Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
8 décembre 2008 1 08 /12 /décembre /2008 10:05
Finalement, il n'y aura pas de nouvelle stratégie de sécurité et de défense, en tant que telle. Mais simplement une mise à jour, sous forme d'un rapport de Javier Solana, le Haut représentant pour la Politique étrangère et de sécurité commune, au Conseil européen sur la "mise en œuvre de la stratégie européenne de sécurité - Assurer la sécurité dans un monde en mutation". Un rapport élaboré, de façon très étroite, explique un responsable du Conseil avec la Commission européenne et le Parlement européen, qui dresse un inventaire des nouvelles menaces auxquelles serait confrontée l'Union européenne et des avancées (et défis) de l'UE. Rapport examiné par les Ministres des affaires étrangères le 8 décembre.
 
Beaucoup a été accompli en cinq ans. "L'UE a fait des substantiels progrès". Mais il faut aussi relever les défis être "more capable, more coherent and more active", les trois maîtres mots de Javier Solana qui trace ainsi la feuille de route vers l'avenir. Ce rapport n'avance cependant pas d'idée sur ce qui pourrait suivre, comme un "Livre blanc" demandé notamment par le Parlement européen. "Mais ce n'est pas exclu à un stade ultérieur", précise la directrice de l'unité politique du Conseil, Helga Schmidt. De même, il ne se prononce pas sur la proposition russe de "nouveau partenariat de sécurité". Cela n'a pas "l'objectif de ce document".

Des défis plus complexes. "20 ans après la fin de la guerre froide, l'Europe fait face à des défis et menaces de plus en plus complexes". "Certains conflits - comme au Moyen-Orient ou ailleurs dans le monde restent non résolus, d'autres ont même éclaté dans notre voisinage. Les Etats défaillants affectent notre sécurité à travers le crime, l'immigration illégale et, plus récemment, la piraterie. (...) Le programme nucléaire de l'Iran a avancé, de façon significative, représentant un danger pour la stabilité de la région et pour le dispositif de non-prolifération." L'UE, dans cet océan d'instabilité, reste une ère de "stabilité". "L'élargissement a développé la démocratie et une ère de prospérité sur notre continent. Les Balkans changent pour le meilleur. Notre politique de voisinage a créé un instrument cadre fort pour les relations avec le sud et l'est, et une nouvelle dimension avec l'Union pour la Méditerranée et le partenariat oriental."

Avec la mondialisation, des menaces plus interconnectées. La "mondialisation apporte de nouvelles opportunités" explique le rapport. "La croissance soutenue dans le monde en développement, conduit par la Chine, sort des millions de personnes de la pauvreté. Mais la mondialisation apporte aussi des menaces plus complexes et interconnectées. Les artères de notre société - comme les systèmes d'informations et les fournitures d'énergie - restent très vulnérables. Le réchauffement climatique et la dégradation environnementale menacent la face de notre planète. La mondialisation accélère les changements de pouvoir et affiche les différences de valeurs. La récente crise financière a secoué tant les économies développées que les économies en développement".

La palette des instruments de l'UE. Le rapport dresse une version optimiste de l'UE. L'originalité de l'Europe, c'est sa"palette unique d'instruments" (politique, diplomatique, humanitaire, développement, gestion de crises…), qui lui a permis de contribuer "à un monde plus sûr". "L'UE reste le plus grand donateur aux pays dans le besoin. (...) Dans la dernière décennie, la PESD - partie intégrante de la politique étrangère a cru en expérience et capacité, avec plus de 20 missions déployées en réponse aux crises, de la construction du processus de paix post-tsunami à Aceh à la protection des réfugiés au Tchad".

Le credo de Javier Solana : être plus stratégique...

Foin de "complaisance" comme le rappelle lui-même Javier Solana, dans son rapport. Pour "assurer notre sécurité, nous devons être prêts à faire face aux évènements". Il faut être "plus stratégiques dans notre manière de voir, être plus efficaces et visibles dans le monde".

Et le Haut représentant de dresser trois priorités "stratégiques" pour les Européens:

• la protection des populations. "Les gouvernements doivent prendre leur responsabilité des conséquences de leur action et partage leur responsabilité pour protéger les populations du génocide, des crimes de guerres, des nettoyages ethniques et des crimes contre l'humanité". (cela sonne comme un rappel à l'ordre pour les Etats, plutôt passifs face à ce qui se passe au Congo).

• le respect de l'intégrité territoriale. Il est aussi clair que le respect de la souveraineté, de l'indépendance et de l'intégrité territoriale des Etats et le règlement pacifique des conflits n'est "pas négociable". "La menace ou l'usage de la force militaire ne peut être pour résoudre des conflits territoriaux, n'importe où". (une référence on ne peut plus nette à ce qui s'est passé en Géorgie).

• le multilatéralisme. "Nous sommes à un moment unique de renouvellement du multilatéralisme", avec les Etats-Unis et nos autres partenaires. Les priorités de l'UE en matière de sécurité sont "liées aux objectifs de l'ONU". L'UE et l'Otan doivent "approfondir" également leur partenariat pour trouver une "meilleure coopération dans la gestion des crises".
Partager cet article
Repost0
6 décembre 2008 6 06 /12 /décembre /2008 10:26
En réaffirmant leur attachement à l'Europe de la Défense, vendredi prochain, les 27 chefs d'Etat et de gouvernement ne se gargariseront pas de mots seulement. Ils devraient aussi s'engager sur des "objectifs chiffrés" afin de "remédier à l'insuffisance des moyens disponibles en Europe en améliorant progressivement les capacités civiles et militaires". Selon le texte des conclusions que j'ai pu lire, ces objectifs seraient les suivants :

"L'Union doit être effectivement capable, d'ici dix  ans, en ayant recours aux moyens et capacités des Etats, de l'UE et de l'OTAN, dans le cadre de l'objectif de déploiement de 60 000 hommes, de planifier et de conduire simultanément:
-    deux opérations importantes de stabilisation et de reconstruction, avec une présence civile appropriée, soutenue par 10 000 hommes pendant au moins deux ans;
-    deux opérations de réaction rapide d'une durée limitée utilisant les groupements tactique de l'UE;
-    une opération d'évacuation de ressortissants européens (en moins de 10 jours);
-    une mission de surveillance / interdiction maritime ou aérienne, dans une zone où les intérêts de l'Union sont en jeu;
-    une opération civilo-militaire d'assistance humanitaire allant jusqu'à 90 jours;
-    une douzaine de missions PESD civiles de différents formats, incluant une mission majeure qui pourrait durer plusieurs années."


L'objectif s'il ne paraît pas démesuré par rapport aux menaces en cours et aux missions déjà menées (actuellement l'UE mène 12 missions simultanées, dont 3 militaires et 9 civiles) exige tout de même un renforcement assez soutenu. Car il s'agit de pouvoir mener toutes ces opérations de front, "simultanément".

D'ailleurs, le Conseil européen en est conscient puisqu'il explique que "Cette ambition requiert un engagement à développer des capacités robustes, flexibles et interopérables". Concrètement cela oblige à "sur une base volontaire", recourir à "des formules innovantes de spécialisation, de mutualisation et de partage de grands projets d'équipements, en priorité en matière de planification, de gestion de crises, d'espace et de sécurité maritime".

Ce faisant, les 27 avalisent également les projets capacitaires déjà approuvées par le Conseil des Ministres de la Défense de l'UE le 10 novembre.
Partager cet article
Repost0
6 décembre 2008 6 06 /12 /décembre /2008 10:02
Selon le premier texte des conclusions que j'ai pu consulter, le Sommet de la fin de présidence française, qui réunira les 27 chefs d'Etat ou de gouvernement, les 11 et 12 décembre à Bruxelles, devrait approuver une déclaration sur le "renforcement de la politique européenne de sécurité et de défense (PESD)" qui approuve plusieurs décisions. Certaines ont déjà été débattues et approuvées au Conseil des ministres de la défense, le 10 novembre. Il s'agit alors plutôt d'une consécration, d'une "imprimatur" officielle (capacités ou Erasmus militaire). D'autres concluent des travaux plus récents, comme la révision de la stratégie de sécurité (qu'aura avalisée entretemps les ministres des Affaires étrangères le 8 décembre), le objectifs chiffrés pour la PESD ou le renforcement de la planification stratégique et méritent donc qu'on s'y attarde davantage (surtout ce dernier point).

1. La doctrine : la Stratégie de sécurité. La première stratégie date de 2003, et donnait une "analyse partagée des menaces et des risques qui pèsent sur les intérêts de sécurité communs aux Européens". Cette stratégie reste valable - les menaces identifiées en 2003 "persistent" diront les 27 - mais elle nécessite d'être mise à jour - avec "l'émergence de nouveaux risques susceptibles de menacer, directement ou indirectement, la sécurité de l'UE", en particulier la sécurité énergétique.

2. Les capacités : à renforcer. Il faut "remédier à l'insuffisance des moyens disponibles en Europe en améliorant progressivement les capacités civiles et militaires" diront les 27. C'est la condition pour être "assumer de manière crédible et efficace leurs responsabilités dans le cadre du partenariat transatlantique". Dans une déclaration, les 27 fixent ainsi des objectifs chiffrés à atteindre en matière de capacités pour mener les opérations (ce qui est nouveau, et réactualise en fait les objectifs fixés à Helsinki en 1999). Ils confirment également le lancement de projets concrets (qui avaient été déjà avalisés au Conseil des ministres de la défense le 10 novembre).
.
3. La base industrielle : à restructurer. Les 27 devraient appeler à un "renforcement des mécanismes de gouvernance d'entreprise, une dynamisation du marché européen de l'armement et un effort accru de recherche et de technologie"

4. La formation : lancement d'Erasmus militaire. Le Conseil européen appuie "initiative, inspirée du programme Erasmus, afin de favoriser les échanges de jeunes officiers européens"

5. La planification des opérations : renforcée. Le Conseil soutient décision de créer une structure unique de planification stratégique civilo-militaire pour les opérations et missions de la PESD .

6. Coopération UE-Otan : améliorée. "Un groupe à haut niveau UE-OTAN" va être établi afin "d'améliorer de façon pragmatique la coopération entre les deux organisations sur le terrain". Il souligne la nécessité d'associer pleinement à la PESD les alliés européens non membres de l'UE

7. La sécurité internationale : des actions concrètes. Dans une déclaration, les 27 devraient décider "d'actions concrètes pour permettre à l'UE de jouer un rôle plus actif dans la lutte contre le terrorisme, la prolifération des armes de destruction massive, la criminalité organisée et les attaques cybernétiques".
Partager cet article
Repost0
6 décembre 2008 6 06 /12 /décembre /2008 09:10
Dix ans après le sommet franco-britannique de Saint-Malo, et la déclaration commune sur la défense européenne, les ministres britannique et français de la Défense, John Hutton et Hervé Morin, se rencontraient symboliquement, le 4 décembre à Northwood, au quartier général d’opération (OHQ) de l’opération européenne de lutte anti-piraterie (Eunavfor Atalanta), près de Londres. (Visite à laquelle j'avais été conviée).

Tous les deux se sont d’abord félicités du lancement prochain (le 8 décembre) de l’opération Atalanta. « C’est une opération d’importance, la première opération navale de l’UE. Et nous la soutenons, comme nous soutenons le renforcement des capacités de l’UE » a déclaré John Hutton. « Face l’augmentation des attaques de pirates, il était nécessaire d’agir. J’espère que cette opération pourra avoir un effet dissuasif  » Bien sûr a-t-il reconnu, que cela ne réglerait pas l’entièreté du problème de la piraterie. « Si nous ne l’avions pas fait, nous aurions encore plus été critiqué » a-t-il expliqué, « l’opération devrait amener une amélioration significative du problème ». Un optimisme partagé par Hervé Morin. Bien sûr, a-t-il reconnu, 6 à 7 bâtiments « cela peut paraître peu par rapport à une zone immense, 3000 km sur 1000 km. Mais on ne pouvait rester les bras ballants. Et l’initiative de l’UE peut être complétée par d’autres pays. Entre les Européens – avec « Atalanta » - , l’Otan et les pays tiers, nous pouvons avoir près de 15 bateaux sur la zone, cela commence à être significatif et dissuasif ».
John Hutton (Uk) et Hervé Morin (Fr) au quartier général de Northwood © NGV

Le Royaume-Uni fervent soutien de la PESD... depuis toujours ! John Hutton en a profité pour se livrer à un véritable plaidoyer en faveur de la PESD : « l'UE dispose d'un puissant ensemble de ressources – l’expertise civile, des forces militaires, la puissance économique et le plus vaste réseau diplomatique dans le monde, ainsi qu'être le plus grand donateur de développement. Cela la rend bien placée pour répondre à l’instabilité" dans le monde. Trouvant que cet enthouiasme était particulièrement nouveau, je lui ai demandé pourquoi un tel changement de position car il ya un an encore, on ne voyait pas encore le Royaume-Uni aussi pro-Pesd. Ce à quoi Hutton s'est montré (finement) très étonné. « Je ne reconnais pas du tout votre description. (Nous sommes) pour renforcer l'Europe. Et la PESD est vraiment très importante pour cela. Cela suppose des objectifs stratégiques. » Sous-entendu, ce que nous avons aujourd'hui... (un propos qui confirme une précédente interview dans le Sunday Times)

Sans le Royaume-Uni pas de progression de la PESD. Quant à Hervé Morin, il a assuré son identité de vues avec les Britanniques : « L’Europe de la défense ne pourra progresser qu’avec le Royaume-Uni. Cela peut paraître contradictoire mais c’est la réalité. Nos deux pays sont ceux qui dépensent le plus pour la défense et qui ont encore une industrie. Sans la France et le Royaume-Uni, rien ne se fait. Le principe de la Pesd n’est pas se substituer à l'Alliance Atlantique mais d’en être complémentaire. Et le meilleur exemple est cette opération que nous lançons contre la piraterie. Nous avons des bateaux Otan qui patrouillent. Et bientôt les bateaux européens vont prendre le relais ».

Le ministre français a aussi évoqué certaines idées pour renforcer l'industrie européenne de défense.
Partager cet article
Repost0
1 décembre 2008 1 01 /12 /décembre /2008 15:14

Comme de coutume, les présidences préparent leur montée en puissance, en lançant quelques semaines auparavant leur site internet. Et y décline ses principales priorités pour le semestre à venir. La république tchèque exercera sa présidence au 1er semestre 2009. Et le leitmotiv de ce pays de 10 millions d'habitants, gouverné par une majorité libérale-conservatrice (à forte imprégnation eurosceptique), se décline : "une Europe sans barrières – une Europe qui utilise pleinement son potentiel économique, humain et culturel et qui, par conséquent, sait tenir bon face à la concurrence mondiale, politique comme économique".


Une année un peu particulière. La présidence tchèque s'exerce dans une année 2009 un peu particulière car une année d'élection, au Parlement européen, et de renouvellement de la Commission. "La République tchèque doit par conséquent prendre en considération le fait que l’activité législative du Parlement européen ralentira et que tous les sujets discutés seront davantage politisés que d’habitude", reconnaît ainsi la future présidence. Et la République tchèque - suivie par la Suède - aura la tâche d’assurer "le processus de désignation de la nouvelle Commission européenne".


Une Europe ouverte et sûre. A lire le programme, on cerne en matière de relations extérieures, trois priorités.

1° : le développement du partenariat transatlantique. La République tchèque souhaite entend "mener un dialogue approfondi avec les représentants de la nouvelle Administration américaine dans les domaines clés de la sécurité, de l’économie et de l’énergie".

2° : le projet de Partenariat oriental (initié par la Suède, la Pologne et la république tchèque) renforçant la coopération avec les pays orientaux, du Caucase méridional et de la région caspienne (Ukraine, Géorgie, Moldavie...) et le soutien à l'adhésion des pays des Balkans (le Montenegro a annoncé sa candidature et la Serbie devrait le faire au courant du premier semestre 2009).

3° : le renforcement des relations entre l’UE et Israël et, plus généralement, le processus de paix au Proche-Orient.

A noter l'absence de l'Afrique de ces priorités.


Pour télécharger le calendrier des manifestations de la présidence en république Tchèque.

(A noter qu'aucune conférence importante sur le thème de la défense n'est prévue)

Pour voir le calendrier des réunions ministérielles de l'UE au 1er semestre


Pour une explication sur le logo.


Pour aller sur le site de la présidence tchèque

Partager cet article
Repost0
30 novembre 2008 7 30 /11 /novembre /2008 23:55

L'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) se réunira, jeudi 4 et vendredi 5 décembre à Helsinki, avec sur la table la possible élaboration d'une nouvelle politique de sécurité européenne, comme l'avait évoquée le président français Nicolas Sarkozy. Vladimir Poutine, le premier ministre russe, a - lors d'une conférence sur le droit international humanitaire le 24 novembre à Saint-Petersbourg, donné des idées plus précises sur ce que pourrait être ou ne pas être cette nouvelle politique de sécurité.

Vladimir Poutine à la conférence sur le DIH, St Petersbourg © Gvt Russe


Trois principes. Ce document" juridiquement contraignant est destiné à donner de véritables garanties pour assurer l'égalité de la sécurité en Europe, basé sur des principes clairs". Le premier est de ne pas assurer sa sécurité au détriment de la sécurité d'autrui. Le second est ne pas autoriser (y compris par des alliances militaires et les coalitions) les actions qui affaiblissent l'unité d'un espace de sécurité commun.Et le troisième est de ne pas permettre le développement et l'expansion des alliances militaires au détriment des autres parties au traité."


Armements, terrorisme et crime organisé. V. Poutine propose "également de consolider dans le nouveau document, les paramètres fondamentaux du contrôle des armements, et de fixer les mécanismes de l'interaction dans la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive (ADM), le trafic de drogue, le terrorisme et la criminalité organisée. "Il est nécessaire d'envisager d'adapter les organismes intergouvernementaux dans le domaine de la sécurité à notre espace."


Suspension des mesures unilatériales. Ce faisant Poutine ne se fait pas de mystère : "Il est clair que les prochaines négociations seront difficiles. "Toutefois, il y a déjà des signes que notre logique commence à percer" souligne-t-il, mentionant la proposition du président français de l'Union européenne,  Nicolas Sarkozy, de s'abstenir de prendre des mesures unilatérales -" mesures qui pourraient avoir une incidence négative sur le pan-européenne en matière de sécurité. Cette thèse est, et en accord avec nos idées." conclut-il.

Partager cet article
Repost0
27 novembre 2008 4 27 /11 /novembre /2008 19:30

Le récent attentat de Bombay est la preuve - ultime - que l'idée d'avoir un concept d'évacuation commun pour les ressortissants de l'UE est plus pertinent que jamais. Il ne s'agit pas d'avoir un PC 24/24 à Bruxelles ni d'avoir une flotte commune prête à partir. Mais de coordonner les moyens, de déterminer, pays par pays, quel est l'Etat (ou les Etats) qui le plus à même de pouvoir procéder à l'évacuation des ressortissants. Un peu comme la France l'avait fait au Tchad face à l'attaque rebelle en février dernier.


Nécessité physique et psychologique. L'exemple de l'attentat en Inde le montre bien. L'évacuation des ressortissants européens ne concerne pas seulement des pays "à risque" ou dénué de structures d'accueil (hopital) ou des hypothèses très typiques (guerre internationale type Géorgie ou conflit civil type Tchad) mais peut aussi concerner des pays a priori stables et dotés de structures - comme l'Inde - et tout type de catastrophe (naturelles, technologique) ou le terrorisme. Dans ce cas, il s'agit bien sûr de mettre "à l'abri" les ressortissants mais aussi de les rassurer, "en les rapatriant" dans le pays d'origine (ou dans un pays plus sûr). Même si a priori ils pourraient rester sur place. Il s'agit parfois d'une opération tout autant psychologique (rassurer les familles, l'opinion publique) que physique. Et de communication. Il est vrai que quand un citoyen voit arriver dans un pays meurtri par une catastrophe ou une attaque, un représentant de "son" consulat ou d'un autre consultat européen. Immediatement "on" se sent rassuré. Mais celui-ci n'a, généralement, qu'une envie : quitter au plus vite ce "foutu" pays.


L'exemple de l'évacuation au Tchad - organisation centralisée ? Du 2 au 9 février 2008, les forces françaises présentes dans le pays (dans le cadre bilatéral « Epervier ») avaient accueilli 1750 personnes  au camp « Kosseï », à l’aéroport N’Djamena, placé sous protection française. La plupart (1402) avaient été mis en sécurité à Libreville (Gabon), par 19 rotations d’avions. Les évacués provenaient de 79 nationalités: 42% de Français, 15% environ de ressortissants européens (suisses, allemands, italiens, britanniques…). Plusieurs diplomates de pays tiers (Chinois, Egyptiens, Russes) ont aussi été pris en charge. Une opération héliportée avait même dû être menée pour dégager des diplomates allemands et américains, bloqués dans leur ambassade. Le cas du Tchad est très spécifique car l'évacuation s'est déroulée à la fois dans des "conditions idéales" - la France disposant sur place non seulement d'une base, à proximité de l'aéroport, mais aussi d'un hopital et de moyens héliportés propres, était la seule de fait à pouvoir intervenir dans un contexte conflictuel de forte intensité - difficilement reproductibles dans un autre lieu.


L'exemple de la Géorgie - concertation des moyens ? Lors de la guerre en Géorgie au mois d'aout, aucune évacuation centralisée n'avait été menée. Chaque pays ou groupe de pays s'était organisé comme bon lui semblait. Mais simplement une concertation des moyens. Si la France avait très vite envoyé sur Tbilissi un avion militaire - qui avait pris en charge des citoyens d'autres nationalités - chaque Etat avait pratiqué sa propre politique. Les Pays-Bas (qui avaient sous leur coupe les citoyens belges) avaient simplement affrété un bus vers l'Arménie, laissant ensuite chacun se débrouiller. Les Allemands avaient fait pareil Les Polonais (qui avaient pris en charge les Tchèques) avaient envoyé un avion vers l'Arménie rapatrier leurs citoyens... Cela s'était bien passé. Mais de l'avis de certains évacués, ce n'était pas vraiment idéal. Cela avait été un peu le royaume de la débrouille. La solution "française" - la plus directe - ayant été plus appréciée que le "largage" à Erevan...


Avion C-135 avec son module lits de réanimation (4 postes)


Moyens mobilisés pour l'Inde. "Un avion doit partir sous peu avec une équipe médicale et une équipe d'évacuation de la sécurité civile", a déclaré la ministre française de l'Intérieur, Michèle Alliot-Marie, lors de la réunion des Ministres de l'Intérieur qui se tenait le 27 novembre à Bruxelles. L'Espagne devrait aussi faire de même, a annoncé son homologue espagnol.


Avancer vers une vraie coordination des moyens. La présidence française de l'UE a proposé, avant le dernier Conseil des ministres de la Défense, le 10 novembre, de développer un véritable concept d'évacuation des citoyens de pays en crise, en recourant à des moyens militaires. Projet qui a suscité quelque réticences de certains Etats membres (l'Italie, les Pays-Bas notamment peu enclins à partager leurs moyens ou à recourir à des moyens militaires pour cela). C'est un concept plus souple qu'une organisation centralisée (type Tchad) mais plus ferme qu'une simple concertation des moyens (type Géorgie). L'Etat-major de l'UE y travaille depuis plusieurs années déjà (voir le projet de concept). L'exemple de l'attentat en Inde et le prochain exercice de projection de base aérienne avec mise en place d'une cellule d'évacuation de ressortissants (exercice Bapex) devrait peut-être convaincre les hésitants.


Partager cet article
Repost0
24 novembre 2008 1 24 /11 /novembre /2008 21:52

Coup sur coup, deux principaux responsables politiques des pays d'Europe centrale viennent de demander une politique plus ferme vis à vis de la Russie. Un message à écouter peut-être avec plus d'attention que ne le font d'habitude l'Union européenne, de par la stature des deux personnes qui s'expriment, dont la modération.


« Ne rien lâcher à la Russie », tel est le propos de Vaclav Havel dans le quotidien italien Corriere della Sera, samedi : « Le principal danger qui menace aujourd’hui l’Occident - explique l'ancien Président de la République tchèque (fédérale tchèque et slovaque de 1989 à 1992 et tchèque de 1993 à 2003) - est de multiplier les concessions en vue d’un apaisement qui n’est autre en réalité qu’une incapacité à dénoncer et à endiguer le mal. Il faut rester vigilant : la Russie, plus vaste pays du monde, a toujours eu tendance a mettre sous son influence les Etats voisins, par une occupation qui peut être militaire, comme nous l’avons vu avec la Géorgie, mais aussi économique et politique. Je suis pour l’adhésion à l’OTAN de l’Ukraine, de la Géorgie et même de la Biélorussie – quand elle sera libérée du régime de Loukachenko. Les bons résultats des communistes aux dernières élections locales s’expliquent par la fascination exercée par les théories marxistes, notamment dans des périodes de crise, où l’on cherche des recettes toutes faites pour un monde meilleur. »


« Inventer une nouvelle doctrine » avait déjà expliqué le ministre polonais des Affaires étrangères, Radosław Sikorski, lors de sa visite aux Etats-Unis, comme le rapporte la presse polonaise. Face aux menaces russes « l’Occident doit réaffirmer sa propre doctrine, et notamment annoncer que toute tentative de modifier les frontières européennes par la force ou par une action de diversion, serait considérée par l’Europe comme une atteinte à sa sécurité, et provoquerait une réponse proportionnelle de toute la communauté transatlantique ». Et le Ministre d'énoncer quatre projets dans lesquels les Européens ne doivent pas céder face à leur voisin. Premièrement, il s’est opposé aux « projets de démontage » de l’OSCE, et notamment à la proposition de Moscou de la remplacer par « une nouvelle structure de sécurité ». « Nous n’acceptons pas de modifier l’ordre mondial apparu après la fin de la guerre froide » et la Pologne n’accepterait pas non plus le retrait d’Europe des Etats-Unis, proposé par la Russie, a-t-il précisé. Deuxièmement, « l’UE, la plus grande économie mondiale, plusieurs fois plus grande que l’économie russe, ne devrait pas accepter le diktat de Moscou dans le domaine de l’énergie ». Troisièmement,  l’OTAN devrait maintenir la promesse faite à la Géorgie et à l’Ukraine de devenir un jour membres de l’Alliance. Quatrièmement, l’OTAN ne peut pas non plus retirer son soutien à l’installation du bouclier anti-missiles en Pologne et en République tchèque.


Photo : radio tchèque

Partager cet article
Repost0
18 novembre 2008 2 18 /11 /novembre /2008 16:00
C'est un fait étonnant, mais on ne peut plus clair, quand on assiste aux réunions de la sous-Commission Défense du Parlement européen : l'absence quasi-totale de députés français.

Mis à part Robert Toubon - qui travaille surtout sur les marchés de la défense et est là quand il le faut -, et... le finlandais Ari Vatanen (élu sur une liste française) - qui rédige en ce momentun rapport sur l'Otan -, personne... Les députés inscrits comme le (général) Philippe Morillon - occupé par sa commission pêche - et Michel Rocard viennent très rarement.

Les Allemands sont présents en force. En revanche. Non seulement son président, Karl Von Wogau (chrétien démocrate), partisan convaincu de l'Europe de la défense et très actif, mais aussi Helmut Kühne (social démocrate), Angelika Beer (verts), Tobias Pfluger (communiste) ou  Alexander Graf Lambsdorff (libéral). Bref tous les points de vue de la scène politique allemande s'expriment. On les partage ou non. Mais ils sont là.

Egalement présents: le conservateur eurosceptique de service, Van Orden, dont les épiques sont toujours "rafraichissantes" ; Ana Maria Gomes, la députée socialiste, qui mérite d'être écoutée avec plus d'attention qu'elle en a l'air ; la belge flamande Annemie Neyts pour le groupe libéral, le roumain Pascu... Mais voilà, est-ce qu'il y a moins d'effet de manche qu'ailleurs peut-être, ou un certain manque d'intérêt médiatique... en tout cas, les principaux promoteurs de l'Europe de la défense - les Français - sont au rayon "absents".

Cette sous-commission est cependant très intéressante. Les responsables européens invités - du Conseil, de l'Etat-Major - se prêtent à l'exercice avec une franchise intéressante (voir le récent exercice du général Leakey) et les orateurs extérieurs - experts académiques, de thinks tanks de l'industrie - sont d'un niveau excellent.
Partager cet article
Repost0
16 novembre 2008 7 16 /11 /novembre /2008 16:15
A l’issue du Conseil des Ministres de la Défense, qui s’est tenu le 10 novembre, le ministre français qui présidait la réunion, Hervé Morin a commenté les principaux résultats de la réunion. (article paru dans Europolitique)

Quel bilan tirez-vous de ce Conseil ?
La relance de l’Europe de la défense était une des priorités de la présidence. Cette mission est remplie. Lundi, nous avons signé un ensemble de conventions et lettres d’intention, comme jamais on ne l’avait fait auparavant. C’est un progrès important dans le renforcement de nos capacités militaires. Et le Sommet européen de décembre permettra d’entériner ces progrès.


L’Europe de la Défense est en passe de devenir adulte alors ?
Oui. Il faut bien voir que l’Europe de la défense, c’est quelque chose de neuf. A peine dix ans. L’Europe s’est construite sur l’idée de renoncement aux éléments traditionnels de la puissance. Et, depuis l’échec de la Communauté européenne de la défense, elle était peu évoquée dans la bouche des hommes politiques. Pour les Européens convaincus que je suis, on peut estimer que cela ne va pas assez vite. Mais aujourd’hui les Européens ont prouvé leur capacité à mener des opérations autonomes. L’opération Atalante que nous lançons sur la lutte contre la piraterie, au large de la Somalie, le prouve. L’Agence européenne de Défense, créée en 2004, qui avait jusqu’ici un plan de charge limité, va connaître un vrai programme de travail. Nous avançons sur des sujets symboliques comme une flotte commune d’A400M, ou l’Erasmus militaire, un programme de déminage maritime, un réseau de surveillance maritime de l’UE.

A quoi attribuez-vous ces avancées ?
A une vraie volonté retrouvée. Quand deux ou trois pays leaders s’engagent sur un programme, celui-ci trouve sa dynamique et son élan.Quand j’ai fait le tour des capitales depuis un an, avec mes collègues britannique, allemand, espagnol ou polonais, par exemple, j’avais ressenti cette volonté d’agir. Nous avions beaucoup d’accords politiques mais plus de réticences du côté des structures politico-militaires. L’intuition du Président de la république (Nicolas Sarkozy) de ne pas opposer Europe de la défense et Alliance a joué un rôle majeur. Cela a provoqué d’autres évolutions. Tant que les Européens voyaient dans la PESD un possible affaiblissement de l’Alliance, l’Europe de la Défense ne pouvait aller rapidement. Si les Polonais ont autant d’allant, aujourd’hui, sur le PESD, c’est aussi pour çà. Et puis, il y a une prise de conscience européenne qu’on doit assurer une partie de notre sécurité nous-mêmes.

Peux-t-on parler d’un Saint Malo bis ? Puisque même les Britanniques semblent aujourd’hui moins réticents à l’Europe de la défense.
Saint Malo, c’était une déclaration politique qu’il fallait mettre en œuvre. Aujourd’hui, nous avons travaillé sur de vraies avancées concrètes et pragmatiques. Les Britanniques nous ont longtemps reproché de faire des cathédrales sans contenu. Durant notre présidence, nous avons essayé de leur montrer la nécessité de l’Europe de la défense par des avancées précises, des projets concrets. Des briques posées peu à peu qui forment un ensemble. Avec la levée politique par le Président de la république de l’incompatibilité entre l’Otan et l’Europe de la défense, un verrou a sauté. C’est incontestable. Et le résultat est là : pour la première fois, de lutte contre la piraterie, les Britanniques vont commander une opération militaire. C’est un beau symbole de l’évolution de l’Europe de la défense et de son passage à l’âge adulte.

L’élan de la présidence française ne risque-t-il cependant pas de se briser, sur les présidences suivantes, on voit bien que les Tchèques ne sont pas enthousiastes sur le sujet.
… Dans les présidences suivantes, il y a aussi la Suède et Espagne qui sont extrêmement allantes sur Europe de la défense. J’ai confiance. Il y a une dynamique qui s’est créée.

Si vous ne deviez retenir qu’un sujet, parmi ces avancées, quel est celui qui vous tient le plus à cœur ?
L’Erasmus militaire c’est un beau symbole. Nous allons à la fois aller vers la création d’une culture européenne, un facteur d’interopérabilité et une conscience militaire pour les futures élites militaires.

Et en matière industrielle ?
Je citerai le projet de « flotte européenne », basé sur l’Airbus A400M. Avec cet avion, nous aurons tout fait ensemble : le concevoir et le construire, former les pilotes, assurer une maintenance commune, et enfin l’exploiter en commun. Quelles que soient les difficultés que nous pouvons avoir, c’est la preuve que les Européens peuvent avoir un rôle industriel.

Justement en matière de difficultés, EADS ne cesse d’annoncer des retards ?
Nous menons des discussions actuellement avec Eads sur les spécifications de l’avion et les délais de livraison. Ce que nous voulons, c’est un engagement sur une date de livraison. Nous verrons ensuite pour les compensations.

Autre sujet : le Congo. L’Europe a décidé de ne pas intervenir, alors que la situation se dégrade et que plusieurs ONGs lui demandent d’envoyer des renforts pour la Monuc, qu’en pensez-vous ?
Nous n’avons pas besoin de troupes supplémentaires. Car il y a déjà des moyens importants à la Monuc : 16 000 hommes, environ 80 avions. Ce serait vraiment assez curieux d’envoyer des troupes européennes pour encadrer celles des Nations-Unies. L’important est plutôt que l’Onu réorganise ses forces et procède à des redéploiements. Et il y a aussi un effort politique à mener avec les pays voisins.

Les Russes viennent d’annoncer le renouvellement de leurs missiles à Kaliningrad. Cela ne risque-t-il pas d’être un nouveau foyer de tension ?
Nous n’en avons pas parlé au Conseil. Mais de manière générale, il est temps de nouer un partenariat de confiance entre Européens et Russes. Nous avons la même culture, la même littérature, une même histoire en partie. Nous avons baigné dans le même bain européen. Nous devons construire une relation fiable, durable avec les Russes. Les Européens ont tout à gagner dans un pays qui a l’énergie et les matières premières dont nous avons besoin et dans un client qui a besoin d’équipements et de technologies. Et les Russes ont autant intérêt que nous à nouer ce partenariat stratégique, de confiance, avec les Européens, pour assurer leur développement économique et la paix sur le continent.

Et ce partenariat doit inclure aussi le pacte sur la sécurité, proposé par Medvedev ?
Oui. Dans ce partenariat, la sécurité jouera un rôle.
Partager cet article
Repost0

Nouveau Site


Bruxelles2 a migré depuis 2010 ! Les derniers posts sont sur  : www.bruxelles2.eu

Ou sur la version professionnelle du "Club" sur souscription

Sans oublier le fil http://www.bruxelles2.eu/feed/link... ou le fil Twitter

Avertissement B2 - Bruxelles2 n'est, en aucune façon, responsable de l'irruption de publicités, sur ce site, qui sont de l'unique initiative et responsabilité de l'hébergeur, over-blog. Vous pouvez nous suivre désormais sur le site (sans publicité) de B2

Bruxelles2 en quelques mots

Derrière les murs, la politique (européenne) des affaires étrangères (PESC), de sécurité et de défense commune (PeSDC) est décryptée. Stratégie, politique, gestion de crises, industrie ou transport aérien militaire, surveillance maritime et protection civile...Missions militaires et civiles de l'UE (Bosnie-Herzégovine, Kosovo, Géorgie, Moldavie / Ukraine, Afghanistan, Irak, Palestine, Congo RDC, Guinée-Bissau, Haïti, Océan indien, Somalie, Tchad).

logo_ouestfrancefr.pngL'éditeur : Nicolas Gros-Verheyde. Journaliste, correspondant "Affaires européennes" du premier quotidien régional français Ouest-France après avoir été celui de France-Soir. Spécialiste "défense-sécurité". Quelques détails bios et sources.