C'était il y a plus de 50 ans. Dans les années 1947-48. L'Etat d'Israël était en gestation. Et ses promoteurs recherchaient des armes dans toute l'Europe. Le plus fidèle soutien pour la Haganah - littéralement "défense" en hébreu - vint alors de Prague. La Tchécoslovaquie - qui n'était pas encore sous direction communiste - accepte alors de livrer, contre espèces sonnantes et trébuchantes, certains équipements militaires aux chargés de mission de Ben Gourion. Certains équipements, entendons-nous, tout de même, ce n'était pas rien ! 24 500 fusils, 5 000 mitrailleuses légères, 200 mitrailleuses lourdes, et 25 avions Messerschmitt. Les techniciens militaires tchécoslovaques prêtent la main démontent les avions et les envoient en Palestine. Des bases d'entraînement, clandestines, sont même organisées pour pilotes et parachutistes (1). Même après la prise du pouvoir par les communistes, en février 1948, et l'embargo décrété sur les armes par l'ONU, les livraisons continuent pour le tout nouvel Etat indépendant (dont la Tchécoslovaquie sera un des premiers à reconnaître l'existence). Ordre de Staline - qui entend ainsi contrer l'influence britannique au Proche-Orient : des mitrailleuses MG34 et des Messerchmitt 109 allemand ou plutot leur dérivé tchèque, l'Avia S199 arrivent en Israel. Les avions - rebaptisés "Sakin" (couteau) - forment même l'embryon toute nouvelle armée de l'air israélienne, aux prises avec les armées arabes réunies qui veulent empêcher la naissance de l'Etat hébreu. L'Avia S199 était difficile à manier et avait une certaine propension à se crasher (2). Israël acheta aussi d'autres avions de fabrication britannique ou américaine. Mais là encore, la Tchécoslovaquie joua un rôle vendant des Supermarine Spitfire ou servant de transit pour les bombardiers américains B17 Fortress, achetés en contrebande dans les surplus américains.
Renversement d'alliance, en 1956, lors de la crise du canal de Suez, sa nationalisation et la guerre déclenchée par la France, le Royaume-Uni et Israël contre l'Egypte, c'est l'Egypte qui bénéficiera d'armes "tchèques" (des armes russes surtout, transitant par Prague) un armement lourd qu'on en juge : 200 tanks parmi lesquels des T34 (supérieurs à l'époque aux chars Sherman) et près de 200 Mig et Ilyuchine. Israël bénéficiait dans le même temps d'armes "françaises" (avec l'autorisation américaine), la France livrant 24 Mystère 4 et 24 F84, puis une autre livraison d'avions de chasse 110 Mystères A et Mystères 4B, 24 Ouragan, 12 bombardiers Vautour, 100 Chars AMX, etc... (3).
NB: La concurrence entre les Tchèques et les Français dans la région - qu'on a vu lors des dernières visites diplomatiques sur le terrain - ne date donc pas d'hier -:)
(1) Ecoutez l'émission spéciale de la radio tchèque
(2) lire le récit de Jon Guttman dans Aviation History ou consulter le site musée de Serge Batoussov
(3) On peut lire avec profit le petit ouvrage "1956 mémoire de Suez" de Marc Ferro (editions Complexe) ainsi que "Descent to Suez" d'Evelyn Shuckburgh, le journal du secrétaire particulier d'Eden (le ministre britannique des Affaires étrangères de l'époque)
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