf de la Commission. En fait, le mérite de "la détente" revient à un de ses adversaires (les plus farouches ?), William Darmouth (Ukip) qui à la 148e minute lui demande (encore une fois !, le tory Charles Tannock lui avait déjà posé la question) de s'expliquer sur son passé de trésorière de Campagne contre le désarmement (CND), "
non mentionné dans son CV officiel". Il l'a accusé également de s'être lourdement trompé à l'époque ("avec vous l'Europe ne serait pas libre aujourd'hui") et de ne rien renier : "êtes-vous l'Edith Piaf de la Commission: nothing, nothing, nothing, i regret nothing ? Ou allez-vous reconnaître que vous vous êtes fourvoyés et vous excuser ?"... Et comme elle marquait un temps d'hésitation pour répondre, il voulut enfoncer le clou : "are you afraid ?"... Ce qui provoqua immédiatement la réprobation d'une partie de l'hémicycle... Catherine Ashton avait alors beau jeu de répondre que "chacun son opinion. C'est la démocratie. C'est fantastique de voir des gens de 27 pays de toute l'Europe engagés dans le Parlement européen. C'est un grand choix de toute ma vie". Ensuite, elle a répondu que " sa vie était publique", que si le CV ne mentionnait pas son passé au CND, c'était parce que cela ne lui semblait "pas significatif pour le poste qu'elle occupait". Sur le fond, elle n'a pas voulu renier son engagement de l'époque : "un engagement en faveur de la paix. Je suis passionnément en faveur d'une Europe libre. (...) Quand j'étais jeune, j'étais engagé dans le désarmement. C'était un engagement en lien avec les mouvements de liberté de l'Europe. J'étais passionnément pour que l'Europe soit libre."

Un résultat "honorable sans mentions". A la fin de l'audition, nombreux ont été les députés à venir embrasser, serrer la main ou glisser un petit mot d'encouragement à la Baroness Ashton (aka Edith Piaf ?). Le plus dur semblait fait. Et dans son entourage, on a poussé un soupir de soulagement... A interroger les députés, ensuite dans les couloirs en dehors de la commission, cette impression plutôt positive s'est confirmée,
sans être dythirambique : « Il y a un net progrès par rapport il y a cinq semaines, lors de sa première audition » ont expliqué plusieurs députés. « On sent qu'elle est plus à l'aise qu'elle maîtrise mieux ses dossiers » considère ainsi le Français Arnaud Danjean (UMP/PPE). Même s'il « lui reste une large marge de progrès » a lâché, un rien vachard, un de ses collègues de parti, tenu à la discipline du groupe. Certes « tout n'est pas satisfaisant » commente Franziska Brantner (Verts). Mais il semble bien que Catherine Ashton ait décroché des eurodéputés le « Fair average quality » comme l'explique le Roumain Ioan Mircea Pascu (S&D), vice-président de la commission des Affaires étrangères. Bien sûr, « il n'y a aucune raison d'être enthousiaste. Nous avons une personne nouvelle pour construire quelque chose de nouveau. Cela fait beaucoup » a expliqué l'Allemand Elmar Brok (CDU/PPE) qui sait cependant bien qu'« on ne peut pas se permettre une nouvelle crise (de la Commission) ! Alors... ».

La modestie récompensée.
« Nous n'avons pas besoin d'une missionnaire » justifie la socialiste belge Véronique de Keyser (S&D). « Nous en avons assez de ceux qui prennent des postures, montrent des biceps, mais ne font rien de plus » complète une autre. Catherine Ashton doit « évoluer dans un nouveau contexte, avec la présidence tournante, etc. qui l'oblige à être discrète », explique la libérale belge Annemie Neyts. Le positionnement de Catherine Ashton pour une "diplomatie tranquille" a apparement plu. Sa modestie affichée (« Je ne suis pas élu. Vous l'êtes ») ne l'a pas desservie. Bien au contraire! Son engagement de rester proche des précocupations du Parlement a ravi : « Vous avez tous posé des questions fort intéressantes mais peut-être pas obtenu toutes les réponses. Je ferais de mon mieux pour être disponible. Plus nous continuerons le dialogue, plus nous serons à même de résoudre les préoccupations qui nous occupent. »
AshtonHearing@PE100112
Une remarque sur cet exercice d'auditions.
1° C'est un exercice au demeurant rare au niveau national (du moins français) qu'il est très peu compris dans ses enjeux comme dans la valeur de son exercice par nombre de compatriotes.
2° Certains députés français n'ont d'ailleurs que peu compris leur exercice. Je citerai trois d'entre eux : Jean-Luc Mélenchon (Front de Gauche) qui coprésidait la séance !, Vincent Peillon (Parti socialiste), Dominique Baudis (UMP) ont posé leur petite question, sont restés quelques minutes de plus, par politesse, puis s'en sont allés discrètement sans attendre la fin de l'audition (2).

3° Cet exercice reste pour l'instant peu satisfaisant à mon goût. En donnant très peu de temps aux questions et aux réponses, le Parlement européen voulait un exercice rythmé. C'est raté. Au contraire, on obtient un exercice totalement haché, où le commissaire a, à peine le temps de répondre à la question et pas de développer sa pensée.


NB : Sur la défense, lire : La vision très british de Catherine Ashton sur la défense européenne


(1) Une première audition, informelle, avait eu lieu le 2 décembre. Lire Ashton, nouvelle HR, apôtre de la démocratie tranquille... et du café de la Commission

(2) Heureusement quelques autres, comme Eva Joly (Verts) ou Arnaud Danjean (UMP), sont restés

Pour écouter l'audition...
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logo_ouestfrancefr.pngL'éditeur : Nicolas Gros-Verheyde. Journaliste, correspondant "Affaires européennes" du premier quotidien régional français Ouest-France après avoir été celui de France-Soir. Spécialiste "défense-sécurité". Quelques détails bios et sources.