
l'Union européenne au Tchad et république Centrafricaine, Eufor Tchad RCA.
Eufor Tchad : un succès opérationnel
Dans un milieu hostile. Le général a mis en avant la réussite de l’opération, particulièrement d’un point de vue de l’intégration de troupes venus de divers horizons de l'UE. Ce qui n'était pas évident pour une telle mission en Afrique. « Au début de cette opération, le pessimisme régnait. On croyait ne pas pouvoir déployer ces forces dans l’environnement le plus hostile du monde, à des milliers de kilomètres des ports et aéroports. Les sceptiques se retrouvaient même au sein même des plus grands contingents qui craignaient de devoir soutenir les petits Etats membres qui n’avaient pas leur expérience, comme eux, de l’Afrique (le général ne cite pas les Français mais il y pense très fort…) ». Mais le résultat a été bon.
Equipement adéquat et troupes aguerries. « Le Général Ganascia (commandant de la force sur le terrain) m’a dit lui même être très surpris des capacités déployées par les contingents polonais, irlandais, suédois par exemple… qui sont arrivés avec les équipements qui convenaient idéalement au terrain ». Elément supplémentaire «les soldats sont arrivés avec un état d’esprit positif. Ils n’ont pas été épouvantés de la situation. Alors que le contexte est réellement difficile, hostile. Car sur place, il n’y a rien, rigoureusement rien, même l’approvisionnement en eau pose un problème». Conclusion : « cela traduit l’évolution des armées de plusieurs Etats membres, qui sont passés d’une défense territoriale à une défense qui se projette ».
Les principaux défis pour l’avenir
1° Rebelles et armée gouvernementale se préparent à la confrontation. La situation reste « calme dans toutes les régions où agit l’opération ». Mais le général est bien conscient que la climatologie joue son rôle. « La saison des pluies s’est prolongée. Les pistes qui devaient avoir retrouvé leur état sont encore difficilement trafiquables (dans le sud surtout)». La situation devrait changer d'ici 2 ou 3 semaines. «Et qui dit facilité de circulation, dit menace de confrontation. » La situation est complexe. Il n’y a pas qu’une lutte frontale entre rebelles contre forces gouvernementales. « Il y a aussi des rivalités, pas vraiment ethniques, mais aussi de compétences territoriales. » Concernant plus particulièrement les rebelles, il est difficile « d’affirmer qu'ils se sont réarmés. Il faut maintenant savoir quand ils vont attaquer et avec quelle détermination, et aussi avec quelles ambitions. Les attaques précédentes ont été repoussées ».
La confrontation est proche. En tout cas, l’armée gouvernementale s’est préparée et renforcée. « Le président (tchadien) Deby s’est réarmé. Il est plus fort et a déployé plus de forces que d’habitude dans l’Est. Et on peut dire qu’il attend des incursions de rebelles. Il dispose désormais d’un potentiel (notable) : des bombardiers d’origine russe, des hélicoptères de combat. On sait que ce sont des capacités décisives en cas d’attaque.
2° La sécurité de la population et des humanitaires. Cela demeure encore un problème. Le général Leakey le reconnaît à mi-mot. Dépendant des forces de sécurité tchadiennes, le bilan est « assez mitigé ». « Les forces tchadiennes préfèrent combattre les rebelles que lutter contre l’insécurité » remarque-t-il. Ensuite, « certaines milices, aux côtés des armées, se sont mal comportées, la fidélité de ces milices est très fluctuante ». Les gens n’ont donc pas confiance en l’Etat. Mais le général européen se veut néanmoins optimiste grâce au déploiement du DIS – le détachement intégré de sécurité – un corps de policiers et de gendarmes tchadiens formés par l’Onu. « 800 personnes du DIS ont été formés, dont une partie se déploie dans les camp de réfugiés et déplacés. Et 400 sont en formation. C’est un progrès, un jalon essentiel dans la sécurité. Et j’espère qu’avec ce déploiement, de personnes formés et sous autorité Minurcat, cela va s’améliorer».
3° Le retour des personnes déplacées. Un grand nombre de villageois sont revenus dans leur village, avec pour objectif de moissonner. Mais il faut voir maintenant si ces personnes déplacées vont rester ». « Je pense qu’ils ne seront pas très nombreux à rester sur place » ajoute le général. Cela ne tient pas seulement aux conditions de vie, « un peu meilleures dans les camps de déplacés mais qui restent tout de même rudimentaires (…) cela tient aussi aussi aux conditions de sécurité ». Au passage, le général note une nette différence entre les camps réfugiés très structurés et les camps de déplacés qui le sont un peu moins ; une volonté claire pour les humanitaires qui souhaitent que les déplacés rentrent chez eux. Mais sans exercer trop de pression.
4° Une transition douce entre l'EUFOR et l’Onu. Une équipe d’experts européens de la logistique et financiers travaillent en ce moment à New-York, « sur les modalités de la transition, ainsi que sur les aspects financiers» (NB : le mandat d'Eufor va jusqu'en mars 2009). Un rapport du Secrétaire général de l’ONU sur le suivi est attendu. A l’étude également, la «phase critique» opérationnelle, c'est-à-dire la transition « sans heurt » entre l’EUFOR et l’ONU. Les Nations-Unies espèrent qu’elle sera « souple ». C’est-à-dire que la plupart des Etats membres qui participent actuellement pourront rester sous mandat de l’ONU et faire passer leurs troupes comme les Casques bleus.
Le vœu du général.
Si j’avais un vœu, un seul : ce seraient des hélicoptères (sur les hélicoptères russes, voir ici). Car cela permet de mieux utiliser les moyens. Si j’avais droit à deux vœux : ce serait un bataillon en plus.
Photo © NGV