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25 octobre 2009 7 25 /10 /octobre /2009 11:00
Les Russes pourraient participer à la formation des soldats somaliens à Djibouti, annonçait triomphalement Bernard Kouchner devant la tribune de l'assemblée nationale le 7 octobre (lire ici), qui visait un accord bilatéral avec la Russie (un peu comme pour Eufor Tchad) (1). Apparemment, ce n'est pas vraiment décidé. Tout simplement. Car rien n'a été demandé concrètement aux Russes. « C'est surtout une idée de Bernard ! (Kouchner) » lâche un proche du dossier. Selon un diplomate présent à Moscou, la discussion entre Bernard Kouchner et son homologue russe, Serguei Lavrov, a été assez générale. En réponse à la demande française, le ministre Russe aurait simplement affirmé sa disponibilité à étudier toute proposition que pourrait lui faire parvenir la France dès qu'il y aurait une demande précise, un courrier. Mais, rien de plus. Lavrov a même un peu vanné son homologue français à propos des règles de livraison d'armes. Bernard Kouchner aurait, en effet, suggéré que les Russes pourraient fournir des armes car les Français, eux, ne le pouvaient pas, à cause des différentes règles d'exportation. "Vous savez. Nous avons les mêmes règles que vous" lui aurait rétorqué alors Lavrov, non sans ironie. On comprend donc que, interrogé par les journalistes lors du déplacement dans les Seychelles, le ministre français de la Défense, Hervé Morin, se soit montré plutôt (très) prudent : « J'ai eu le sentiment que la Russie était assez ouverte à la question ». On a connu plus enthousiaste ! D'un autre coté, les Russes sont très tentés de reprendre "pied" d'une manière ou d'une autre avec le gouvernement somalien qui a été une de leurs pièces maîtresses en Afrique (avec l'Ethiopie, ou plutôt en alternance). Lire aussi : la Mission Eusec Somalia se dessine

(1)
Bernard Kouchner et Hervé Morin, avaient eu des discussions, à l’occasion de la session du Conseil de coopération franco-russe sur les questions de sécurité (CCQS), avec leurs homologues respectifs, Sergueï Lavrov (affaires étrangères) et Anatoly Serkioukov (défense), ainsi qu'avec le président Dmitri Medvedev. Des conversations qui avaient porté, selon le Quai d'Orsay, sur l'engagement russe dans différentes opérations de l'UE (Eufor Tchad et Somalie), et sur le nucléaire iranien, ainsi que sur le Moyen-Orient, l’Afghanistan et la Corée du Nord.
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25 octobre 2009 7 25 /10 /octobre /2009 08:00
La volonté française de promouvoir une mission européenne de formation des forces de sécurité somaliennes est connue. Après Pierre Lellouche, le secrétaire d'Etat aux affaires européennes, qui avait lancé un appel à ses homologues européens "à participer à l'effort de formation des forces somaliennes", lors de sa visite à Djibouti, Hervé Morin, le ministre de la Défense, l'a encore redit lors de son déplacement dans l'Océan indien. "L'effondrement du pays est la cause de la piraterie. Il faut traiter aussi les causes". Pour parvenir à "la restauration" de l'Etat somalien, "il faut donner les moyens au gouvernement somalien de reconstruire et de reconstituer progressivement les éléments assurant la sécurité et la stabilité du pays", a précisé le Ministre. "Nous, nous faisons cet effort. Ce que nous espérons, c'est que d'autres pays européens le fassent". 

Une dizaine de pays participant ? Est-ce l'effet de cet appel ou, comme le remarque un diplomate en poste à Bruxelles, « une prise de conscience de la faisabilité de l’opération », sans doute un peu des deux. Toujours est-il qu'aujourd'hui à Bruxelles, il existe une atmosphère plutôt favorable la mise en place de cette misson. « Personne n'a émis d'objection - poursuit ce diplomate -. Bien sûr, il reste un certain nombre de questions à régler, notamment le suivi des militaires formés, mais on sent un lent mouvement ». A Göteborg, fin septembre, on comptait ainsi trois à quatre pays soutenant l'opération : outre Chypre et le Luxembourg qui participent déjà à l'expérimentation française - Chypre en fournissant des moyens, le Luxembourg en finançant l'opération - l'Allemagne avait manifesté son soutien à l'opération, ainsi que l'Espagne, de façon plus timide. Ils sont aujourd'hui une petite dizaine de pays aujourd'hui à soutenir plus ou moins activement cette nouvelle mission PESD. La Pologne et la Finlande étudient ainsi sérieusement leur participation avec l'envoi de formateurs, l'Autriche et la Hongrie ont également un préjugé favorable mais "n'ont pas encore pas pris de décision" comme nous l'a confirmé un diplomate. C'est ce qu'on pourrait nommer l'effet "Eufor Tchad".

La mission Eusec Somalia, premiers contours

Options discutées. A Bruxelles, les experts ont commencé, depuis plusieurs semaines, à travailler sérieusement. Un papier d'options a ainsi été distribué aux différentes délégations en octobre (c'est le deuxième papier après celui distribué en juillet). L'objectif est d'arriver à une décision politique au Conseil des Ministres de la Défense/Affaires étrangères de fin novembre, approuvant un Concept de gestion de crises (CMC), ce qui permettra de lancer le processus de planification opérationnelle. Celle-ci devrait être assez rapide. Car l
a mission "Eusec Somalia" sera assez légère en termes d'effectifs : environ 100-150 personnes.

Une mission civile, pour l'entraînement. 
La mission "d'assistance à la réforme de sécurité, incluant un entraînement des forces somaliennes" serait une mission "civile" au sens européen. Ce qui signifie que la planification et le suivi de l'opération est assuré par le CPCC ("l'Etat-major civil" de l'UE). Elle viserait, en premier lieu, à l'entraînement des militaires somaliens. Le nombre n'est pas exactement fixé, mais il s'agirait de quelques milliers (entre 2 et 5000 personnes). La formation serait assez sommaire, de quelques semaines (3 à 6 semaines), calquée sur le modèle français, destinée avant tout à "former l'esprit de groupe, le respect de la discipline, les notions tactiques de base, l'évolution en unité, l'utilisation des armes". Auquel s'ajouterait un volet "droits de l'homme" et "droit international humanitaire" dans l'esprit européen. Elle se déroulerait dans des lieux situés hors de Somalie. Trois pays sont désignés pour l'instant : Djibouti, Tanzanie, Ouganda.

... avec un volet "paiement" des soldats.
La mission européenne ne s'arrêterait pas à l'entraînement. Mais concernerait ensuite le paiement des soldats. "Rien ne sert de former des soldats si ensuite on ne peut le payer" assure un militaire européen. "Ils vont se volatiser et retourner dans leurs foyers ou chez les rebelles" complète un autre. La mission vise donc à assurer un paiement des salaires pour préserver leur présence dans l'armée somalienne. Cela pose plusieurs problèmes : contrôler la chaîne de paiement (l'expérience acquise dans l'opération Eusec Congo pourra être utile), éviter le dérapage financier et contrôler le budget nécessaire (pour éviter une tendance inflationniste à l'afghane), avoir une présentation politique qui concilie les visions différentes des Etats membres en matière de coopération militaire. Payer des armées d'Etats tiers sur le budget de l'Union européenne peut, en effet, paraître choquant à certains pays ou contraire à la politique "civile" de l'UE. Une des pistes suivies pourrait donc être de soutenir (financièrement et de façon logistique) l'Union africaine qui serait chargée de verser l'argent aux Somaliens (ce qui est déjà fait pour les soldats de l'Amisom, le budget européen payant en partie les forces de la paix africaines déployées en Somalie).  

L'engagement américain

Présence diversifiée. Ce qui facilite l'engagement européen et lève les éventuelles réticences, c'est l'engagement américain très net envers la Somalie. Un engagement très diversifié : entraînement de soldats, livraisons d'armes légères et d'équipement à l'armée du GFT, et apport financier. Fin juin, les Etats-Unis auraient déjà livré au moins 40 tonnes d’armes et de munitions aux forces du gouvernement transitoire somalien, pour un montant aux alentours de 10 millions d’euros, selon un représentant du Département d’État. Les Américains aident également à l’entraînement des forces somaliennes, via les Djiboutiens, en "fournissant des tentes" et divers matériels. Un support logistique est également apporté aux Ougandais et Burundais qui forment actuellement les seules troupes de l’AMISOM. On sait également que c'est une société américaine qui forme les policiers somaliens en Jordanie...

NB : Les premiers soldats somaliens formés par la France, de façon bilatérale à Djibouti, sont arrivés mardi à Mogadiscio, en provenance de Djibouti dans un avion privé. Selon les sources somaliennes, les troupes ainsi formées seraient au nombre de 800. Ce qui ne correspond pas au chiffre fourni par les Français qui parlent d'environ 500 personnes formées en deux temps (150 en août, 350 en octobre). 
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10 octobre 2009 6 10 /10 /octobre /2009 19:45
La société de sécurité privée " Phoenix Intelligence Support" devrait former à l'Eastern International Training Academy, basée à Amman (Jordanie), 5000 officiers de police somaliens à compter de décembre prochain. En tout cas elle a signé un accord avec ce centre de formation qui dépend d'une société privée jordano-britannique. Phoenix a passé un accord avec le gouvernement transitoire de somalie, en août 2009, pour soutenir les forces de police somaliennes, de gardes-côtes, de renseignements). A la formation des unités spéciales de police et contreterrorisme, s'ajoutera en effet des formations de gardes côtes et anti-piraterie. Le "marché" somalien et de la lutte anti-piraterie aiguise les intérêts de nombreuses sociétés privées.
(Crédit Photo : Eastern Holding)
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9 octobre 2009 5 09 /10 /octobre /2009 16:45

Hervé Morin, le ministre français de la Défense, vient d'écrire à Javier Solana - le Haut représentant de l'UE pour la politique étrangère - et à Sten Tolgfors - le ministre suédois de la Défense, qui préside actuellement l'UE - pour leur rappeler toute l'importance d'un nouvel engagement des Européens pour la Somalie (plutôt qu'en Somalie). Une lettre qui vient d'être rendue publique par le ministère de la Défense français. Du moins, en partie. Nous avons pu avoir connaissance de l'intégralité de la lettre. Elle est intéressante, à plus d'un titre, car elle exerce une véritable pression sur les Européens pour qu'ils sortent de leur frilosité.

Eviter la déstabilisation

"La Somalie ne doit pas devenir un foyer de déstabilisation" écrit Hervé Morin. "Au-delà de ses effets régionaux, la déstabilisation de la Somalie menace directement la sécurité des Européens et la sécurité internationale." Il existe des "liens" - des liens "prouvés" - entre les Shababs somaliens et El Qaida, souligne-t-il. Et effectivement, ne pas s'engager en Somalie alors que les forces européennes sont engagées en Afghanistan pourrait paraître difficile. « C'est là l'intérêt de l'Europe autant qu'en Afghanistan » souligne le Ministre.

Poursuivre l'initiative française

"L’UE s’est engagée avec succès dans l’opération Atalante, pour réduire les attaques de pirates", elle doit aller plus loin, souligne le ministre français de la Défense. « L’UE doit élargir son approche pour former les gardes-côtes et les policiers, renforcer les capacités maritimes régionales et le soutien à l’AMISOM ». Et, pour lui, « l’engagement de l’Union européenne dans la formation de forces de sécurité somaliennes robustes et opérationnelles peut constituer une action de stabilisation efficace ».

La France a déjà engagé une première formation de 500 militaires somaliens. 150 militaires ont déjà été formés, les 350 ont commencé à l'être. Un camp de toile a été monté à 30 km de Djibouti, dans ce but. Et 400 soldats somaliens ont été formés en Ouganda, par les Américains.

Former 3000 hommes supplémentaires

Hervé Morin propose de lancer donc une nouvelle mission PESD, mission "non exécutive", qui aura pour tâche de former "3 000 soldats supplémentaires de la force de sécurité" du gouvernement transitoire somalien. Cette mission pourrait se dérouler dans les deux pays où la formation se déroule : Djibouti et Ouganda. Mais surtout dans ce dernier pays. Il s'agit, estime-t-on à Paris, de ne pas mettre trop la pression et l'attention sur Djibouti (NB : Djibouti a des frontières communes avec la Somalie, à la religion musulmane et une bonne partie de la population est de même origine que de l'autre coté de la frontière).

La France souhaiterait également ne pas prendre le "lead" de la mission. Du moins ne pas l'afficher (tant que la question de l'otage français en Somalie n'est pas réglée). L'option préférée par Hervé Morin serait donc que la France vienne "en soutien" - par des formateurs ou de la logistique - et qu'un autre pays européen prenne le lead de l'opération (*).

La lettre et sa communication à la presse
deux objectifs

Convaincre les Européens....

Cette initiative (la lettre et sa communication) s'inscrit dans un contexte d'indécision européenne. Si certains ministres se sont montrés disposés à suivre les Français - les Chypriotes et Luxembourgeois - et d'autres prêts à les rejoindre - les Allemands - la plupart des autres Etats sont plus dubitatifs (1). Même la ministre espagnole de la Défense, Carme Chacon, qui est prête à soutenir l'initiative française, l'a rappellé à Göteborg : "il ne s'agit pas de former des personnes que l'on va retrouver ensuite comme pirates".

Cependant une action complémentaire à l'action en mer est nécessaire. Tout le monde est absolument d'accord sur ce point : c'est à terre - et uniquement à terre - qu'on pourra régler le problème de la piraterie, mais aussi la question d'avoir un "Etat failli" en bordure de mer rouge, déstabilisateur pour toute la zone : Djibouti, Yemen, Ethiopie, Erythrée... Ainsi que l'avait déjà expliqué Javier Solana, en mai dernier (2), il importe d'agir en Somalie. Cette lettre arrive à point nommé également car les 27 ambassadeurs du COPS, le comité de politique et de sécurité de l'UE, sont sur place ce week-end, pour une visite de travail (3).

... et régler ses comptes avec Lellouche

Cette communication s'inscrit aussi - reconnaissons-le - dans un conflit plus personnel, plus parisien, entre deux ministres : Pierre Lellouche et Hervé Morin. Le premier est secrétaire d'Etat aux Affaires européennes et se sent un peu à l'étroit dans son poste. Il ne rêve que de s'occuper de "Défense". Et il le montre. Lundi dernier il était à Bruxelles pour une visite exclusivement tournée vers la PESD (4).

Aujourd'hui, il s'envole à Djibouti pour visiter l'action de formation des forces somaliennes menée par l'armée française et rencontrer les ambassadeurs du COPS. Ce qui revient - proprement dit - à marcher sur les plates-bandes de son homologue de gouvernement. Il y a comme un peu de confusion dans l'air entre le Quai d'Orsay et la rue Saint-Dominique (siège du ministère de la Défense). Il serait d'ailleurs temps que le président de la République, Nicolas Sarkozy, y mène un peu d'ordre. Car ceci est quelque peu troublant pour les Européens.

(*) Il est d'usage dans les missions européennes qu'un Etat soit la "nation-cadre" d'une opération soit parce qu'il est déjà implanté dans la région, soit parce qu'il y a des affinités diplomatiques, politiques ou démographiques.

Lire également :

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4 octobre 2009 7 04 /10 /octobre /2009 06:52
Un nouvel ambassadeur a été accrédité auprès des institutions européennes. Il s'agit du somalien Nur Hassan Hussein. Cette nomination n'est pas anodine. C'est une des mesures décidées lors de la conférence sur la Somalie en avril 2009 afin de consolider le gouvernement fédéral transitoire (GFT).

Nur Hassan Hussein n'est pas n'importe qui. Agé de 71 ans, il a été Premier ministre jusqu'à peu, entre novembre 2007 et février 2009. Et son parcours illustre toute la difficulté du pays. Jeune officier des douanes peu après l'indépendance du pays, il devient un des responsables de la police sous Siad Barré, dont la principale qualité n'était pas le respect de la démocratie... Attorney genelra jusqu'à 1991, moment où le pays tombe dans le chaos, il devient ensuite président du Croissant Rouge somalien.

(crédit photo : Commission européenne, José-Manuel Barroso reçoit les lettres de créance)
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29 septembre 2009 2 29 /09 /septembre /2009 22:40
(A Göteborg) La demande de Javier Solana de développer une mission de la PESD d’assistance et de réforme des forces de sécurité en Somalie n’a pas enthousiasmé beaucoup les ministres de la Défense, réunis à Göteborg, mardi.

Tout le monde est bien conscient autour de la table des Ministres, qu’il est nécessaire de stabiliser ce « pays » et d'éviter qu’il tombe dans une anarchie totale.
« Nous sommes tous préoccupés » a résumé le ministre suédois de la Défense, Sten Tolgfors, qui présidait la réunion. « Nous devons avoir un niveau d'engagement adéquat dans la région. L'opération Atalanta est un succès. Mais agir en mer ne signifie pas que le problème (de la piraterie) disparaît car la source du problème se situe à terre ».  Mais quand il s’agit de mettre des moyens et d’arriver à une position commune, c’est une autre histoire...

Les 27 Ministres des Affaires étrangères avaient certes convenu, lors de leur réunion de juillet, d'explorer les options possibles (*). Leurs homologues de la Défense ne semblent pas tout à fait aussi déterminés. « C'est une question extrêmement compliquée qui nécessite de trouver des coopérations. Cette discussion était un point de départ. Ce n'est pas la conclusion. Nous allons devoir travailler dans les semaines et mois qui suivent pour revenir bientôt avec des solutions » a reconnu Sten Tolgfors, le Ministre suédois de la Défense, lors de la conférence de presse finale.
  • (*) The UE "will explore the possibility of additional EU support to the security sector, including through support to the UN-led assessment process and TFG priorities and commitments as well as through the training of security forces. The Council agrees that support in the security sector should be well coordinated, notably with the AU, the UN and other relevant EU partners, in particular the US. It should support a Somali national security strategy, committed to the rule of law, respect for human rights and gender".
L'exemple français. La formation de 500 membres des forces de sécurité, démarrée cet été à Djibouti par les Français a été cité comme un exemple. 150 soldats ont déjà été formés et la formation de 350 autres va démarrer (**). Les Français souhaiteraient maintenant que les Européens les relaient et les suppléent dans cet effort. Mais peu de voix se sont joints concrètement à cette demande. L’Allemagne (présente à Djibouti également avec une centaine d'hommes dans le cadre de l'opération Enduring Freedom), le Luxembourg, Chypre ont proposé leur aide et contribution. L'Espagne a également soutenu cette position sans être trop précise sur les moyens.
  • (**) Une formation militaire pratique de base. La formation donnée dure trois semaines. « Il ne s’agit pas d’une formation type commando - m'a précisé un militaire de haut rang. « En quelques semaines, c’est impossible. Et puis il ne s’agit pas de former des soldats d’élite sans savoir ce qu’ils deviennent ». Il s’agit donc davantage d’une formation, type conscription accélérée : « Nous prenons des futurs soldats et les amener rapidement à une capacité opérationnelle, apprendre à obéir, réagir en groupe… » Les appelés sont choisis par les autorités somaliennes. Mais les Français filtrent les candidatures pour éviter certains éléments - d'éventuels fondamentalistes mais aussi les mineurs. Plusieurs ont ainsi dû être renvoyés car ils paraissaient mineurs. « Il n'est pas question pour l'UE de former des enfants soldats ».
Les autres ministres autour de la table sont restés attentistes, pour ne pas dire sceptiques. Personne ne s’est non plus vraiment opposé à la poursuite des discussions. Comme le résume le ministre belge de la Défense, Pieter De Crem, que j'ai interrogé sur cette question : « cette suggestion est intéressante. Mais il y a beaucoup de questions qui se posent. Nous avons non seulement des contraintes budgétaires. Mais nous devons aussi faire face à une situation très spécifique. Si on s’engage, il faut savoir quand la mission sera terminée ; comment on va se retirer. Et ce qui suit. » Et d’ajouter : « Nous ne pouvons pas être seuls. C’est aussi un problème qui concerne principalement les Africains. Et il faut les impliquer. Comme il faut travailler avec d'autres partenaires comme les Etats-Unis ou l'OTAN». Pour la ministre espagnole de la défense, Carme Chacon, il faut veiller à « ne pas avoir un effet boomerang : que ces agents  formés par des forces européennes, finissent par devenir des pirates lorsqu'ils quittent l'armée».

Commentaire

Ces réticences sont-elles le signe d'un échec ? Pas tout à fait sûr. Avec l'Union européenne, on ne sait jamais. L'audace est parfois au détour du chemin des réticences.
"Nous n'avons pas chômé - justifie un proche de Solana - la décision d'explorer les pistes est intervenue fin juillet, la première formation "test" a démarré en août, des missions exploratoires sont parties en août et en septembre". Et comme me l'a rappelé un autre acteur de la PESD, "cela sonne comme un rappel des premières discussions qui avaient précédé le lancement de l'opération anti-pirates". Effectivement quand on se remémore les premières discussions, le lancement d'Atalanta a connu plusieurs épreuves et son succès était pas assuré.

Une mission pas tout à fait ordinaire. Il ne s'agit pas vraiment d'une opération "classique" de conseil et d'assistance à la réforme de sécurité mais carrément d'entrainer des troupes opérationnelles d'un pays en proie à une instabilité et où les islamistes radicaux sont très présents. De fait, l'UE aurait une mission de conseil, du type de celle que les Etats mènent d'ordinaire en coopération bilatérale (la France en Afrique, l'Espagne en Amérique latine) ou du type de celle que l'OTAN et les Etats-Unis mènent... en Afghanistan. 

La piste d'une mission commune UA-UE. C'est pourquoi une des pistes envisagées les plus sérieuses pourrait être une mission commune de l'Union Africaine et de l'Union européenne. L'UE apportant son assistance technique, ses compétences et ses moyens financiers à une mission de conseil de l'UA. Ce qui serait sans doute plus acceptable pour plusieurs participants autour de la table.
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28 septembre 2009 1 28 /09 /septembre /2009 18:36
(A Göteborg) Javier Solana va le repéter, demain, aux Ministres de la défense de l'UE, réunis à Göteborg : il faut envisager diverses actions vers un soutien plus affirmé au gouvernement de transition de la Somalie et à la stabilisation de ce pays. Il ne s'agit pas seulement de prolonger l'opération anti-piraterie Atalanta à terre, en luttant contre la piraterie ; il s'agit plus généralement d'assurer la stabilisation de ce pays, classé comme « failed state » pour éviter une désagrégation plus complète. Et, pour éviter un engagement direct à l'Afghanne, les Européens (et plus généralement les Occidentaux) veulent se focaliser sur un renforcement des structures de sécurité de l'Etat somalien. Les missions de formation des militaires somaliens, menées en bilatéral par les Français et les Etats-Unis, se terminent.

Aller plus loin. Maintenant il s'agit d'aller plus loin, d'envisager un soutien plus continu en « formant les militaires, mais aussi les policiers » m'a expliqué J. Solana. « Et pourquoi pas des gardes-côtes ». Ces personnes seraient formées "off shore" : « à Djibouti, en Ouganda, ou ailleurs, cela dépend des offres ».
Si, pour l'instant, il n'est pas question d'une mission PESD de l'UE, en revanche, la réunion des Ministres de la Défense vise à commencer à parvenir à un consensus pour définir le cadre d'une éventuelle mission. « Il s'agit de voir ce qu'on peut faire ensemble pour renforcer l'Etat somalien ».

Une série de réunions (trois en tout) a eu lieu la semaine dernière à New-York permettant d'avancer vers certaines solutions. Plusieurs missions de l'UE se sont rendu dans les pays de la région, notamment le Monsieur Afrique de Solana, le général Joana, ainsi que des missions d'experts techniques ("fact finding mission), qui sont partis notamment avec l'ONU. Officiellement, aucun Européen n'a été en Somalie même. En fait, il semble bien que des contacts aient été menés à tous niveaux, y compris avec les entités autonomes du Puntland et de Somaliland. Ce qui n'est pas en soi nouveau. Les responsables d'Eunavfor comme de l'Otan ont eu des contacts avec le Puntland. Et des experts de la Commission européenne ont été présents en Somaliland.
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15 juillet 2009 3 15 /07 /juillet /2009 21:02
Carl Bildt, le ministre suédois des Affaires étrangères, l'a confirmé aujourd'hui, au nom de l'Union européenne : la mise en place d'une mission européenne de stabilisation pour la Somalie pourrait ne pas être décidée fin juillet par les 27 ministres des Affaires étrangères. Ce n'est pas encore mûr, m'a-t-il expliqué quand je lui ai posé la question lors d'un discret point de presse: « Nous étudions diverses options. Le débat est en cours. La situation est délicate, en constante évolution. Il faut donc étudier de près toutes les possibilités et surtout toutes les impossibilités ». Quant au récent enlèvement de deux agents français, présents à Mogadiscio, pour assister l'armée somalienne, même s'il n'a pas voulu le commenter, Carl Bildt a indiqué que cela «devrait encore plus compliquer la tâche ».

Parmi les options étudiées à l'Union européenne figure la possibilité d'entraîner les forces de sécurité somaliennes - un projet que la France devrait démarrer en septembre et qui a été proposé aux autres partenaires européens en mai. Mais l'entraînement de militaires n'est pas vraiment du goût de tous les Etats membres, peu habitués à un tel engagement militaire. Seconde option : la formation de policiers, voire de juges somaliens, propres à renforcer l'Etat de droit, mais "off shore". C'est-à-dire, hors de Somalie - pays trop dangereux pour y mener sur place ce type d'actions. Un peu comme on l'a pratiqué, avec l'opération Eujust Lex en Iraq, où policiers et juges sont venus se former dans des pays proches (Jordanie, etc...) ou en Europe. Autre option : davantage en lien avec l'action anti-piraterie : la formation de gardes-côtes. Avec un souci, poser suffisamment de gardes-fous, pour éviter que ces gardes-côtes, une fois formés ne passent de l'autre coté et deviennent "d'excellents pirates".

Une nouvelle action PESD prend donc du retard. Mais c'était attendu. Javier Solana, le haut représentant de l'UE, avait d'ailleurs, en juin, sonné un peu les cloches des Etats membres, les rappelant à leurs engagements (lire ici).
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11 juillet 2009 6 11 /07 /juillet /2009 13:59
Lors de sa rencontre avec Javier Solana, le diplomate en chef de l'UE, le 10 juillet, le représentant spécial de l'ONU pour la Somalie, Ahmedou Ould Abdallah (1), n'a pas eu de mots assez durs pour qualifier la situation en Somalie. « Il faut arrêter de tuer des innocents et faire des victimes dans la population. La situation humanitaire est catastrophique, pire que jamais. Ce qui se fait en Somalie est inadmissible, ce sont quasiment des crimes de guerre et crimes contre l’humanité. »

"L'Union Africaine n'acceptera jamais qu'ils arrivent au pouvoir". Le représentant spécial a appelé les "rebelles" à la raison, au dialogue, et expliqué que la communauté internationale ne cèdera pas.
« D’un côté, nous avons un gouvernement accepté par la population, reconnu par la région et communauté internationale et, de l’autre, des gens déterminés à utiliser tous les moyens, sauf la discussion, à utiliser la force pour arriver au pouvoir alors qu’ils savent que ce n’est pas une façon acceptée ni par l’Union Africaine, ni par les Nations-Unies, ni par l’Union Européenne. Ils veulent donc plus de chaos. L’Union Africaine n’acceptera jamais qu’ils arrivent au pouvoir. C’est un danger pour le pays, pour l’Afrique. Il faut bien qu’il se mettent à la raison et discutent avec leurs frères au gouvernement. »

Atalanta utile pour l'économie somalienne. Il a également salué le travail d'Atalanta, par pour les raisons que l'on connait (l'araisonnement de bateaux par les pirates) mais pour des raisons tenant à l'économie somalienne (un autre aspect souvent peu visible de l'effet de la piraterie). « Une des meilleures initiatives (dans la région) est l’opération Atalanta, c’est une manifestation de solidarité avec les Somaliens, les peuples de la région. Car la piraterie accroit le prix des denrées des pauvres, accroit l’instabilité financière dans la région en donnant des moyens énormes à des gens anonymes qui achètent, vendent, et déstabilisent. (...) C'est un grand succès militaire et diplomatique. »

-- NGV --

(1) Ould Abdallah n'est pas pas un inconnu à Bruxelles. Il a été représentant de son pays (la Mauritanie) auprès des CE dans les années 1970.

Crédit photo : Commission euroépenne, Ould Abdallah à la conférence internationale sur la Somalie en avril 2009
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29 mai 2009 5 29 /05 /mai /2009 08:15
Les 27 ministres des Affaires étrangères et de la Défense de l'Union européenne viennent de recevoir une missive dressant une sorte de feuille de route pour la Somalie. Le grand élan entamé lors de la conférence des donateurs fin avril pâtine en effet. Et Javier Solana, le diplomate en chef de l'UE, a pris sa plume pour préciser par écrit les pistes qu'il importe de développer pour la corne de l'Afrique. Manière "polie" de rappeler les Etats membres à leurs devoirs et ... leurs promesses.

Il y a urgence, ne serait-ce que pour des motifs économiques et de développement. L'ensemble de la région est touchée  : le trafic dans le canal de Suez aurait ainsi chuté de près de 25%
(une partie est imputable à la crise économique, l'autre... aux pirates, de nombreux bateaux faisant désormais le tour par l'Afrique du sud, ou évitant la zone, par exemple les navires de croisière qui commencent à retirer de leur programme les Seychelles...).

La lettre reste confidentielle, mais certains extraits me sont parvenus (j'ai rajouté entre parenthèses certains éléments qui ne figurent pas dans la lettre mais sont sous-entendus).
En voici les principaux éléments.

Axe centre du message : l'action européenne - sur mer - doit se compléter - à terre - d'une palette de mesures destiné à stabiliser la Somalie et sinon éradiquer du moins limiter fortement le foyer de piraterie.
Tout le monde reconnaît que pour résoudre la piraterie, il faut agir à terre, stabiliser la Somalie, promouvoir le développement... Mais pour passer aux actes c'est une autre histoire.

Sur mer, il faut renforcer l'opération Atalanta (compléter le personnel notamment, un quart de l'effectif à l'Etat-major d'Atalanta n'est pas encore en place !, lire ici), la prolonger - ce qui nécessite de générer dès aujourd'hui les offres pour 2010 (afin d'éviter tout "trou" entre les opérations) - et dont il faut étendre le mandat.

Sur terre, Javier Solana propose donc six pistes pour le long terme :
- nomination d'un envoyé spécial pour la Somalie (qui coordonnera toute l'action de l'UE sur ce pays) ;
- renforcement de l'AMISOM, la force de paix de l'Union africaine
- soutien à la réforme de sécurité somalienne - police, gardes cotes, forces de sécurité... - comme l'a proposé la France - soutenue par l'Allemagne et les Pays-Bas - au dernier conseil des ministres des Affaires étrangères (lire ici);
- développement maritime ;
- stratégie de long terme pour la Somalie ;
- cadre légal au niveau international sur la piraterie (NB : le groupe de contact des experts juridiques de plusieurs pays se réunit à New-York aujourd'hui).

Bruxelles2 - Nicolas Gros-Verheyde
Crédit photo : Conseil de l'Union européenne - au Conseil des ministres informel de mars 2009
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Derrière les murs, la politique (européenne) des affaires étrangères (PESC), de sécurité et de défense commune (PeSDC) est décryptée. Stratégie, politique, gestion de crises, industrie ou transport aérien militaire, surveillance maritime et protection civile...Missions militaires et civiles de l'UE (Bosnie-Herzégovine, Kosovo, Géorgie, Moldavie / Ukraine, Afghanistan, Irak, Palestine, Congo RDC, Guinée-Bissau, Haïti, Océan indien, Somalie, Tchad).

logo_ouestfrancefr.pngL'éditeur : Nicolas Gros-Verheyde. Journaliste, correspondant "Affaires européennes" du premier quotidien régional français Ouest-France après avoir été celui de France-Soir. Spécialiste "défense-sécurité". Quelques détails bios et sources.