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4 novembre 2008 2 04 /11 /novembre /2008 17:25
Venu rendre compte devant la sous-commission défense du Parlement européen, le général David Leakey, chef de l’Etat major de l’Union européenne, a usé de tout son sens politique, pour répondre aussi franchement que possible tout en restant diplomatiquement correct. Mais – et c’est tout le talent de ce général britannique – à travers les incises de son raisonnement, on peut découvrir certains « éléments de langage » plus directs. Quand il a tracé les défis auxquels avait été - ou est encore confronté - l'opération militaire de
l'Union européenne au Tchad et république Centrafricaine, Eufor Tchad RCA.

Eufor Tchad : un succès opérationnel

Dans un milieu hostile. Le général a mis en avant la réussite de l’opération, particulièrement d’un point de vue de l’intégration de troupes venus de divers horizons de l'UE. Ce qui n'était pas évident pour une telle mission en Afrique. « Au début de cette opération, le pessimisme régnait. On croyait ne pas pouvoir déployer ces forces dans l’environnement le plus hostile du monde, à des milliers de kilomètres des ports et aéroports. Les sceptiques se retrouvaient même au sein même des plus grands contingents qui craignaient de devoir soutenir les petits Etats membres qui n’avaient pas leur expérience, comme eux, de l’Afrique (le général ne cite pas les Français mais il y pense très fort…) ». Mais le résultat a été bon.

Equipement adéquat et troupes aguerries. « Le Général Ganascia (commandant de la force sur le terrain) m’a dit lui même être très surpris des capacités déployées par les contingents polonais, irlandais, suédois par exemple… qui sont arrivés avec les équipements qui convenaient idéalement au terrain ». Elément supplémentaire «les soldats sont arrivés avec un état d’esprit positif. Ils n’ont pas été épouvantés de la situation. Alors que le contexte est réellement difficile, hostile. Car sur place, il n’y a rien, rigoureusement rien, même l’approvisionnement en eau pose un problème». Conclusion : « cela traduit l’évolution des armées de plusieurs Etats membres, qui sont passés d’une défense territoriale à une défense qui se projette ».

Les principaux défis  pour l’avenir

1° Rebelles et armée gouvernementale se préparent à la confrontation. La situation reste « calme dans toutes les régions où agit l’opération ». Mais le général est bien conscient que la climatologie joue son rôle. « La saison des pluies s’est prolongée. Les pistes qui devaient avoir retrouvé leur état sont encore difficilement trafiquables (dans le sud surtout)». La situation devrait changer d'ici 2 ou 3 semaines. «Et qui dit facilité de circulation, dit menace de confrontation. » La situation est complexe. Il n’y a pas qu’une lutte frontale entre rebelles contre forces gouvernementales. « Il y a aussi des rivalités, pas vraiment ethniques, mais aussi de compétences territoriales. » Concernant plus particulièrement les rebelles, il est difficile « d’affirmer qu'ils se sont réarmés. Il faut maintenant savoir quand ils vont attaquer et avec quelle détermination, et aussi avec quelles ambitions. Les attaques précédentes ont été repoussées ».
La confrontation est proche. En tout cas, l’armée gouvernementale s’est préparée et renforcée. « Le président (tchadien) Deby s’est réarmé. Il est plus fort et a déployé plus de forces que d’habitude dans l’Est. Et on peut dire qu’il attend des incursions de rebelles. Il dispose désormais d’un potentiel (notable) : des bombardiers d’origine russe, des hélicoptères de combat. On sait que ce sont des capacités décisives en cas d’attaque.

2° La sécurité de la population et des humanitaires. Cela demeure encore un problème. Le général Leakey le reconnaît à mi-mot. Dépendant des forces de sécurité tchadiennes, le bilan est « assez mitigé ». « Les forces tchadiennes préfèrent combattre les rebelles que lutter contre l’insécurité » remarque-t-il. Ensuite, « certaines milices, aux côtés des armées, se sont mal comportées, la fidélité de ces milices est très fluctuante ». Les gens n’ont donc pas confiance en l’Etat. Mais le général européen se veut néanmoins optimiste grâce au déploiement du DIS – le détachement intégré de sécurité – un corps de policiers et de gendarmes tchadiens formés par l’Onu. « 800 personnes du DIS ont été formés, dont une partie se déploie dans les camp de réfugiés et déplacés. Et 400 sont en formation. C’est un progrès, un jalon essentiel dans la sécurité. Et j’espère qu’avec ce déploiement, de personnes formés et sous autorité Minurcat, cela va s’améliorer».

3° Le retour des personnes déplacées. Un grand nombre de villageois sont revenus dans leur village, avec pour objectif de moissonner. Mais il faut voir maintenant si ces personnes déplacées vont rester ». « Je pense qu’ils ne seront pas très nombreux à rester sur place » ajoute le général. Cela ne tient pas seulement aux conditions de vie, « un peu meilleures dans les camps de déplacés mais qui restent tout de même rudimentaires (…) cela tient aussi aussi aux conditions de sécurité ». Au passage, le général note une nette différence entre les camps réfugiés très structurés et les camps de déplacés qui le sont un peu moins ; une volonté claire pour les humanitaires qui souhaitent que les déplacés rentrent chez eux. Mais sans exercer trop de pression.

4° Une transition douce entre l'EUFOR et l’Onu. Une équipe d’experts européens de la logistique et financiers travaillent en ce moment à New-York, « sur les modalités de la transition, ainsi que sur les aspects financiers» (NB : le mandat d'Eufor va jusqu'en mars 2009). Un rapport du Secrétaire général de l’ONU sur le suivi est attendu. A l’étude également, la «phase critique» opérationnelle, c'est-à-dire la transition « sans heurt » entre l’EUFOR et l’ONU. Les Nations-Unies espèrent qu’elle sera « souple ». C’est-à-dire que la plupart des Etats membres qui participent actuellement pourront rester sous mandat de l’ONU et faire passer leurs troupes comme les Casques bleus.

Le vœu du général.

Si j’avais un vœu, un seul : ce seraient des hélicoptères (sur les hélicoptères russes, voir ici). Car cela permet de mieux utiliser les moyens. Si j’avais droit à deux vœux : ce serait un bataillon en plus.

Photo © NGV
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4 novembre 2008 2 04 /11 /novembre /2008 07:00
Les hélicoptères loués par le ministère de la Défense irlandais pour les besoins de l'opération Eufor au Tchad - deux hélicoptères Mi-8T - ne peuvent emporter des passagers, même le personnel militaire. (du moins normalement) L'interdiction émane du secrétaire général du ministère irlandais de la Défense, Michael Howart. Loués pour 2,5 millions € sur les dix mois de la mission à une société privée britannique, Air Partner Commercial Jets, ces appareils n'étaient, en effet, pas homologués aux normes européennes pour prendre des passagers. Les seules missons qu'ils peuvent faire sont le transport de fret et des évacuations médicales, rapporte la presse irlandaise (Irish independant, Irish Times).

Cette décision suscite quelque émoi en Irlande. Et une enquête interne est en cours au Ministère de la défense pour savoir comment on a pu en arriver à cette "absurdité". Bernard Allen, président du Comité des comptes publics, et membre du Fine Gael, ne comprend d'ailleurs toujours pas comment "personne dans le Département de la défense n'a pu vérifié que les deux hélicoptères Mi-8Ts, ne sont pas autorisés à transporter des passagers. Seán Fleming (du Fianna Fáil, parti au pouvoir) ne dit pas mieux. il s'agit d'un manque de capacité de négociation commerciale au sein de la fonction publique. "Au fil du temps, nous avons assisté à de mauvais contrats entre les irlandais de service public et les opérateurs commerciaux privés".

Le même type d'hélicoptère avait été utilisé dans de précédentes missions des Irlandais, au Liberia par exemple, sans susciter de problème, se défend le ministère de la Défense. Mais il s'agissait à l'époque d'hélicoptères militaires. Cette fois, les hélicoptères sont civils, loués à une société commerciale, et leur configuration dans une opération européenne doit être conforme aux règlements de l'UE.

NB : de façon générale, la question des différences de normes d'emploi des appareils est un véritable casse tête pour les responsables "transport" d'Eufor au Tchad. Ainsi ils ont (enfin) obtenu que les Casa 295 espagnols puissent se poser sur les pistes plus sommaires de Forchana, Goz Beida ou Iriba. Ce qui n'était pas prévu au départ. L'Espagne a ainsi accepté "de faire preuve de souplesse par rapport aux règles d'atterrissage" (ce qui n'est pas sans danger pour les avions) et "la formation des pilotes a été renforcée" a confirmé, récemment, le général Leakey, chef de l'Etat-Major de l'UE.
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1 novembre 2008 6 01 /11 /novembre /2008 18:52
La Russie et l'Union européenne devraient signer l'accord sur la participation de la Russie à Eufor Tchad, le 5 novembre, a précisé un diplomate russe, selon l'agence Novosti. 4 hélicoptères russes Mi8 et un contingent de plus de 100 hommes sont prévus. Ils devraient rester pour le temps de la mission Eufor. Mais la Russie devrait aussi continuer cette contribution sous le drapeau de l'Onu.

Répondant à une question d'un parlementaire, le général Leakey, chef d'Etat-Major de l'UE a précisé que la signature prévue à St Petersbourg avait "dû être reportée" et que "la capacité pourra être disponible au mois de décembre". Concernant le commandement de la force (voir l'accord avec les Russes), le général a rappelé qu'ils « seront sous la chaîne de commandement de l’UE, à disposition du commandant en chef ». Bien entendu, « il existe des spécificités nationales – mais comme il en existe même pour les Etats membres – : le nombre d’heures de vol, par exemple…» a-t-il précisé.
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30 octobre 2008 4 30 /10 /octobre /2008 23:30
Les attaques de bandits armés ont forcé les ONGs d'aide humanitaire à suspendre l'aide humanitaire des personnes déplacées dans l'est du Tchad, indique le service d'information de l'Office d'aide humanitaire de l'ONU. Des Ongs comme Médecins Sans Frontières (MSF) et Action contre la faim ont ainsi suspendu la plupart de ses activités dans les régions de Dogdoré et Ade près de la frontière soudanaise.

Quelques 28.000 personnes déplacées vivent à Dogdoré, 8500 à Ade. MSF - qui est des seuls organismes à fournir des soins médicaux à Dogdoré - a été contraint de retirer le personnel expatrié. Le gouvernement tchadien est mis en cause. C'est lui qui « a la responsabilité première pour la sécurité des travailleurs humanitaires», indique le chef du Bureau de la coordination des affaires humanitaires au Tchad, Eliane Duthoit. "Je pense qu'ils pourraient faire plus."

Coté de la sécurité, on estime que les 4x4 rutilants des ONGs attirent d'autant plus l'oeil qu'en général, y figure en bonne place un sigle "no arms" à l'intérieur. Une "vraie" offre d'attaque, m'a expliqué un militaire, "Montrer qu'on n'est pas armé dans ce pays est un signe de faiblesse, et donc une proie facile pour les bandits de toutes sortes".

En 2008, il y a eu 124 attaques contre le personnel humanitaire et sur les personnes déplacées et des réfugiés, y compris les détournements de voitures et vols à main armée, selon l'ONU. Les bandits volent argent, voitures et matériel. Quatre travailleurs humanitaires ont été tués, lors de ces attaques, dont le directeur de pays de Save the Children-Royaume-Uni.
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11 octobre 2008 6 11 /10 /octobre /2008 18:34
A l’est du Tchad, les affrontements entre forces gouvernementales et rebelles, combinés aux incursions militaires depuis le Darfour voisin, ont fait des milliers de déplacés ainsi que de nombreux morts. Malgré l’insécurité, MSF continue de fournir des soins de santé primaires et secondaires, ainsi qu’une assistance pour les besoins en eau et en nourriture aux déplacés internes, aux résidents tchadiens ainsi qu’aux réfugiés soudanais provenant du Darfour. Dans le sud-ouest du pays, MSF aide les r... Les Irlandais n'ont peut-être pas tout à fait tort en refusant de dégarnir le front de Goz Beida. Les incidents contre les ONGs continuent. Témoin : l'attaque de vient de subir un dispensaire de  Médecins sans frontières (MSF) à Kerfi, dans l'est du Tchad. "Des dizaines de jeunes hommes ont mis à sac le dispensaire MSF et ont attaqué les personnes présentes sur les lieux. Ils ont détruit les meubles, la pharmacie et les salles de consultation" raconte l'organisation. "Les patients, y compris les enfants malnutris, ont dû fuir. Au cours de l'incident, plusieurs employés de MSF ont été sévèrement battus mais ne souffrent d'aucune blessure grave. Les actes de violence se sont étendus à d'autres quartiers du village et auraient blessé et causé la mort d'un nombre indéterminé de personnes. Bien que la raison de l'attaque demeure inconnue, il semble que les organisations non gouvernementales (ONG) soient intentionnellement visées."

"Cet incident confirme à quel point l'aide humanitaire et les établissements de santé ne sont pas respectés." explique Karline Kleijer, la chef de mission MSF au Tchad.

Du difficile compromis entre militaire et humanitaire
Même si l'organisation ne veut pas commenter la présence d'Eufor, elle est en revanche plus critique sur "l'affichage humanitaire du dispositif militaire" que représente Eufor. Car sur le terrain, m'a confié un agent de façon informelle, "Eufor n'arrive pas remplir son mandat affiché de protection des populations déplacées et réfugiées du Darfour, il n'a pas enrayé les attaques contre les ONG".

En fait, MSF en tant qu'organisation humanitaire ne veut pas compromettre sa neutralité en étant escortée de soldats européens. Position que regrette le Lieutenant William Diepeveen, du contingent néerlandais, qui a résumé sur Radio Netherlands Worldwide l'ambiguité de cette position. "Nous ne pouvons assurer directement leur protection que s'ils le demandent. Or ils ne veulent pas. Alors la seule chose que nous pouvons faire, ce sont des patrouilles de nuit et une présence dans la ville, de Goz Beida par exemple et aux alentours. Mais cela ne suffit pas à prévenir les vols et les attaques".

Photo : Groupe de deplacés a Koukou, Est du Tchad. © Valerie Babize / MSF
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11 octobre 2008 6 11 /10 /octobre /2008 08:00
Le général Nash, commandant l'opération Eufor Tchad RCA aurait écrit directement au responsable des forces irlandaise, le dernier week-end si on en croit nos confrères du Irish Independant. Le général était un peu emmerdé par la réponse irlandaise à la requête du commandant de la force sur place, le général Ganascia. Après le départ des Suédois, rentrés à la maison, se posait la question de la garde statique du camp d'Abéché. Les Suédois effectuant en effet cette tâche (avec les Finlandais si mes informations sont exactes). Le général français avait donc demandé à chaque force en présence (Français au centre, Polonais au nord, Irlandais au sud), de venir assurer à tour de rôle, par rotation, ce service. Mais les officiers Irlandais sur place ont répliqué par un "caveat" (une opposition en latin), en clair une restriction à l'emploi des troupes qui oblige à étudier chaque nouvelle requête sur une base du cas par cas. Ils estiment que cette requête n'était pas prévue au départ. Ce déploiement signifie 30 hommes mobilisés au lieu d'être utilisés en cas d'attaque soulignent-ils.
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10 octobre 2008 5 10 /10 /octobre /2008 21:13
Non vous ne rêvez, ce sont bien des soldats européens à cheval. Eh oui, en saison des pluies, le bon vieil animal, a bien des vertus, là où les 4 x 4 ne passent pas trop. Les français de la Brigade multinationale centre ont ainsi retrouvé ce moyen de déploiement ancestral, et patrouillent ainsi au sud de Forchana près de la frontière soudanaise.

Je ne crois pas que ce soit vraiment prévu dans le plan d'opération du général Nash au départ ni dans les concepts d'opération militaire de l'UE (il faudra y songer d'ailleurs -:).

Mais, outre son coté tout terrain, la patrouille à cheval a beaucoup d'avantages, selon les militaires : discrétion (pas trop de bruit de moteur), passer un peu partout dans des endroits peu parcourus ordinairement, être au rythme des humains et faciliter donc les contacts avec la population locale... Tous les responsables militaires ou de maintien de l'ordre vous le diront : le cheval inspire tout de suite la sympathie...

(photo : ministère de la Défense FR).
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9 octobre 2008 4 09 /10 /octobre /2008 09:57
Un C-130H-30 Hercules de la Royal Air Force néerlandaise décolle, ce 9 octobre, de l'aéroport d'Eindhoven. Direction : le Tchad. Il assurera le transport de matériel et de troupes pour les Européens d'Eufor, entre le continent et  les différents théatres de l'opération (Abéché, N'Djamena...), ce afin d'assurer la rotation des troupes.

Ainsi la moitié du détachement des Marines néerlandais, basé à Goz Beida et intégré au bataillon irlandais, devrait pouvoir rentrer à la maison. Le C130 devrait être opérationnel jusqu'à fin octobre, a affirmé l'armée néerlandais. Une mission identique avait déjà été assurée en mai dernier. Le contingent néerlandais comprend 60 hommes.

(photo : ministère de la défense néerlandais)
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3 octobre 2008 5 03 /10 /octobre /2008 11:00
4 hélicoptères russes et 120 hommes sur une mission militaire européenne, Des Russes sous commandement européen, ce n'est pas commun. C'est même la première fois. Alors effectivement c'est difficile à négocier. Et il faut faire quelques entorses aux règles habituelles des opérations européennes. Du moins si j'en juge le texte du projet de décision qui entérine l'accord. Mais la stabilisation dans cette région troublée, de l'est du Tchad, aux confins du Soudan, ne vaut-elle pas quelques "entorses" aux principes...

Une négociation laborieuse
Si comme pour toute contribution d'un Etat extérieur à l'Union européenne (UE), dit Etat tiers, on signe un accord, cette négociation avec les Russes a été particulièrement longue et difficile, il a fallu s'y reprendre à plusieurs fois. Le gouvernement Français - qui tenait à cette présence - a particulièrement insisté à plusieurs reprises pour que les Européens acceptent d'être plus "coulants" sur certains principes. Et que les Russes en acceptent d'autres. Ce n'est pas illogique somme toute, car c'est la première participation russe à une mission militaire de l'UE. Entre autres sujets sensibles, la chaîne de commandement (russe sous commandement européen, ou commandement russe autonome), le financement et les procédures de règlement des litiges.

Aujourd'hui, l'accord a été paraphé coté russe - avec quelque difficulté cependant, l'état-major russe a un peu ronchonné et certaines modalités d'organisation doivent encore être fixées, d'ici la fin octobre. Et du coté européen, tous les pays semblent prêts à avaliser le texte, même après les évènements en Géorgie. Simplement, il faut passer en douceur, discrètement. On cherche donc à "étaler" le dossier après certaines échéances, plus politiques - comme celle du 10 octobre fixé pour le retrait russe des zones de sécurité de Géorgie. Ce qui explique que cet accord soit encore sur la table des ambassadeurs qui doivent l'approuver et le transmettre dans un prochain conseil des ministres de l'UE.

Une mission bien cadrée : le transport

La mission assurée par les Russes est bien cadrée et précisée expressément. Ce sera une mission de transport : "transport des membres de l'Eufor et de la Minurcat" (la force des Nations-Unies), "opérations de sauvetage" pour ces deux forces et "transport de matériel". Il n'est ainsi pas question de "mission de combat" (davantage du ressort des hélicoptères français, Gazelle, d'ailleurs, si j'en crois les spécialistes de la question).

Une chaine de commandement, atypique : qui préserve l'autonomie russe et la capacité de décision européenne

Le point clé de l'accord se situe dans la "chaine de commandement". Le contingent militaire reste "entièrement sous le commandement de la partie russe" est-il mentionné (ce qui est peu commun). Simplement les autorités compétentes russes "délèguent au commandant de l'opération "la faculté d'assigner au contingent militaire des tâches en vue de l'exécution de sa mission (...) Un ordre de mission aérienne ou toute autre décision affectant le contingent militaire russe est arrêté en étroite coordination avec les hauts représentants militaires russes.

La force russe est soumise aux règles d'engagement de l'opération définie par le commandement européen (logique) "dans la mesure où elles ne sont pas en contradiction avec la législation russe". Ces "restrictions d'engagement" (caveat) vont être notifiées au commandant d'opération, le général Nash.

C'est l'officier commandant le contingent militaire russe qui est responsable de la discipline quotidienne au sein du contingent (NB : disposition logique).

Les Russes peuvent retirer leur contribution "à tout moment", soit à la demande du commandant de l'opération, soit par décision russe. (NB : un contingent européen s'engage généralement sur la durée de la mission, ou sur une durée limitée, précisée à l'avance).

La Russie - mêmes droits, mêmes obligations - qu'un Etat de l'UE...

La Russie participe pleinement à l'opération. Elle a les "mêmes droits et obligations en terme de gestion quotidienne de l'opération que les Etats membres de l'UE qui y participent".

Les forces russes sont soumises aux règles de l'accord sur le statut des forces (Sofa) signés avec les trois Etats accueillant : Tchad, république centrafricaine (terrain d'opération) et Cameroun (transit du matériel). Hormis cela, le contingent militaire reste sous la juridiction russe.

Les Russes ont accès à la plupart des informations classifiés "défense" de l'opération. Ils doivent en assurer la confidentialité. Ils ne doivent pas utiliser cette information à d'autre fin (?), ne doivent pas la divulguer à aucun tiers, et restreindre l'accès en interne aux seules personnes "qui doivent nécessairement en avoir connaissance pour s'acquitter de leur mission officielle".

Un officier de "haut rang" russe sera d'ailleurs au quartier général de l'opération, l'OHQ au Mont-Valérien, aux cotés du général Nash. Un autre au quartier général de la force (FHQ) à Abéché, aux cotés du général Ganascia. (NB : je préfère "aux cotés" que "sous les ordres", car cela semble refléter davantage la situation. Aucun de ces mots d'ailleurs n'est mentionné dans l'accord)

... enfin presque, car il y a quelques arrangements financiers et juridiques

La Russie assume tous les coûts liés à sa participation à l'opération - sauf financement commun prévu ad hoc. Dans ce cas là, c'est le mécanisme Athéna de prise en charge qui prend le relais. Par ailleurs, Eufor fournit un soutien logistique contre remboursement des coûts (au prix coutant). La Russie est "exemptée de toute participation financière aux coûts communs".

En cas de dommage collatéral - victime locale - ce sont les règles signés avec les pays d'accueil qui s'appliquent : en gros, tout dommage est "extériorisé". L'Etat d'accueil s'engage à ne pas faire de procédure judiciaire. A la place, il est prévu une procédure de règlement amiable (indemnités), voire un recours à une commission d'arbitres. En cas de litige sur la nomination des arbitres, c'est le président de la Cour internationale de justice qui est appelée à la rescousse pour désigner l'arbitre (pour les autres Etats européens, c'est le président de la Cour de justice européenne). Raffinement supplémentaire (qui montre la difficulté de négocier le moindre détail), il est précisé que si le président de la CIJ est un national de l'UE ou de Russie, c'est un autre membre de la Cour qui doit intervenir. (Une disposition qui n'est pas de pure forme car la présidente actuelle est britannique).

Ultime précision (importante quand on sait les problèmes de "traduction" qui ont lieu lors des accords en Géorgie) : l'accord est rédigé en anglais et en russe, "chaque version faisant foi".

Pour télécharger le texte de la décision et de l'accord
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29 septembre 2008 1 29 /09 /septembre /2008 22:14
Faisant le point à mi-mandat sur l’opération militaire de l’UE (EUFOR) au Tchad et en République centrafricaine (RCA), lors d’une conférence de presse à Bruxelles, le 29 septembre, le général irlandais, Pat Nash, qui commande l’opération, s’est montré d’un optimisme très mesuré sur la situation sécuritaire. Il a aussi appelé chacun à être vigilant sur la suite de l’opération. « L’enjeu reste en effet considérable. Beaucoup a été fait, en matière logistique, de sécurité » a détaillé le général.

Le risque rebelle existe
Mais « la situation reste difficile. Je n’ai pas de doutes qu’il y aura d’autres difficultés dans le futur. Les mois prochains seront cruciaux », a-t-il ajouté. Les rebelles restent, en effet, toujours présents et actifs dans la région dite des « trois frontières » (Tchad, Rca, Soudan). Et même si une attaque d’envergure comme celle de fin janvier – les rebelles avaient atteint la capitale N’Djamena – paraît difficile à réitérer, les périodes de saison sèche sont, traditionnellement propices au Tchad à des offensives guerrières. « Nous avons deux attaques par an, en février et en octobre », m'avait confié un spécialiste militaire présent sur place.

Le récent rapport d’Oxfam, le général l’a lu mais « pas de la même façon » que certains commentateurs. Il n’y voit pas une critique de la mission de l’Eufor. Au contraire ! Car ce qui manque actuellement au Tchad, « c’est une force de gendarmerie et de police, ainsi qu’un accord de bonne gouvernance ». La mission d’Eufor se situe en amont : « fournir l’environnement de sécurité nécessaire pour que ces forces puissent travailler ». Ce « qu’elle fait – explique-t-il – malgré toutes les difficultés auxquelles (elle) est confrontée depuis le début ».

Préparer l'après Eufor
Le Général Nash a aussi tenu à alerter sur l’après-Eufor. « L'UE a un mandat jusqu’au 15 mars 2009. Après cela, nous n’avons pas de mandat ». Le temps de la transition effectué, « plus aucun soldat de l’UE ne sera présent au Tchad au 1er juin », a-t-il assuré. Mais « la continuation voire l’extension de la présence internationale après le 15 mars est un enjeu important », a-t-il aussi souligné. Car aucun Etat n’a l’intention de prolonger la mission de l’UE.

Le secrétaire général de l’ONU a lancé, le 17 septembre, à New-York, un appel à contributions pour une force de 6 000 hommes. Appel qui pourrait être rempli, sans trop de difficultés, selon un spécialiste des opérations de paix. « La génération de forces au niveau des Nations-Unies pose moins de problèmes qu’au niveau de l’UE, les soldats étant pris en charge par l’Organisation ». D’ores-et-déjà, il semble acquis que trois des principaux Etats contributeurs à Eufor Tchad – France, Pologne, Irlande – pourraient contribuer à la future mission de l’ONU, en fournissant environ un quart de l’effectif nécessaire. Par ailleurs, des accords techniques entre l'UE, le gouvernement et l’Onu doivent assurer la transition.

Arrivée d'hélicoptères russes
Lors des échanges avec les journalistes, le Général Nash a aussi confirmé l’arrivée des hélicoptères russes « pour la fin octobre, au plus tard novembre ». Une présence nécessaire pour permettre d’atteindre « une pleine capacité opérationnelle, en matière héliportée ». L’hélicoptère est, en saison des pluies, le seul moyen d’accès. Et, même en saison sèche, vu l’état des pistes, cela permet « d’avoir une réaction rapide, en amenant les troupes nécessaires sur place », m'avait précisé un militaire. La décision d’arrivée de ces hélicoptères a déjà été avalisée au sein des groupes de travail de l’UE, elle doit maintenant l’être par le Conseil des ministres. Ce qui devrait être chose faite à la mi-octobre, sans formalité (en point A).

Il faut noter que cette participation russe pourrait être suivie d’autres. La marine de guerre russe a, ainsi, fait mouvement ce week-end vers le large de la Somalie pour suivre de près, de concert avec la marine américaine, un bateau ukrainien contenant du matériel militaire russe (à destination du Kenya). Et un responsable de la marine russe n’a pas exclu d’avoir une action coordonnée dans la zone, avec les autres forces présentes.

(Paru dans Europolitique)
Crédit photo : Conseil de l'UE
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logo_ouestfrancefr.pngL'éditeur : Nicolas Gros-Verheyde. Journaliste, correspondant "Affaires européennes" du premier quotidien régional français Ouest-France après avoir été celui de France-Soir. Spécialiste "défense-sécurité". Quelques détails bios et sources.