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16 décembre 2009 3 16 /12 /décembre /2009 01:59
Ashton-UE0912.jpgHier soir, au Parlement européen à Strasbourg, à huis clos, Catherine Ashton, la Haute représentante était un peu chez elle, accueillie dans la salle des Socialistes & Démocrates (S&D), pour un échange de vues, à huis clos. Il est de tradition, en effet, que les commissaires rencontrent leur famille politique en petit comité pour un dialogue "informel". Ils font de même avec d'autres groupes politiques ou les présidents des commissions intéressées. C'est ainsi une manière intelligente de préparer la future audition. La Haute représentante sera, en effet, la première des commissaires auditionnée par les commissions du Parlement européen (affaires extérieures, défense, développement). Ce sera le 11 janvier prochain. Il est aussi de tradition que le journaliste essaie d'en savoir plus, en planquant un peu. Ce que j'ai fait (à vrai dire j'étais un peu seul...).

Pour un vrai service diplomatique. Dans la salle, Catherine Ashton a ainsi expliqué son futur travail, comment elle entendait l'assumer, et ses différentes priorités. Rien de bien nouveau par rapport à la première audition le 2 décembre, de l'avis de tous les participants. Mais tout de même un dialogue d'une bonne heure, un peu plus pointu sur certains sujets. Ainsi sur l'Irak, Ashton n'a pas voulu se démarquer de la position de Tony Blair : "c'était simple, soit je quittais le gouvernement, soit je restais. En fait - a-t-elle ajouté - nous n'étions sans doute pas vraiment préparés à cette guerre". Et nous n'avions pas toutes les informations en notre possession. Concernant les Etats-Unis, elle a rencontré récemment Hillary Clinton qui l'a félicité ; elle estime ainsi que les relations UE-USA pourraient être marquées par "moins d'opacité et davantage de confiance". Ashton s'est montrée ainsi partisane d'une politique européenne qui puisse "ne pas dépendre tout le temps de la politique américaine". En revanche, sur des questions délicates comme la Palestine, elle n'a pas voulu se prononcer et aller plus loin. Sa première priorité est de "mettre en place le service d'action extérieur". Elle veut en faire un "vrai service, pour mener la diplomatie de l'Union" a-t-elle assuré, "avec les moyens budgétaires nécessaires, non pas pour remplacer la diplomatie des Etats membres mais pour y ajouter". C'est sa première priorité. Et d'oser un trait d'humour : « On verra si j'arrive à passer la Noël », faisant allusion à son "full top agenda". « J'ai au moins 500 rendez-vous de programmés dans l'année » a-t-elle expliqué. Elle a cependant demandé lors de son hearing, début janvier, d'avoir plus de temps pour répondre aux questions, pour ne pas être accusée par certains députés (notamment britanniques) de ne pas répondre aux questions.

Une voix féminine qui passe bien. Catherine Ashton que j'ai réussi à interroger à la sortie, environ 45 secondes, jusqu'à un garde du corps s'impose, n'a eu qu'un mot : « je suis très contente de faire ce job, je l'assume avec honnêteté ». Et effectivement, c'est le mot qui semble revenir dans la bouche de beaucoup de députés. Comme le précise la Portugaise Ana Gomes, « Ce que j'aime le plus chez elle, c'est son attitude ouverte, honnête. Elle est très consciente de ses capacités, ne prétend pas tout savoir ou vouloir nous tromper. C'est très important. Elle a une bonne approche générale, des questions stratégiques ». « Elle est carrée » a ajouté de son coté la Française Pervenche Bérès. « Qu'elle soit critiquée par les diplomates est plutôt pour moi une bonne chose » a expliqué son compatriote Kader Arif. « Avoir une voix socialiste dans la politique étrangère est importante. Mais ce qui me semble aussi important, c'est qu'il y a chez elle une volonté d'échanger avec les parlementaires, des qualités humaines, c'est important en matière politique ». « C'est un produit pur du Civil service » complète le Roumain Ioan Mircea Pascu « Elle n'est pas brillante au sens où on l'entend d'habitude mais elle vraiment de bonnes dispositions. Elle pourra parfaitement mettre en place le service d'action extérieur ». Pour le travailliste britannique Cashman, « Elle a vraiment de bonnes connaissances, elle est enthousiaste. Et puis quelqu'un qui a pu négocier le Traité de Lisbonne face à la chambre des Lords ne peut pas vraiment être mauvaise » a-t-il assuré. Dans ce concert de propos plutôt louangeurs, quelques couacs quand même : "on n'apprend rien" dit l'un, "elle ne répond à aucune question - dit l'autre - c'est ch...". Des propos négatifs très masculins surtout, peut-on remarquer...
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3 décembre 2009 4 03 /12 /décembre /2009 01:07

Bien sûr, ce n'est qu'une première présentation. Bien sûr, Catherine Ashton n'a eu que deux jours pour se préparer. Bien sûr, toute son équipe n'est pas constituée, comme elle le dit elle-même : « Je n'ai pas de bureau, pas d'équipe, de cabinet, Je n'ai pas autre chose que moi. Ce n'est pas une excuse. C'est la réalité ». Mais tout de même, après le premier "échange de vues" entre la nouvelle diplomate en chef de l'UE et le Parlement européen, on reste un peu sur notre faim.

Certes le tempo donné par le président (PPE, Italie) n’a pas vraiment permis à l'intéressée d’entrer dans les détails. En lui limitant à quelques minutes chacune de ses interventions en réponse, il n'a pas permis d'approfondir les sujets. Mais il faut dire aussi que la commissaire n'a jamais pris tout le temps imparti, prétextant cette limite de temps pour survoler tous les "vrais" sujets de relations extérieures. L'audition s'est même terminée plusieurs minutes en avance sur l'horaire prévu... 

Certes les parlementaires, à vouloir balayer tout le champ des sujets, de la Colombie à la Bosnie, en passant par la Russie, l'Otan, la Somalie, le Honduras, etc. n'ont pas, eux-mêmes, facilité la consistance des réponses. Et, du coup, on est resté souvent à des banalités. De fait, Ashton avait bien appris ses « messages clés ». Elle est souvent restée le nez sur ses papiers - comme l'étudiante qui a toute une série d'anti-sèches au cas où - et les a restitués avec la conviction minimale pour que la plupart des parlementaires soient sinon heureux, du moins pas mécontents. De toute façon, les grands groupes du parlement (PPE, socialistes, libéraux) avaient annoncé la couleur : ils ne voulaient pas en découdre (voir ci-dessous). Cet échange de vues était donc un peu inutile. Il a eu, au moins, une vertu pour Ashton : permettre une répétition de la "vraie" audition qui devrait se tenir en janvier (le 11 janvier après-midi selon les premières informations). Un examen blanc en quelque sorte...


Une ambition : faire de la "démocratie tranquille"

 

Sa philosophie. En une phrase, Ashton a résumé comment elle voyait son travail: Je crois beaucoup à la « démocratie tranquille », il faut construire la confiance et travailler en commun, on peut travailler sous les projecteurs ou en coulisses. Nous avons (l'Europe) une réputation dans le monde sur nos valeurs, nous sommes le plus grand fournisseur d’aide humanitaire, de projets. »

Grands dossiers : on verra. Mais, face aux grands dossiers qui se trouvent sur sa table - Iran, Russie, Géorgie, Bosnie... - pas ou peu de réponses. "Je n'ai pas le temps d'entrer dans le détail", "J'attends la réunion...", "c'est important (ou) au coeur de mes préccupations" ont été ses réponses favorites. Même sur l'Afghanistan, sujet du jour, elle n'a pas plus répondu. Quand j'ai pu l'approcher, à la sortie, je lui ai redemandé ce qu'elle pensait d'un "surge" civil de l'UE. la réponse a été : « On verra. Nous devons en discuter au Conseil »...

Somalie : important. Seul point où elle est allé un peu loin : la Somalie. « C'est important. Nous devons travailler avec l'Union Africaine. Il est important de stabiliser et sécuriser la Somalie. Il faut voir comment lancer et appuyer les initiatives de l'Union africaine sur le terrain ». Les initiés auront ainsi pu comprendre que l'opération de formation des soldats somaliens pourrait ainsi être la première "grande" décision en matière de PESD qu'Ashton prendra.

Autres points à signaler : sur l'Agence européenne de défense, à la question d'Arnaud Danjean (UMP) président de la sous-commission Défense, Ahston a convenu que « L'agence européenne de défense avait des succès. Mais qu'il y avait beaucoup de pain sur la planche. Et qu'il fallait resserrer la coopération. »

Au final, comme l'a, assez bien résumé, l'eurodéputée française Hélène Flautre (Verts) à la sortie de la réunion: « Mme Ashton est tout à fait compétente dans son rôle de diplomate, si diplomate et prudente qu'on ne connaît pas le fond de sa pensée ».


Une surprise politique

Là où Ashton a vraiment surpris positivement, c'est au plan politique. On sent là une certaine expérience des travées, des couloirs politiques qui est apparemment bien passée au niveau des parlementaires qui ont même applaudi à une ou deux reprises et souri à son humour un peu pincé. D'autant qu'elle a caressé les parlementaires dans le sens du poil, en soulignant, à plusieurs reprises, son désir « d'associer le Parlement européen à son travail », que rien ne serait décidé sans lui, etc... Toutes choses que les parlementaires adorent entendre. Elle a aussi répondu, sans trop de détours, à ses détracteurs sur son inexpérience, sa nationalité, son passé... devançant souvent ces questions un peu difficiles (1).

Expérience internationale. « J'imagine que ma nomination vous a fait comme une surprise. C'était aussi une surprise pour moi, mais une surprise bienvenue. Je n’ai jamais été quelqu'un qui a pris son travail de manière restreinte. J’ai 28 ans d'expérience de négociation et de défense (advocacy) de dossiers. J’espère qu’elle sera reconnue. »

Processus de nomination. « J'ai été nommée par 27 Etats membres, à l'unanimité. Ce n'est peut-être pas votre choix » répond-elle à un député (le tory britannique Charles Tannock). « Mais c'est le choix de tous les Etats-membres ». (...).

Britannique mais européenne. « Je ne suis pas une représentante du gouvernement britannique. Je l’ai déjà montré dans le passé au Commerce. Je suis proeuropéenne dans mon pays et très fière d’être reconnue comme telle » a-t-elle expliqué (ce qui est somme toute courageux car proclamer qu'on est européen quand on est britannique n'est pas automatiquement un compliment).

Passé. à la question, assez attendue, du député UKIP de permanence, David Campbell-Bannerman, elle l’a touché par un pupercut à l’estomac (pas gentil, gentil, mais nous sommes en politique) : « Nous avons partagé, monsieur, verre de champagne à Genève, il y a quelques jours et vous avez pris soin de me prévenir de votre question. » Et toc ! Puis Ashton a attaqué la question de fond : « 1982, c’est loin. Je n’ai pas touché d’argent directement de partis communistes. J’ai fait toujours partie travailliste, et nous luttions avec des moyens démocratiques. (A la CND), c’est moi même qui ai procédé à l’audit des comptes. Nous étions jeunes. On ramassait de l'argent dans des sceaux au fur et à mesure lors des manifestations. Je ne peux pas donc dire d’où vient exactement l’argent qu'on prenait dans des sceaux ».

 

Commissaire avant tout

Mes collègues les commissaires. L’impression semble se confirmer… La Haute représentante a du mal à se faire à son nouveau rôle, indépendant, autonome. Elle est, avant tout, une commissaire aux relations extérieures, avec quelques outils en plus, mais n’entend pas vraiment déborder de ce rôle pour le moment. A plusieurs reprises (Moldavie, échange de données avec les USA...), elle a ainsi botté en touche et renvoyé ces sujets sur les autres commissaires. « Je dois en parler avec mes collègues » a été ainsi une de ses phrases clés.

Le café est meilleur à la Commission. Et si on avait un doute, elle l'a tranché, de façon définitive en désignant son siège. Je « siégerai à la Commission européenne » a-t-elle ainsi confirmé. « Je sais où se trouve le café, et comment fonctionne l’immeuble, et je pas le temps de réfléchir à des questions logistiques… » a-t-elle justifié en plaisantant. « Je pourrais consacrer tout mon temps à des visites au Conseil et à des activités à l’extérieur de l’UE » a-t-elle ajouté.

Sous couvert de plaisanterie, elle répond ainsi à une question très stratégique. Commissaire, Catherine Ashton était, Commissaire, elle reste et restera (dans l'ombre du président de la Commission européenne). 


(couloirs parlementaires) Ashton, un atout dans la manche du PPE au cas où ?

Les groupes politiques ont refusé de formaliser un satisfecit quelconque à l'issue de cette réunion. La question a été évoquée apparemment sérieusement entre les différents coordinateurs de groupe de la Commission Affaires étrangères du Parlement européen et entre présidents de groupe. Non que l'avis soit par trop négatif ou positif.

En fait, il s'agit plutôt d'une tactique de couloir. Les chrétiens-démocrates du PPE notamment craignent qu'en avalisant la socialiste Ashton, ils perdent toute possibilité de prévenir un dommage sur un de "leurs" commissaires. Apparemment, ils craignent notamment des attaques sur la commissaire bulgare Jeleva (la gestion du ministère des Affaires étrangères en Bulgarie est délicate et un ou deux vice-ministres sont menacés par des affaires). Ils gardent donc l'atout Ashton dans la manche. Un peu comme un "équilibre de la terreur" : si tu menaces mon commissaire, je fais sauter le tien...

Comme me l'a résumé un député au sortir de la salle, "si on veut planter Ashton, on peut le faire quand on veut, c'est facile...". Et, effectivement, passés les commentaires aimables,  les eurodéputés spécialistes des affaires étrangères sont restés vraiment sur leur faim. "Si nous avions dû donné notre avis aujourd'hui, c'est clair, elle ne passait pas" m'a confié un député.

(1) voir le Speech introductif d'Ashton

(crédit photo : © NGV)

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1 décembre 2009 2 01 /12 /décembre /2009 12:30
Pour l'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, j'ai eu l'occasion de discuter quelques minutes avec Giles Merritt. Britannique, ancien correspondant du Financial Times, il est aujourd’hui secrétaire général des Amis de l’Europe (Friends of Europe), un des thinks tanks (cercles de recherche) les plus en vue à Bruxelles, il est, sans doute, un des meilleurs connaisseurs du pouvoir européen. Une version raccourcie de cette interview est parue aujourd'hui dans Ouest-France (*), centrée davantage sur l'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne et du nouveau pouvoir. Mais naturellement notre conversation a roulé également sur des sujets qui nous tiennent à coeur...

Haut représentant, service diplomatique, Commission européenne
dossiers prioritaires (Iran, Russie, Moyen-Orient, Afghanistan Europe de la Défense, Otan),
Catherine Ashton, Javier Solana

Avec le Traité de Lisbonne arrive un nouvel Haut représentant aux affaires étrangères, confié à une Britannique, Catherine Ashton. Une révolution ?

Non. Je ne crois pas qu’il faille espérer de grand changement rapidement. Son premier travail, et le plus difficile, sera de mettre en place, le service européen d’action extérieure. Ce que j’appelle plutôt le « service diplomatique européen », c’est plus compréhensible. C’est important, qu’à Londres et Paris, Foreign Office comme Quai d’Orsay, se livrent de plein cœur à la création de ce service, n'aient pas de réticences, ne mettent de freins ou de crocs-en-jambes, envoient leurs meilleurs éléments à Bruxelles. Il faudra regarder de près les noms des diplomates, prêtés ou transférés à Bruxelles. Sont-ce des responsables importants ou des légers. Quand les Français et les Britanniques se seront impliqués, les autres suivront. S’ils ne s’impliquent, c’est mort par avance. Il sera impossible à la Commission européenne de créer un service diplomatique tout seul.

Mort d'avance ! Vous êtes un peu rude. Il existe déjà les délégations de la Commission européenne ? Et puis il n'y a pas que les Français et les Britanniques

Non. Ce n’est pas le métier de la Commission européenne. Elle n'a pas l'expertise nécessaire. Les délégations sont plutôt – le meilleur mot qu’on puisse dire - légères. Certains fonctionnent très bien. D’autres sont de vrais désastres. En fait, les délégations ne sont pas des postes diplomatiques la plupart du temps, elles ont un rôle plutôt techniques, pour gérer les subventions mais surtout pour expliquer et appliquer la réglementation européenne (commerce, marché intérieur, concurrence…). Elles font un travail de juristes, pas de diplomates. Maintenant il y aura de vrais ambassades de l'UE. Pour cela, il faut une expertise un peu différente. Et cette expertise se trouve dans les Etats qui ont le meilleur réseau diplomatique.

A vous entendre, la création de ce service diplomatique va prendre beaucoup de temps et d'énergie ?

Oui. Il faut remanier les relations entre Commission européenne et Conseil, très compliqué, éviter les chausse-trappes avec les Etats membres. Le travail de lancement du service diplomatique ne laissera pas beaucoup de temps pour la création des politiques externes. Ça ne viendra que dans une deuxième phase. C'est pour cela que je pense qu'il ne faut pas attendre de grands changements ni de révolution de ce poste.

Et Ashton, personnellement, vous la connaissez ?

A peine. Je n’ai rien entendu contre. Mais j'ai surtout entendu très peu. Le dossier commerce extérieur – avec Doha en suspens, n’a pas été, ces derniers temps, un dossier vraiment très actif. Elle n’a pas de "track record". Elle n’a pas eu l’occasion de faire ses preuves. Elle l’a maintenant. Et très vite…

Vous ne semblez pas enthousiaste ?

Ce n'est pas une question d'être enthousiaste ou d'être sceptique. Il ne faut pas spéculer avant de l'avoir vu à l'oeuvre.


Quels seront ses dossiers prioritaires en matière de politique étrangère, ses dossiers tests ?

L’Iran, l'Afghanistan - avec les relations avec Washington - et le Moyen-Orient seront des dossiers tests. Bien que sur ce point, je crois que ce sera plutôt d'abord le travail de Van Rompuy car il y existe d'abord de sérieuses divergences entre Européens qu'il faut résoudre avant de pouvoir intervenir. Il y a aussi, et surtout la Russie. Solana avait tout à fait raison quand il disait que cette relation avait été négligée par l’Otan et aussi par l’UE. Nous avons toute une série de questions en jeu : l'énergie, la sécurité, avec également toute une région d’instabilité autour de l’Afghanistan, le Caucase, les ex-républiques soviétiques, jusqu'aux confins de la Chine. Cela ne peut pas être négligé.

Au niveau de l'Europe de la défense...

Les relations entre Europe de la défense et l’Otan ne peuvent pas non plus être laissées de coté. Il faut qu’elle s’y lance le plus vite possible. Si on les laisse de côté, ce dossier va pourrir. Et ils n'est pas très sain déjà.

La nouvelle Haute représentante aura un agenda chargé. N'est-ce pas trop pour une seule personne ?

Ça fait beaucoup effectivement. Car, à coté de tous les problèmes pratiques de ce nouveau service, il y a des dossiers très "live". Mais je pense qu’il y a des gens qualifiés, comme Robert Cooper (1) pour continuer à gérer tout çà. Ce que je ne comprends pas encore sera le rôle du Secrétaire général du Conseil, De Boissieu. Ça fait partie de la zone artistique dont je parlais tout à l’heure. Et De Boissieu est un... artiste à sa manière

Javier Solana s'en va discrètement. Comment l'avez-vous apprécié ?

Son grand atout est qu’il n’a pas commis d’erreur. Il aurait pu en commettre (des erreurs) qui auraient mis en difficulté l’idée de la politique commune dès le début. Il ne s’est pas permis cela. Il a été très prudent. Et du coup cela a permis de progresser. Je crois qu'Ashton continuera comme çà. Elle est entourée de la même équipe.


(1) Cooper est le directeur général de la DG E (relations extérieures) du Conseil. Il s'est notamment beaucoup impliqué dans le dossier iranien

Traité de Lisbonne, Nouvelles institutions, présidence fixe du Conseil européen, rôle renforcé du Parlement européen, intervention des parlements nationaux, nouveau centre du pouvoir, démocratie du consensus

Le traité de Lisbonne crée un poste permanent, de président pour le Conseil européen, confié pour 2 ans et demi au Premier Ministre Belge, Herman Van Rompuy. Comment voyez-vous son rôle ?

Il sera plutôt un chairman qu’un Président - au sens français du terme -, un conciliateur plutôt qu’une star. Il aura pour rôle d’être l’architecte du consensus, de l’Europe qui parle d’une seule voix, de créer cette parole européenne. Ce qui manque aujourd’hui. Il ne paraît pas question qu’il soit la voix lui-même. Il y a beaucoup de sujets où les Européens ont un avis divergent : l’environnement, la réglementation des marchés financiers, la question fiscale, l’avenir de l'Euro… De ce point de vue, Herman Van Rompuy est l’homme de la situation. Il a du caractère et une expérience assez étonnante en Belgique. Le nombre de dossiers où nous n’avons pas vraiment de politique et de position européennes est important. Van Rompuy a du « pain dans les planches ».

Ce ne sera donc pas vraiment le visage de l'Europe dans le monde

Personnellement, je voyais plutôt le président du Conseil européen comme un personnage, se baladant partout dans le monde - à Pékin, à New-York... - représentant et personnifiant l’Europe. Dans sa version actuelle, il sera beaucoup plus à Bruxelles ou dans les Etats membres, en essayant de concilier les différents points de vue. Ce qui, d'une certaine façon, est aussi nécessaire: on peut se demander à quoi cela sert-il effectivement d'aller représenter l'Europe si on n'a pas accord à 27 à affirmer. Cela aurait pu d'ailleurs être assez dangereux comme système.

Et la présidence des Conseils de ministres continue de tourner ?

Oui. Le traité de Lisbonne a prévu que la présidence des réunions de chefs de gouvernement et d’État soit permanente. Mais, sauf pour les Affaires étrangères, la présidence des conseils de ministres continue de changer tous les six mois. Ainsi, après la Suède aujourd’hui, l’Espagne prend la présidence en janvier. Ensuite ce sera la Belgique, au deuxième semestre 2010. Et ils pensent à une présidence très européenne. Ce sera alors, je pense, le vrai "test case" pour résoudre une question qui n'a pas encore été abordée : comment la présidence permanente va travailler avec les présidences tournantes ? Il reste toujours un flou artistique sur la répartition des pouvoirs...

Le Parlement est renforcé. Mais il n'a toujours pas le pouvoir d'initiative ?

Non. Et, pour le moment, on n’en prend pas le chemin. Car, pendant encore dix ans, nous serons en train de digérer Lisbonne, de créer de nouvelles relations, de nouveaux mécanismes, il n’est donc pas réaliste d’avoir de nouvelles modifications institutionnelles avant. Mais le Parlement européen devient un peu plus adulte: ce n'est pas vraiment les compétences qui s'ajoutent, on prête d'attention à certaines dispositions juridiques. Ce qu'il sera intéressant d'observer, sera de voir l’atmosphère dans les semaines à venir, pour l'audition et la confirmation des nouveaux commissaires. Est-ce que le Parlement européen sera difficile ou différent de ce qu’il a été dans le passé ?

Autre innovation, les Parlements nationaux auront aussi leur mot à dire ?

Je vois çà un peu avec un œil britannique (sourire). Je pense à Westminster (la Chambre des communes). Quand je vois que les députés britanniques ne savent rien de ce qui se passe à Bruxelles, je suis plutôt sceptique sur ce rôle des Parlements nationaux. D'un autre coté, il est indispensable que les élus nationaux se sentent un peu plus impliqués. Comment faire ? je n’ai pas d’idée. Il y a encore beaucoup de travail à faire pour que les Parlements nationaux jouent un rôle important.

Où sera alors le vrai pouvoir ?

C’est une très bonne question. Vous savez, comme souvent au niveau européen, il y a un certain flou artistique. Dans mon esprit, c’est aussi positif. On est loin du « Bruxelles impose », dénoncé par certains. Ce flou artistique permet de laisser une place à la discussion, à la négociation, pour permettre aux différents interlocuteurs d’être écoutés. Ce n’est pas la démocratie directe. C’est une forme de sensibilité politique qui équilibre le système de décisions. Ce que les Américains appellent check et balance (limitation des pouvoirs).

N’est-ce pas un peu anti-démocratique ?

Non. C’est une forme de démocratie. Ce n’est peut-être pas tout à fait le modèle républicain français ou fédéral allemand. C’est un modèle sui generis. D'un coté, on critique l'UE de n'être pas assez démocratique, de l'autre on lui reproche d'être lent et compliqué. Mais être à 27 et décider en démocratie est lent et compliqué. La recherche d’un consensus n’est pas forcément anti-démocratique. Au contraire…


Propos recueillis par Nicolas GROS-VERHEYDE.


(*) version disponible ici

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29 novembre 2009 7 29 /11 /novembre /2009 00:00

Depuis les presque 30 années qu'il siège au Parlement européen, Elmar Brok (CDU) est une des références pour qui s'intéresse un peu à la politique étrangère européenne. Membre du Parlement depuis 1980, Elmar Brok a été de tous les débats. Il a été présent à toutes les conférences intergouvernementales qui ont permis d'élaborer les traités successivement de Maastricht, Amsterdam, Nice puis la Constitution européenne (il était membre de la Convention qui élabora ce texte). De 1999 à 2007, il fut le président de la Commission des Affaires étrangères du Parlement européen. Il est toujours le porte-parole sur ce sujet des chrétiens-démocrates du PPE (le plus grand groupe du Parlement européen). Donc, quand il exprime une opinion, des doutes, un silence, une approbation, cela mérite d'être écouter attentivement. 

Dans l'entretien que nous avons eu, si Elmar Brok reste très prudent et ne veut pas porter de jugement préconçu sur la nouvelle Haute représentante, Catherine Ashton. Mais on sent, pour le moins un manque d'enthousiasme, voire un certain sceptiscime. Le mot "inexpérimenté" est celui qui revient le plus souvent dans sa bouche. Voici ces propos quasi in extenso.

Catherine Ashton : son inexpérience est une interrogation... « C'est une vraie surprise. Catherine Ashton n'a pas d'expérience dans la politique. Une telle surprise que personne n'avait, jusqu'à peu, cité son nom". Pour autant, il ne veut pas préjuger. « Nous allons voir lors de l'audition, au Parlement européen, si elle est vraiment qualifiée pour le job. Nous avons un premier échange de vues cette semaine (le 2 décembre). Nous avons quelques doutes. Et c'est normal : elle n'a aucune expérience. C'est le point principal (de nos interrogations). On ne sait rien d'elle. On veut donc savoir où elle veut aller, ce qu'elle veut pousser. »

Sur le fond, Brok voit deux questions principales qui permettront de savoir si elle sera une "bonne" Haute représentante : « 1. Est-elle pour la politique étrangère dans son intégralité ? 2. Dans quelle voie veut-elle construire le service extérieur ? ».  Parmi les deux-trois dossiers prioritaires, Brok estime qu'il y a : « la Russie, le partenariat oriental, l'Iran ».

Sur la charge de travail que représente le poste (regrouper la charge de Haut représentant, commissaire et président du Conseil des Ministres des Affaires étrangères, cela peut sembler beaucoup pour une seule personne), Brok exprime un sentiment pour le moins. « Non, ce n'est pas de trop. C'est une nécessité pour la politique étrangère de l'UE, d'avoir une seule personne qui coordonne la politique, un seul numéro à qui téléphoner... »

La commissaire ne doit pas être aux ordres de Londres. Le fait qu'elle soit britannique n'influe, selon l'eurodéputé, dans aucun sens, ni positif ni négatif, même si une certaine crainte se ressent. « La nouvelle Haute représentante doit particulièrement exprimer ces vues : comment construire une politique de défense stratégique et cohérente au niveau de l'Union et construire notre propre identité en matière de politique étrangère ? »

De façon très nette, Elmar Brok demande tout de même à la nouvelle Haute représentante : « de prouver qu'elle n'est pas simplement là pour retranscrire les positions du Foreign office ». Et il ne mâche pas ses mots sur le fait qu'en tant que commissaire au Commerce, elle ait dérogé à la règle que le chef de cabinet soit d'une nationalité différente de celle du commissaire : « Ce n'est pas acceptable. Il ne peut pas y avoir un chef de cabinet et un directeur du service extérieur de la même nationalité que le commissaire » (*).

Prouver qu'il n'y a pas de corruption possible. Quant aux allégations qui remontent aux années 1970 sur le rôle joué par Catherine Ashton dans la gestion du CND (collectif pour le désarmement nucléaire qui, selon le député de l'UKIP Batten, aurait reçu des fonds de l'URSS **), Elmar Brok n'entend pas tomber dans le piège du populisme et mélanger les genres. Pour lui, cependant c'est clair : « Si elle a approuvé ces fonds, dans une relation personnelle avec l'URSS, c'est peut-être délicat. Et nous devons vérifier qu'il n'y a pas ou n'y aura pas possibilité de corruption. (A Ashton) de nous donner des éléments d'appréciation pour ceci ».


(*) Julian King, l'ancien ambassadeur britannique au COPS, le comité politique et de sécurité, avait été aussi le chef de cabinet de Mandelson et a continué avec C. Ashton. Il n'a quitté la Commission qu'il y a quelques semaines, prenant ses fonctions d'ambassadeur Uk en Irlande, et a été remplacé par James Morisson (pas la pop star !). Il est parti depuis si peu de temps qu'il figure d'ailleurs toujours sur la photo de groupe diffusée sur le site de la Commission européenne à la page du cabinet Ashton. Quant au directeur de la DG relations extérieures, c'est actuellement le Portugais Joao Vale de Almeida, un haut fonctionnaire excellent qui a surtout été, durant ces cinq dernières années, le directeur de cabinet de José-Manuel Barroso. Ce ne sera pas lui faire injure de dire que c'est un moyen pour le président de la Commission de garder ainsi la haute main sur la politique et un contrôle étroit sur l'action de son nouveau commissaire.

 

(**) Gérard Batten (UKIP parti qui milite pour le départ du Royaume-Uni de l'UE) mène une campagne active contre la nouvelle commissaire. Il a ainsi envoyé une lettre à JM Barroso et à tous les députés. Lettre dont nous avons eu copie :

« Dear Mr Barroso,
I was unable able to ask you a question today in the chamber. I would therefore like to make you acquainted with certain facts and ask you three questions.Baroness Ashton was Treasurer for the Campaign for Nuclear Disarmament (CND), 1980-1982. CND was notoriously secretive about its sources of funding and did not submit its accounts to independent audit; however, after public pressure they were audited for the first time in 1982-1983 (Godfrey Lord & Co). It was found that 38% of their annual income (£176,197) could not be traced back to the original donors.  The person responsible for this part of CND fund-raising, from anonymous donors, was Will Howard, a member of the Communist Party of Great Britain.
The Russian dissident and internationally respected figure Vladimir Bukovsky, has shown from his research that the nuclear disarmament campaigns across Europe were largely funded by the Soviet bloc. Mr Bukovsky has proven with hundreds of top secret documents from Soviet archives that the worldwide disarmament campaign in the 1980s was covertly orchestrated from Moscow. The money was channelled through communist parties or other pro-Soviet organisations and individuals.
If therefore seems very likely that the unidentified income came from the Soviet bloc.
If Baroness Ashton did not know where the unidentified income came from she was incompetent. If she did not ask where it came from she was negligent.  If she did know that it came from the Soviet block then she knowingly accepted money from a hostile foreign power in order to undermine Britain's and NATO's defence policies.
Anyone who was compromised by the Soviet Union in the 1980s remains compromised by the Russian Federation.
In the light of these facts, my questions are:
1) Do you still believe that she is a fit and proper person to be in charge of the EU's (and Britain's) Foreign and Security Policy
2) Do you intend to investigate these claims further? If not, why not
3) The answer to the second question is 'Yes' would you like me to supply you with the contact details of Mr Bukovsky, and others, who can give you more detailed information about this matter? »

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21 novembre 2009 6 21 /11 /novembre /2009 11:40
La nomination de Catherine Ashton comme Haut représentant a été, apparemment, la dernière option envisagée par les Britanniques.

Le matin du sommet, le seul point sûr était que le poste était dévolu à un social-démocrate, britannique. La position avait été avalisée par les principaux groupes du Parlement européen (pour éviter une sortie de route lors des auditions). Mais au niveau britannique, plusieurs noms ont été envisagés. Ainsi, e
n début d'après-midi encore, la préférence de Gordon Brown, le Premier ministre, et l'option la plus sérieusement envisagée, était de nommer à Bruxelles Geoff Hoon. Un Cv autrement plus adapté au poste de Haut représentant même si l'homme n'est pas exempt de critiques.

Geoff Hoon : l'homme de la défense britannique. Ancien Secretaire (Ministre) à la Défense britannique de Tony Blair, durant six longues années, d'octobre 1999 à mai 2005, Geoff Hoon a assuré une bonne partie des choix stratégiques opérationnels et industriels de la Grande-Bretagne de la dernière décenne. Il a ainsi engagé les troupes britanniques en Afghanistan, dès octobre 2001, aux côtés des Américains, et surtout a lancé et supporté la campagne en Irak, où les Britanniques ont joué un rôle majeur. Il a également pris plusieurs options - comme la participation accrue du Royaume-Uni au bouclier anti-missiles Us. Après la Défense, il a été leader à la Chambre des communes (2005-2006), ministre des questions européennes (mai 2006- juin 2007) avant de devenir chef de la majorité parlementaire Labour et secrétaire aux Transports (octobre 2008- juin 2009). Bref un CV autrement plus conséquent que l'actuelle nominée, Catherine Ashton. Même si ses positions en faveur de l'intervention en Irak ou sa proximité avec les Etats-Unis
aurait pu être critiquée, elle aurait suscité, sinon l'assentiment de tous, au moins le respect de la communauté diplomatico-militaire et une vision totalement différente dans le monde. Mais c'était un cadeau empoisonné...

L'affaire des frais provoque son éviction. Son nom a été barré notamment par la Commission européenne et les chefs de partis socialiste. Ceux-ci ont penché vers Ashton. Geoff Hoon a, en effet, été pris dans l'affaire des "frais virtuels" des députés britanniques qui a enflammé les médias outre-manche en avril-mai dernier, utilisant le système des résidences secondaires (ce qui permettait d'augmenter les frais qui lui été remboursés). Sa nomination a, donc, été refusée par José-Manuel Barroso qui préferait avoir un commissaire avec un passé sans tâches. Résultat... ce n'est qu'après la réunion des socialistes, vers 17h, que le nom de Catherine Ashton, est (ré)apparu, cette fois, de façon définitive comme la seule option possible. Et l'intéressée, avertie, quelques quarts-d'heure juste avant que la nouvelle ne filtre dans la presse.
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20 novembre 2009 5 20 /11 /novembre /2009 10:20
Le glissement de terme entre la Constitution européenne et le Traité de Lisbonne du ministre des Affaires étrangères au haut représentant pour la politique étrangère pouvait sembler une trace plutôt symbolique de ne pas doter l'Union européenne d'une compétence trop visible dans ce domaine. Car l'essentiel des compétences et des outils était préservé. Et, de fait, le Haut représentant, numéro 2 de la Commission europénne, avec un service diplomatique rassemblant tous les instruments diplomatiques et de gestion de crises de l'UE, avait une bonne partie des attributs d'un Ministre. Avec la nomination d'une Britannique, totalement inconnue dans le monde de la diplomatie, Catherine Ashton, qui n'a aucune référence ni expérience dans le domaine, on voit bien qu'il n'en est rien.

Un top manager plutôt qu'un ministre. Sauf à ce que celle-ci se transforme en une Golda Meir insoupçonnée ou une Alliot-Marie révélée
, il y a fort à parier que même la fonction de ministre fera défaut. Pour mes confrères britanniques qui l'ont cotoyé à la Commission, ce n'est pas une "think woman", c'est un "top manager", un "haut fonctionnaire" (en anglais svp). Peu réjouissant. Les notes de base de page ou déclarations glissées dans les Traités européens (lire : Traité de Lisbonne: la PESD devient PeSDC. Un peu plus commune ?) ne sont donc pas là que pour la forme et que la volonté politique reste très affirmée : il n'est pas question de donner une once de pouvoir supplémentaire à la Commission et à l'Union européenne dans ces matières qui relèvent de la souveraineté des Etats. Et cette (arrière) pensée est très présente parmi certains Britanniques et est approuvée par les autres Européens. Comme l'a rappelé mon confrère du Daily Telegraph, dans son article publié aujourd'hui, citant une source britannique proche de Downing street : "This means the job is not a foreign minister job, it's a job of co-ordinating policies among 27 members." C'est clair...

Où va passer le pouvoir d'initiative. Le Haut représentant - on l'oublie souvent - a le pouvoir d'initiative dans tous ces domaines. Réduire, amoindrir ce pouvoir d'initiative est déjà un gage d'amoindrissement de la politique et de la préservation des Etats.
Malheureusement, il n'est pas sûr que l'ambition soit au rendez-vous pour les cinq années à venir, surtout en matière de politique de défense commune. On peut donc être relativement inquiet pour l'avenir de la PeSDC.

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19 novembre 2009 4 19 /11 /novembre /2009 22:49
La nouvelle a surpris les journalistes habitués aux combinaisons les plus complexes. Finalement il n'aura pas fallu beaucoup de temps aux 27 pour tomber d'accord. Ce sera bien un Britannique qui occupera le poste de Haut Représentant. Enfin plutôt... une ! Parité oblige. Catherine Ashton (53 ans) devrait ainsi succéder à Javier Solana. Quant au poste de président du Conseil européen, le premier président permanent des Sommets européens, il est dévolu au Premier ministre Belge, Herman van Rompuy. Un homme, une femme : la parité est respectée...

Une inconnue de la politique étrangère. Depuis 2008, la Baroness Catherine Ashton of Upholland est membre de la Commission européenne chargée du Commerce, où elle a succédé à Peter Mandelson. Ce qui lui a donné l'occasion de travailler sur tous les dossiers OMC et de tisser de nombreux liens internationaux. En revanche, elle n'a aucune expérience des affaires militaires, de défense et de sécurité comme de gestion de crise. Mais ses proches assurent que c'était la même chose quand elle a pris en charge les questions du commerce. « Elle apprend vite ». On verra... Auparavant, à Londres, elle a surtout exercé des activités dans le domaine social et de l'éducation. En 2007, elle avait été nommée par Gordon Brown à son cabinet comme leader de la Chambre de lords et "Lord president of the Council". Elle a notamment mené la bataille pour la ratification du Traité de Lisbonne. Elle est mariée avec Peter Kellner, ancien journaliste au Sunday Times, Independent et Evening Standard et aujourd'hui gourou des sondages (avec la société Yougov).

Pourquoi l'as-t-on choisie ? « C’est une question d'équilibre » a reconnu Nicolas Sarkozy, quand je lui ai posé la question « Nous avons intérêt à envoyer un signal aux Britanniques pour leur dire qu’ils sont en Europe, qu’ils comptent en Europe et qu’on a besoin d’eux. » Et puis, « c'est une femme, travailliste (donc socialiste). Elle a joué un rôle essentiel à la chambre des lords pour faire passer le traité de Lisbonne ». Et d'ajouter, histoire de justifier l'inconnue diplomatique de la personne «
Tous ses collègues de la Commission ont montré une femme tournée vers l’international, tournée vers l’Asie et la Corée du sud. Vous savez : c'est un choix complexe, il faut mettre d’accord chaque pays, trouver un équilibre politique, géographique. »

Remaniement à la Commission. Ashton devrait prendre ses fonctions : "dès le 1er décembre", a assuré un haut fonctionnaire de la Commission, comme Haut représentant et comme Vice-président de la commission chargée des relations extérieures. « Cela obligera à un remaniement. Ce qui est un peu complexe » a reconnu mon interlocuteur. Et, effectivement, ce schéma contredit un peu le premier plan mis au point par la présidence suédoise, prévoyant une entrée en vigueur par étapes. Dans le nouveau plan, la nouvelle Haut représentant sera tout de suite (au 1er décembre) commissaire en charge des relations extérieures (à la place de Benita Ferrero Waldner). Elle devrait ainsi assister au prochain conseil des Affaires étrangères à ce titre. Mais elle ne présidera ce conseil qu'à partir de janvier. La question est maintenant de faire un adieu à Solana qui n'a normalement plus à être présent dans un conseil ou un sommet européen. Celui de décembre pourrait en être l'opportunité.

Inquiète pour les auditions.
Une situation d'autant plus complexe que sa nomination - pour la partie commissaire - doit être avalisée par le Parlement européen. Les auditions sont prévues en janvier. Et apparemment, c'est la plus grosse inquiétude de la baroness. A ma question: quelle sera votre priorité internationale la plus importante, elle m'a répondu, entourée de dix gardes du corps (ce n'est pas très aisé pour dialoguer -:)) : « les auditions au Parlement européen, les auditions ». En tout cas, elle devra travailler un peu ses dossiers. Sa première prestation en salle de presse a été plutôt décevante, montrant une Haute représentante, ne maîtrisant pas les enjeux internationaux, et surtout la première étonnée de se retrouver là...
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15 novembre 2009 7 15 /11 /novembre /2009 20:00
Le Conseil des Ministres des Affaires générales et des Relations extérieures (CAGRE) de l'UE, des 16 et 17 novembre, est le dernier sous cette forme. Le dernier également où sera présent Javier Solana l'actuel Haut Représentant (qui aura occupé le poste durant dix ans). En Décembre, application du Traité de Lisbonne oblige, il y aura, d'une part, un Conseil des Affaires étrangères (normalement présidé par le nouveau Haut représentant), et, d'autre part, un Conseil des Affaires générales, présidé par la présidence tournante (1).

Mais le nouveau Haut représentant pour la politique étrangère et de sécurité / vice-président de la Commission européenne ne se verra pas doté de toutes ses nouvelles fonctions, tout de suite. La mise en place du Traité de Lisbonne se révèle d'une certaine complexité, et il a fallu jongler avec les différents textes et obligations. La mise en place sera donc progressive...

1ère étape : en décembre, Haut représentant. Une fois le nouveau Haut représentant désigné par le Conseil européen (le 19 novembre normalement), celui-ci devrait prendre ses fonctions en décembre, succédant ainsi à Javier Solana. Mais il n'aura plus la qualité de secrétaire général du Conseil (comme Solana) désormais occupé par un troisième personnage - qui sera également désigné par le Conseil européen (comme le veut le Traité de Lisbonne).

2e étape : en janvier, président du Conseil des ministres. Selon les conclusions du sommet européen (décembre 2008), la présidence tournante en cours (la présidence suédoise) continue d'assurer ses fonctions jusqu'à la fin de la présidence. C'est à la présidence suivante (la présidence espagnole) de mettre en place les dispositions du Traité de Lisbonne sur ce point. Le nouveau Haut représentant devrait donc présider son premier Conseil des Affaires étrangères en janvier (à moins que la présidence espagnole ne préfère présider ce Conseil dans les premières semaines). Selon le projet de règlement du Conseil, le Haut représentant pourra "demander à être remplacé - si nécessaire - " par le membre de la présidence tournante. Selon un arrangement informel, le Conseil qui s'occupera d'affaires commerciales (OMC) qui se tient traditionnellement à Genève, en marge des sessions de l'OMC sera ainsi présidé par la présidence tournante. Concernant la présidence des différents comités et groupes de travail, les 27 ont convenu d'une répartition des rôles : lire : Le Traité de Lisbonne s'adapte : qui présidera quel comité ?

3e étape : en février ou mars, commissaire européen. Le Haut représentant n'aura pas non plus tout de suite la qualité de Commissaire et vice-président de la Commission européenne - comme le veut le Traité de Lisbonne. Pour cela, il faudra attendre la désignation officielle du collège par le Conseil (après le 1er décembre) et après l'approbation du collège par le Parlement européen. Point majeur de cette approbation, les auditions par les commissions auront certainement lieu en janvier (l'audition du Haut représentant prévue selon un premier calendrier provisoire le 4 décembre a dû être repoussé, vu le retard pris par les 27 à désigner les nouvelles têtes de l'Europe) puis il faudra un vote en plénière.

Le Haut représentant ne devrait, donc être pleinement dans ses nouvelles fonctions prévues par le Traité de Lisbonne que courant février, voire au mois de mars (en cas de retard au Parlement européen). Ce qui, somme toute, facilitera la mise en place de toute son administration et le règlement des nombreuses questions qui peuvent encore se poser sur le service diplomatique.
  • (1) La répartition des tâches entre les deux Conseils. Selon le projet de règlement du Conseil, elle devrait être délimitée ainsi.
  • • Le Conseil des Affaires étrangères / Foreign Affairs Council (CAE ou FAC en anglais) aura un champ d'action élargi à toute l'action extérieure de l'UE : qu'ils s'agisse de politique étrangère, de politique de défense et de sécurité, de poliique commerciale commune, de coopération au développement et d'aide humanitaire.
  • • Le Conseil des Affaires générales / General Affairs Council (CAG ou GAC en anglais) aura également un rôle majeur. Il devra préparer les Conseils européens (en lien avec le nouveau président du Conseil européen) et suivre le travail des différentes autres configurations du Conseil. Il sera chargé de toutes les questions horizontales, institutionnelles et administratives, notamment du cadre pluriannuel financier et de l'élargissement.

  • (crédit photo : présidence suédoise de l'Union européenne)
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3 novembre 2009 2 03 /11 /novembre /2009 01:00
Avec l'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne et le développement de l'Europe de la Défense, on peut se poser la question si la désignation d'un commissaire européen spécialement chargée de la gestion de crises et des questions de défense ne serait pas justifiée. Cela aurait un sens à la fois au niveau pratique et politique. Au niveau pratique, la tâche du Haut représentant apparaît très importante : couvrant à la fois le volet politique étrangère et de défense (comme aujourd'hui) mais rassemblant l'action communautaire et l'action inter-gouvernementale. Comment un seul homme pourra négocier avec les Iraniens ou les Israéliens, être présent tous les mercredis à la réunion de la Commission, présider une fois par mois le conseil des Ministres des Affaires étrangères, recevoir tous les missi dominici de la terre ou leur rendre visite, et diriger la petite dizaine de missions de gestion de crise, militaires et civiles, que l'UE a déployées de par le monde, souvent dans des régions "chaudes" (Afghanistan, Irak, Congo, Guinée-Bissau...) ? Un peu "too much" peut-être ! Il lui faudra se dédoubler...

Un deuxième homme appelé à seconder le Haut représentant dans toutes ses tâches pourrait être nécessaire. Même si la fonction n'est pas officiellement créée par le Traité. Mais de la même façon qu'il y a des vice-présidents de la Commission ou un secrétaire général adjoint au Conseil, on pourrait concevoir le poste d'un commissaire - très proche du Haut représentant - et appelé à le décharger de certaines tâches. Parmi les tâches qui pourrait être confiée à ce deuxième commissaire, on peut naturellement penser à la PESD. Car elle est à la fois le complément naturel de la PESC. Mais elle a aussi ses spécificités et ses contraintes qu'il importe de bien saisir et de gérer complètement. La nouvelle (petite) compétence de "sécurité civile" qui sera créée au niveau européen pourrait également lui être rattachée, ce qui ferait un portefeuille complet de la "gestion de crises" civile et militaire (ce qui est plus convenable pour une Commission européenne à dominante civile, qu'un portefeuille sur "l'Europe de la Défense"). Avec le commissaire en charge du Développement et de l'Aide humanitaire, et celui en charge du Commerce, il y aurait ainsi un "cluster" assez logique de la nouvelle politique extérieure européenne.

La nomination d'un tel commissaire aurait un autre avantage : permettre une diversité géographique de l'approche de la politique étrangère européenne. On peut ainsi concevoir que si le poste de Haut représentant est occupé par un ressortissant d'un ancien Etat membre, celui-ci de commissaire à la "gestion de crises" pourrait être confiée à Commissaire venant d'un nouvel Etat membre. Un équilibre Nord/Sud pourrait aussi être approprié. De même on pourrait concevoir un certain équilibre politique Socialiste/libéral, par exemple.
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30 octobre 2009 5 30 /10 /octobre /2009 11:46
Parmi les Etats qui n'ont pas encore désigné de commissaire (voir la page actualisée), il y en que certains qui pourraient prétendre au poste : Irlande, Pays-Bas, Suède, Royaume-Uni, Grèce, France (éventuellement). Avec les paramètres définis, un nom se détache en tête de liste : David Miliband, socialiste bon teint, mais très acceptable par la droite; jeune, britannique, européen convaincu. Seul problème : Gordon Brown, le Premier ministre britannique ne paraît enclin à le présenter au poste de commissaire. Sèchement il a répondu aux questions des journalistes qui l'interrogeait sur ce point, alors que l'intéressé était à ses cotés : "David Miliband n'est pas candidat". Mais ce genre de déclarations est souvent peu crédible. Et la vraie question est de savoir si Miliband voit vraiment son avenir à Bruxelles ou s'il ne se rêve pas plutôt en chef de l'opposition travailliste (une fois le gouvernement actuel tombé et les conservateurs revenus au pouvoir). On peut remarquer quelques éventuels outsiders, comme l'improbable Bernard Kouchner, ou l'éternelle Irlandaise Mary Robinson... La dernière journée du sommet européen, vendredi, sera l'occasion de "tester" cette candidature
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logo_ouestfrancefr.pngL'éditeur : Nicolas Gros-Verheyde. Journaliste, correspondant "Affaires européennes" du premier quotidien régional français Ouest-France après avoir été celui de France-Soir. Spécialiste "défense-sécurité". Quelques détails bios et sources.