La coalition britannique LibDem-Conservateurs a sorti son programme.
Fort d'une trentaine de pages, il détaille les différents de la politique qu'il entend mener durant ses cinq prochaines années (1).
Petit décryptage dans les domaines de la défense, de la politique étrangère et de l'Europe.
Au vu du programme, dont il n'est d'ailleurs pas sûr que tout sera réalisable ni justifiable au long des années (il semble plus idéologique que réaliste), on se dit que les points de friction avec les Européens risquent d'être nombreux.
Le sort des soldats et de leurs familles
première priorité de la Défense... avec le nucléaire
La sécurité nationale, et particulièrement l'engagement en Afghanistan, est l'alpha de la politique britannique en matière de défense comme de politique étrangère.
Améliorer le sort des soldats, des vétérans et de leurs familles
C'est la première priorité en matière de défense : assurer aux forces armées le "soutien dont elles ont besoin", notamment en matière d'équipement et de soutien personnel. L'armée britannique a, en effet, le vague à l'âme. Et il s'agit de "recoller" les bouts après 10 années d'engagement intensif en Irak et Afghanistan, en facilitant la vie des soldats, et de leurs familles.
Toute une série de droits sont visés: s'assurer que les droits au repos et à récupérations sont "maximisés", scolarité des enfants dont les parents ont été tués au combat, soutien aux vétérans qui ont des problèmes de santé mentale, révision des règles de délivrance des médailles, doublement de l'allocation en opération pour le personnel servant en Afghanistan, traitement des personnels blessés dans des sections militaires spécialisées, réfection des logements militaires, etc... La coalition veut aussi mettre au point un programme "Troops for Teachers" permettant aux militaires de trouver des débouchés dans l'enseignement.
Sucrer les moyens du Ministère
Comment arriver à tout cela ? Rien n'est mentionné dans le programme, mis-à-part un objectif, précis : diminuer de 25% les coûts de fonctionnement du ministère de la défense (les services centraux du MoD qui ont "enflé" selon les conservateurs et libéraux, depuis des années).
Conforter le Nucléaire
Le gouvernement entend maintenir la capacité de dissuasion nucléaire britannique. Il conforte ainsi le renouvellement des sous-marins nucléaires Trident mais affirme qu'il sera examiné "pour s'assurer de sa rentabilité" (petite, concession faite aux Libéraux).
Désarmement et armes à sous-munitions
Au niveau international, le Royaume-Uni entend jouer un rôle important sur la conférence de révision du traité de non-prolifération nucléaire et agira de façon continue pour un désarmement multilatéral. Il veut également agir pour l'interdiction des armes à sous-munitions et s'assurer du contrôle d'exportations des armes, afin que celles-ci "ne servent pas à la répression interne".
Une place pour les pays émergents au Conseil de sécurité
Ce programme affirme, bien entendu, la volonté pour le Royaume-Uni d'occuper toute sa place au niveau international, jouant "un rôle constructif dans les organisations multilatérales, comme l'ONU et l'OTAN" tout en défendant "ses intérêts". Le Royaume-Uni entend ainsi défendre l'arrivée de nouveaux pays au Conseil de sécurité : Japon, Inde, Brésil, Allemagne et représentation des pays Africains.
Une politique étrangère centrée sur les terrains de prédilection des Britanniques
Pousser à la paix au Moyen-Orient (avec un "Etat d'Israël sûr et universellement reconnu aux cotés d'un Etat palestinien viable et souverain"), promouvoir la stabilité dans les Balkans (3), renforcer le développement et les valeurs démocratiques dans le Commonwealth, développer une nouvelle relation spéciale avec l'Inde et rechercher un engagement plus étroit avec la Chine... Telles sont les autres priorités internationales du nouveau gouvernement. On peut noter le traditionnel "maintien d'une forte, étroite et franche relation avec les Etats-Unis" (avec l'apparition de ce "franc", apport des Libéraux).
L'Europe ? Oui, mais... d'abord les Anglais
Au plan européen, les Britanniques réaffirment sinon leur hostilité du moins une forte vigilance.
Un referendum-lock
Le gouvernement veut introduire dans sa loi (1972 European Communities Act) une obligation de consulter les citoyens par referendum pour tout transfert de pouvoir ou compétence aux institutions européennes : système dit de "referendum-lock", c'est clair ! Ils entendent aussi étudier un "United Kingdom Sovereignty Bill" qui réaffirme le rôle premier du Parlement (britannique). Et refusent que les clauses passerelles soient utilisées automatiquement (sans législation primaire).
Défense des intérêts de la Couronne
Ils entendent défendre leurs droits budgétaires (le fameux "chèque" britannique dont il était question de le supprimer) comme limiter toute législation qui serait préjudiciable aux intérêts de la Couronne, à commencer par celle sur le Temps de travail (nommément citée).
Pas d'Euro, pas de politique commune judiciaire, pas de Procureur européen
Ils refusent de rejoindre l'Euro, et même d'en faire les préparatifs sous la législature, entendent préserver la spécificité britannique en matière de justice et d'affaires intérieures, ils refusent notamment la création d'un Procureur européen.
Suppression du siège du PE à Strasbourg
Enfin, ils veulent un siège unique pour le Parlement européen, "à Bruxelles" (autrement dit : la suppression du siège de Strasbourg). NB : bizaremment ce point n'a pas été évoqué - du moins publiquement lors de la rencontre Sarkozy-Cameron, jeudi, à l'Elysée.
En bref, il va y avoir du sport !
(2) L'Europe doit s'engager de façon plus ferme en Bosnie, dit William Hague (UK)