L'émissaire européen, Pierre Morel, représentant spécial pour l'Asie centrale, qui part demain pour le Kirgizstan (en compagnie de la chef de délégation de la Commission dans le pays, Chantal Hebberecht, qui était en ce moment à Bruxelles) ne sait pas vraiment où il va mettre les pieds, m'a-t-on confirmé dans son entourage, malgré son excellente connaissance du terrain . La situation est, en effet, très mouvante. Et surtout, on a affaire à un « Etat sans le sou ». Un soutien financier semble ainsi urgent !
On part dans le brouillard. « On est un peu dans le brouillard. On ne sait pas vraiment ce qu’on va trouver. » assure -t-on coté européen. C'est pour cela que le premier travail sera de « procéder à une évaluation ». Ce travail se fera en « étroite coordination avec les autres représentants spéciaux de la Communauté internationale » m'assure-t-on. « Ce sera un trio UE-OSCE-ONU. » Pierre Morel s'est ainsi déjà entretenu - par téléphone - avec le représentant de l'OSCE qui est déjà sur place et le fera avec celui de l'ONU qui arrive. Il s'agit aussi « de faire le point avec les différents responsables du nouveau pouvoir. Nous avons une série de rendez-vous prévus. »
Situation mouvante. Sur place, en effet, « La situation est très mouvante. Et il y a encore quelques troubles » selon les premiers rapports européens reçus. Le nouveau pouvoir a mis en place des « patrouilles citoyennes, mixtes, composées de volontaires et de policiers. » Mais la situation n'est pas stabilisée. Des responsables d'ambassade russe et américain ont été pris à partie, hier, lors de la visite au gouvernement.
Un Etat sans le sou. Le moindre des problèmes posés sur place est que l'Etat n'a plus un sou. « Il reste en tout et pour tout au nouveau pouvoir, 16 millions de $ ». Ce n'est pas suffisant pour assurer la vie du pays, à commencer par payer les besoins en pétrole. C'est aussi pour cela qu'un des premiers du numéro 2 du nouveau pouvoir a été vers Moscou. « Les besoins sont donc importants, à la fois financiers et en matière d'urgence médicale ». Bakiev, l'ancien président qui s'est réfugié dans son fief, à Djalalbad, au sud du pays, a semble-t-il emporté avec lui le magot. L'utilisation qu'il ferait de cet argent est facile à deviner.
Russes en renfort : ne pas exagérer. Quant à l'arrivée de 150 parachutistes russes sur place, un expert de l'UE dédramatise. « Il ne s'agit que de 150 parachutistes, qui visent à protéger les bases russes sur place et ceux qui y vivent. » Situation justifiée. «En fait, la Russie qui ne peut plus tenir toutes ses bases avait procédé, depuis plusieurs mois, à un retrait discret de certaines de ses troupes.» Ce serait juste un retour à un effectif suffisant « pour assurer une protection contre les troubles et les pillards nombreux ».